Air France : le retrait de Transavia Europe, un mal pour un bien ?

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  531  mots
Les négocioations avec les pilotes portent aujourd'hui sur Transavia France
Alors que le bras de fer continue entre la direction et les pilotes d’Air France, toujours en grève, La Tribune revient sur la concession de la direction de ne pas développer Transavia à l’étranger.

Le retrait par la direction d'Air France du projet Transavia Europe est-il vraiment une mauvaise chose pour Air France-KLM? Si l'on en croit l'énergie déployée par le PDG du groupe, Alexandre de Juniac, il y a plus de 15 jours lors de la présentation du projet, pour justifier le bien-fondé de la création de filiales en Europe, leur retrait porte un coup dur au Plan Perform 2020, qui doit débuter début 2015.

Croissance sélective

Ce plan, très ambitieux sur le plan financier et stratégique, vise à permettre à Air France-KLM de "capter la croissance", de manière sélective. Devant les analystes, le 11 septembre dernier, trois cibles ont été identifiées: la maintenance, le long-courrier à travers des partenariats, et la filiale à bas coûts Transavia (aujourd'hui composée de Transavia Hollande et Transavia France) pour en faire l'une des cinq plus grosses low-cost d'Europe d'ici à trois ans avec un doublement de la flotte d'avions d'ici à 2017, à 100 appareils.
Ce développement passait par la croissance de Transavia France, limitée aujourd'hui à 14 avions, par un accord avec les pilotes d'Air France, et par la création de Transavia Europe, une structure permettant d'ouvrir des bases d'exploitation ailleurs qu'en France et aux Pays-Bas avec du personnel disposant de contrats locaux -le meilleur moyen de capter la croissance du marché low-cost en Europe qui a augmenté de 12,5% entre 2007 et 2013.

Défense d'Orly

Dans ce projet, Transavia affichait donc un volet offensif de gains de parts de marché (Transavia Europe) et un volet défensif : celui de contre-attaquer les low-cost étrangères en France, à Orly en particulier. En effet, sans développement de Transavia France, Air France serait incapable de maintenir ses positions face aux low-cost et risquerait fort de fermer des lignes, libérant ainsi des créneaux horaires de décollage à la concurrence.

Risque d'échec

En lâchant Transavia Europe sous la pression des pilotes qui la considérait comme un outil de délocalisation de l'emploi français, Air France n'a donc conservé que l'aspect défensif de Transavia. Ceux qui prêchaient cette stratégie le regrettent. D'autres, plus pragmatiques sont plus réservés.

"Le risque d'exécution de Transavia Europe était très important", explique Yan Derocles, analyste chez Oddo Securities.

Partie de rien, elle devait s'imposer à l'étranger face à des Ryanair ou Easyjet fortement installées, alors même que sa notoriété reste à prouver en dehors des marchés français et néerlandais. En outre, au-delà de sa structure de coûts qui s'approche de celles des meilleures low-cost, Transavia dispose d'une expérience modeste de la commercialisation directe auprès des voyageurs. Jusqu'ici son modèle était en effet un modèle mi-charter-mi-low-cost, avec une bonne part d'avions remplis par les tour-opérateurs.

La croissance de Transavia France va-t-elle compenser?

Le retrait du projet permettra non seulement de réduire l'enveloppe des investissements (1 milliard d'euros était prévu) mais aussi d'anticiper les bénéfices attendus du pôle Transavia. Pour autant, pour que l'abandon de Transavia Europe soit bien un moindre mal, Yan Derocles estime qu'il faudrait muscler davantage Transavia France au-delà des 37 avions jusqu'ici annoncés par la direction.