Air France : les syndicats acceptent de négocier mais ne lèvent pas les préavis de grève

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  695  mots
(Crédits : Pascal Rossignol)
Après la proposition de la direction de lancer des négociations pluriannuelles sur les salaires et d'accorder dès à présent 1% de hausse supplémentaire, l'intersyndicale a accepté de se mettre autour de la table mais, contrairement aux attentes de la direction, les préavis pour 4 autres jours de grève en avril ne sont pas levés.

Après sept jours de grève qui ont déjà coûté 170 millions d'euros à la compagnie, les syndicats d'Air France maintiennent la pression sur la direction. L'incompréhension doit être grande pour Franck Terner, le directeur général d'Air France. Alors qu'il estimait mardi qu'il serait « incompréhensible de ne pas lever les préavis de grève » à la suite de sa proposition d'ouvrir dès ce jeudi une négociation pluriannuelle sur les salaires pour les trois prochaines années, l'intersyndicale, composée d'une dizaine de syndicats de tous horizons, a certes accepté dans sa majorité de se mettre autour de la table, mais ne lui pas donné gain de cause sur les préavis de grève. Ces derniers sont en effet maintenus pour les journées des 17, 18, 23 et 24 avril.

Épée de Damoclès

Contrainte de négocier avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête, la direction d'Air France va donc devoir jouer serré pour présenter un protocole de sortie de crise dont les modalités convainquent les syndicats. Mardi, pour calmer la grogne des syndicats qui refusent la hausse de 1% proposée (+1,4% de primes individuelles pour le personnel au sol -celles des navigants sont régies par des accords spécifiques), et demandent une augmentation de 6% (hors GVT, primes individuelles, et intéressement) afin de rattraper le gel, non pas des "salaires" depuis 2011, mais le gel des "grilles salariales", la direction a proposé d'accorder qu'une partie des hausses de salaires qui allaient être négociées soit versées dès avril à hauteur de 1% de hausse supplémentaire.

"Une hausse de 6%, c'est un dû" (FO)

La mesure n'a semble-t-il pas convaincu les syndicats et les salariés.
Pour Karim Taïbi (FO), il est "hors de question qu'on se couche pour 1% [de plus]".

"On ira chercher nos 6%, c;est un dû", a-t-il confié à l'AFP.

Karine Monsegu, de la CGT, abonde dans le même sens. Selon elle, il faut "maintenir notre mouvement jusqu'à ce que la revendication de 6% d'augmentation "soit satisfaite". "Ils ont un genou à terre", il faut "qu'on tienne le coup jusqu'à ce qu'on obtienne nos augmentations de salaire", a-t-elle ajouté.

Pour un pilote, la proposition de la direction est maladroite car la hausse de 1% supplémentaire est considérée comme une avance qui sera retenue sur les augmentations des années suivantes. Critiquée, cette façon de faire permet à la direction de maintenir l'accord de NAO sur les 1% signée avec la CFDT et la CFE CGC et donc de ne pas les désavouer à quelques mois des élections professionnelles, une échéance qui, selon de nombreux observateurs, joue d'ailleurs beaucoup dans le comportement de certains syndicats.

"Ces 6% sont irréalistes cette année" (Janaillac)

Des revendications que la direction a du mal à comprendre.

« La proposition qui a été faite est à la fois forte et raisonnable", a déclaré ce mercredi Jean-Marc Janaillac sur Europe 1. "Elle consiste à dire : Ces 6% que vous demandez, c'est totalement irréaliste cette année, mais projetons-nous dans l"avenir, sur 2019, 2020 et 2021, fondons ensemble un pacte de croissance et commençons à faire une négociation salariale sur ces trois années ".

Et le Pdg du groupe Air France-KLM d'ajouter :

"Air France est l'une des compagnies parmi les moins rentables d'Europe et elle est face à une concurrence redoutable et qui s'accroît. Cet été, nous aurons des low-cost vers les Antilles, vers les Etats-Unis. Easyjet ouvre des bases en France. Je suis confiant dans le fait que la majorité des salariés d'Air France réalise que le monde dans lequel nous vivons n'est pas celui qui existait il y a dix ans, qu'il faut savoir s'adapter et que le niveau d'effort qui leur est demandé est tout à fait raisonnable. Je ne peux pas imaginer que les syndicats d'Air France refusent la proposition qui leur a été faite pour permettre de poursuivre cette croissance qui profite à tous et qui va créer des emplois pour Air France."

Avec les 2% proposés, le GVT, les primes individuelles et l'intéressement, la masse salariale d'Air France qui tourne autour de 4 milliards d'euros, va augmenter de 5,5% cette année.