Air France : les coulisses de la succession de Pierre-Henri Gourgeon

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  594  mots
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Les actionnaires ont voté son renouvellement pour quatre ans. Pierre-Henri Gourgeon conservera ses fonctions de directeur général d'Air France-KLM mais lâchera les commandes d'Air France. Un successeur va être nommé. Gros plan sur les coulisses de cette succession.

Réunis en assemblée générale, les actionnaires d'Air France-KLM ont voté à 94,07% pour le renouvellement pour quatre ans du mandat d'administrateur de Pierre-Henri Gourgeon, directeur général d'Air France-KLM et d'Air France. Le conseil d'administration s'est réuni dans la foulée pour confirmer Pierre-Henri Gourgeon, 65 ans, dans ses fonctions de directeur général du groupe.

Dans la réorganisation de la gouvernance du groupe d'ici à la fin de l'année, Pierre-Henri Gourgeon va céder ses fonctions de directeur général d'Air France. Son successeur sera connu, selon nos informations, d'ici au 27 juillet (entre le conseil d'administration d'Air France de ce jeudi et le prochain). Pour donner un nouvel élan au groupe, la direction veut injecter du sang neuf et faire monter une nouvelle génération, destinée à remplacer les pères fondateurs d'Air France-KLM. Les Hollandais l'ont fait en nommant à la tête d'Air France-KLM cargo, Camiel Eurlings, 38 ans, ancien ministre des Transports des Pays-Bas.

Pour Air France, trois candidats sortent du lot. L'un, le favori, provient de l'externe. Il s'agit d'Alexandre de Juniac , 49 ans en novembre, directeur de cabinet de Christine Lagarde jusqu'à son départ pour le FMI et ancien directeur général adjoint de Thales. Les deux autres sont des candidats internes à Air France (ou dans le groupe)de haut calibre. Bruno Matheu, bientôt 48 ans, directeur général délégué commercial d'Air France, et Frédéric Gagey, directeur financier de KLM. Longtemps citée, Florence Parly, 48 ans, directrice générale adjointe du "cargo" de la compagnie française, semble distancée.

Selon nos informations, leur profil a été examiné, mercredi à l'occasion d'un comité de nomination du conseil d'administration, où un consensus semble se dessiner autour d'Alexandre de Juniac , même si ce sera au conseil de décider. Alexandre de Juniac dispose d'un avantage de taille avec le soutien du président du conseil, Jean-Cyril Spinetta, et de Pierre-Henri Gourgeon, mais aussi de bon nombre d'administrateurs qui rappellent que les deux présidents, Jean-Cyril Spinetta et son prédécesseur Christian Blanc, venaient de l'extérieur. Le représentant de KLM au comité de nomination hollandais de KLM, Cornelis van Lede, aurait pris la même position que Jean-Cyril Spinetta. L'Etat forcément, premier actionnaire avec 15,7% du capital, n'est pas hostile. En revanche, le puissant syndicat des pilotes de ligne (SNPL), s'est déclaré opposé à "tout parachutage".

Sans le dire ouvertement, beaucoup de pilotes soutiennent Bruno Matheu. De nombreux cadres aussi. Ses compétences dans l'aérien sont unanimement reconnues. "C'est le cerveau de l'entreprise", reconnaissent même ceux qui ne l'apprécient guère. Pour autant, ses relations animées avec les dirigeants de KLM ne plaident pas en sa faveur.

C'est l'inverse pour Frédéric Gagey qui, après avoir passé sept ans chez KLM, est le "plus Hollandais des Français". Un atout énorme dans l'optique d'une meilleure intégration des équipes des deux compagnies. Il pourrait permettre gommer les rivalités entre les équipes d'Air France et de KLM. Peu médiatisées, celles-ci sont pourtant bien réelles. De nombreuses voix s'élèvent à Air France pour dénoncer l'emprise grandissante des Néerlandais et leurs réticences à jouer collectif. "Ils font ce qu'ils veulent", déplore-t-on. Porté par les performances économiques de KLM, le camp hollandais pèse en effet de tout son poids dans la réforme de la gouvernance. Néanmoins, l'option Gagey pourrait également être mal vécue par ceux qui y voient le candidat de KLM.