Des pilotes d'Air France appelés à travailler en Chine pour résorber le sureffectif

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  749  mots
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Dans un texte commun diffusé à tous les pilotes français, le SNPL et l'association des professionnels navigants de l'aviation (APNA) lancent un appel au volontariat pour aller travailler pendant deux ou trois ans dans une compagnie chinoise, avec qui des négociations sont bien avancées

Des pilotes d?Air France iront-ils travailler quelques années en Chine pour résorber le sureffectif de la compagnie française, condamné à grimper avec les mesures de productivité en cours de négociation ? L?appel à volontaires est en tout cas lancé. Il émane du SNPL (syndicat national des pilotes de ligne) et de l?APNA (l?association des professionnels navigants de l?aviation) et il s?adresse à tous les pilotes français de toutes les compagnies. Dans un tract commun diffusé ce lundi aux pilotes et que La Tribune s?est procuré, il est indiqué que « l'APNA est actuellement en négociation bien avancée avec une compagnie aérienne chinoise privée, basée à Shanghai qui recherche des commandants de bord A320 ». 

Le calendrier apparaît serré. « La prochaine rencontre entre l'APNA et la direction de cette compagnie chinoise aura lieu le 18 juin. Nous aimerions être en mesure d'apporter à nos interlocuteurs la preuve d'un réel intérêt d'une partie des pilotes de certaines compagnies françaises, dont Air France, quant au principe d'un séjour de 2 ou 3 ans en Chine », explique le courrier, qui demande à ceux qui pourraient être intéressés d?envoyer un CV.

Régler le sureffectif

Interrogé, le SNPL explique : « l?initiative vient de L?APNA et nous avons estimé qu?elle avait du sens ; nous allons les aider pour donner des débouchés aux pilotes français ». Egalement interrogé sur le sujet, Air France "confirme être prête à aider les compagnies chinoises partenaires dans leur développement durable, en mettant à disposition des pilotes de la compagnie, afin de leur faire bénéficier de leurs compétences. Cette mise à disposition se ferait sur la base du volontariat", explique t-on en précisant que "les conditions précises de cette éventuelle assistance ne sont pas encore arrêtées, pas plus que le nombre de pilotes".

Pour autant, l?objectif est bien de régler les problèmes de sureffectif. « Le sureffectif pilotes au sein des compagnies françaises, et en particulier à Air France, existe déjà aujourd?hui, et ne pourra qu?augmenter en fonction des effets des restructurations en cours (?) mais il peut être très utile de proposer des alternatives aux pilotes en sureffectif pendant les années de vache maigre  », expliquent le SNPL et l?APNA dans le tract.

Aujourd?hui estimé, selon plusieurs sources, à plus de 200 personnes (plus pour certains en fonction des modes de calcul), le sureffectif pilotes pourrait grimper jusqu?à environ 600 personnes avec les 20% gains de productivité demandés par la direction. Pour autant, selon un observateur, l?envoi de pilotes à l?étranger ne peut être qu?une mesure parmi d?autres pour le résorber (incitation au départ des plus de 60 ans, temps alterné, temps partiel..).

Dossier compliqué

Reste que l?affaire semble compliquée à mettre en oeuvre, en particulier pour garantir aux pilotes la même rémunération à l?étranger que celle qu?ils perçoivent aujourd?hui. Car « le coût « chargé » d'un salarié français est plus du double de son salaire net avant impôts », explique le tract. « Nos salaires nets étant souvent déjà plus élevés que ceux de nos collègues travaillant dans les entreprises qui recrutent en Asie ou au Moyen-Orient, il est difficilement envisageable de prévoir une couverture à niveau strictement constant ». Et d?ajouter : « Il est difficile pour ces compagnies qui ont un programme de pilotes étrangers de discriminer les salaires en fonction de l'origine ». En effet, aujourd?hui les pilotes et les compagnies paient en plus des salaires, plusieurs cotisations dont celles à la caisse de retraite des navigants (CRPN) égales à 22% du salaire brut. Il faudrait donc ajouter un surplus de rémunération pour avoir l?équivalent des conditions au sein des compagnies françaises.

D?autres compagnies « prêtent » leurs pilotes. Deux cents pilotes de Qantas ont rejoint Emirates. « Singapour Airlines propose autant de pilotes au mieux-disant, de CSA et d'autres compagnies récemment disparues, l'APNA a pris son bâton de pèlerin afin de rechercher, pour les pilotes français, des places accessibles », rappellent le SNPL et l?APNA. De fait, dans la mesure où cette possibilité d?aller travailler à l?étranger s?adresse à tous les pilotes français, elle pourrait intéresser des pilotes des filiales régionales d?Air France, comme Britair et Regional, dont le nombre d?avions est appelé à baisser, mais aussi des compagnies comme Air Med, XL Airways ou Aigle Azur.