Le curieux cas "Uber" : ni taxi, ni VTC

Par Mounia Van de Casteele  |   |  761  mots
La très controversée start-up teste UberRush, un service de coursiers. / DR
Uber surfe sur la mode du partage chère aux internautes. Mais que se cache-t-il derrière ces quatre lettres ?

Uber ? « Ils font n'importe quoi », tance Benjamin Cardoso, PDG de LeCab, leader des sociétés de VTC. À tel point que ce nom, qui semble si familier à nos oreilles, est devenu l'ennemi numéro un des taxis comme des VTC. Il faut dire qu'Uber est un cas très à part, n'étant ni un « VTCiste », ni un taxi, mais une « société de technologie », tout droit venue des États-Unis.

« C'est juste une innovation technologique, une application de mise en relation entre professionnels du transport et particuliers », explique Pierre-Dimitri Gore-Coty, le DG France.

Uber, une petite histoire parisienne

Travis Kalanick et Garrett Camp se rendent pour la première fois à la grand-messe des nouvelles technologies, la conférence Le Web, en 2008. Ne trouvant pas de taxi dans un Paris enneigé, les jeunes entrepreneurs imaginent une application mobile qui permet de commander un chauffeur privé.

Le pionnier Uber naît ainsi à San Francisco en 2009. Rapidement, le succès est au rendez-vous. À tel point que la société tisse sa toile dans plus de 100 villes dans le monde (65 depuis le 1er janvier 2013), la dernière en date étant Shanghai.

Valorisée 3,5 milliards de dollars (2,5 milliards d'euros), la jeune start-up a séduit des investisseurs de taille, tels que la banque d'investissement Goldman Sachs, le géant d'Internet Google ou encore Jeff Bezos, le fondateur d'Amazon. Bonne pioche.

Plus d'un milliard de dollars

Son volume d'affaires aurait dépassé le milliard de dollars, la société prélevant 20% sur chaque course. Pour s'adapter aux différents besoins des clients, Uber propose une large gamme de services: d'Uber Lux avec bouteille d'eau et friandises, à l'offre low cost UberX, en passant par… Uber Taxi. Car si Uber s'adresse aux chauffeurs de VTC, en 2013, elle s'est un temps élargie aux taxis.

Mais malgré l'engouement de ces derniers, désireux d'arrondir leurs fins de mois, Uber a préféré mettre un terme à ce service face aux pressions de grandes centrales radios qui employaient ces mêmes chauffeurs. Plus récemment, Uber a lancé UberPop, un service de covoiturage entre particuliers.

Disrupteur jusqu'au boutiste

Problème : cette activité peut s'apparenter à du taxi clandestin. C'est pourquoi, son arrivée sur le marché a suscité la colère des taxis du monde entier, allant parfois jusque devant les tribunaux.

En Belgique, une décision du tribunal de commerce a interdit UberPop. Mais Uber a fait appel de cette décision, dénonçant de nombreuses erreurs de procédure parmi lesquelles le fait de ne pas en avoir été informé ! La start-up étudie donc les recours juridiques pour sa défense, convaincue qu'un bon nombre d'éléments de la plainte ne sont pas légitimes, confie le DG France. En attendant, le service opère toujours dans les rues de Bruxelles.

En Allemagne, c'est un chauffeur de taxi, « Leopold », qui a déposé plainte contre Uber, le service de VTC. Le tribunal lui a donné le droit de faire cesser l'activité d'Uber. Mais le plaignant a préféré ne pas le faire, assure Pierre-Dimitri Gore-Coty. Car s'il perdait, à l'issue du procès, le chauffeur de taxi devrait indemniser Uber à hauteur du manque à gagner évalué sur la période d'inactivité…

En quête d'une réglementation adéquate

En France, il n'y a pas de procédure contre Uber. La DGCCRF enquête seulement sur le dernier-né, son appli UberPop, et Pierre-Dimitri Gore-Coty assure « coopérer pleinement » avec les services de la Direction générale de la répression des fraudes.

Pour l'instant, il n'y a pas eu de jugement, aussi le directeur général France d'Uber réprouve-t-il les « accusations virulentes » du député socialiste Thomas Thévenoud, qui a rendu fin avril son rapport pour résoudre le problème de cohabitation entre taxis et VTC. Selon lui, qualifier Uber d'« acteur illégal » est « très déplacé ».

« Personne n'a prouvé qu'il s'agissait d'une offre illégale », rappelle-t-il.

Il faut dire qu'UberPop ne s'insère pas dans le cadre réglementaire existant.

« Une réflexion doit être menée sur sa légalité et la réglementation à lui appliquer », analyse Pierre-Dimitri Gore-Coty.

Celui-ci assure inciter les usagers d'UberPop à « être dans une logique ponctuelle et raisonnable », mais il reconnaît cependant que les dérives ne peuvent pas être exclues.

Quoi qu'il en soit, Pierre-Dimitri Gore-Coty remarque « l'amélioration du service proposé par les taxis au cours des deux dernières années ». Il estime donc que la concurrence s'avère profitable au consommateur.

« Ce qui doit être le plus important pour tout le monde », conclut-il.