Easyjet ne cesse de dégringoler en Bourse avec le Brexit

Par Fabrice Gliszczynski  |   |  994  mots
La compagnie à bas coûts britannique a perdu plus d'un tiers de sa valorisation boursière depuis les résultats du référendum. Ce lundi, la direction a prévenu que son chiffre d'affaires du deuxième semestre serait inférieur aux attentes.

Le Brexit a fait plonger les cours de bourse des compagnies britanniques. Lundi en milieu de journée, le cours de bourse d'Easyjet et du groupe IAG (qui regroupe British Airways, Iberia, Vueling et Aer Lingus), s'était respectivement effondré de 35% et de 31% depuis jeudi soir, la veille du résultat du référendum britannique sur la sortie de l'Union européenne.

Même si le Brexit n'est pas immédiat, British Airways a fait une alerte sur ses résultats 2016 en disant que les incertitudes sur le Brexit ces dernières semaines avaient pesé sur les réservations estivales. Ce lundi Easyjet a également prévenu que son chiffre d'affaires devrait être en recul de 5% au deuxième trimestre par rapport à ses prévisions. "Après le résultat du référendum sur l'UE, nous estimons que l'été sera probablement marqué par des incertitudes supplémentaires pour l'économie et les consommateurs", a justifié la société dans un communiqué. Compagnie irlandaise, Ryanair est "un peu" moins impactée : -19%.

Trafic moins fort que prévu

Les conséquences pour le transport aérien britannique se feront sentir sur la durée. L'association internationale du transport aérien (IATA) estime que le trafic de et vers le Royaume-Uni pourrait être d'ici à 2020 entre 3 et 5% inférieur à ce qu'il aurait été sans le Brexit. Ceci en raison du ralentissement attendu de l'activité économique et de la chute de la Livre sterling." Autrement dit, le trafic n'augmenterait que de 1 à 1,5% par pan d'ici à 2020", explique l'IATA .

Si la chute de la Livre va rendre les voyages des Britanniques à l'étranger plus élevés, elle devrait permettre aussi d'augmenter le trafic « incoming », qui ne compte aujourd'hui que pour un tiers du trafic de et vers le Royaume-Uni. Selon l'Iata, l'impact sur le Brexit est moins certain sur l'activité cargo à court terme mais il pourrait diminuer sur le long terme en raison de la baisse de 10 à 20% des échanges avec le Royaume-Uni estimée par l'OCDE.

Un millier de vols annulé

EasyJet souffre en effet de plusieurs autres maux. Les mois de mai et juin ont été particulièrement compliqués par "l'impact de la grève continue des contrôleurs aériens français", "les problèmes de pistes et de congestion à l'aéroport de Gatwick" et "les événements climatiques", selon EasyJet. Sur le seul troisième trimestre de son exercice décalé, qui avait débuté en avril, 1.061 annulations de vol ont déjà été enregistrées.

"Combinées à la tragédie d'Egyptair", ces annulations ont "conduit à un recul au niveau de la demande des clients et par conséquent à une diminution du rendement et a affecté le bénéfice avant impôt du troisième trimestre d'environ 28 millions de livres", a souligné la compagnie.

A taux de change constant, la recette unitaire au troisième trimestre devrait reculer d'environ 8,6% contre un repli de 7% prévu initialement, a-t-elle prévenu. Parallèlement, la remontée des prix du carburant et la chute de la livre "devraient ajouter environ 25 millions de livres de coûts additionnels sur l'année" par rapport aux prévisions initiales.

Surtout la compagnie souffre du manque de visibilité sur le plan réglementaire.

Marché unique du transport aérien européen

En effet, en quittant l'Union européenne, le Royaume-Uni quitte a priori le marché unique du transport aérien européen et les compagnies britanniques comme Easyjet ou British Airways perdraient la possibilité de s'implanter et de voler librement où elles le souhaitent dans les pays de l'Union européenne. (pour Ryanair, compagnie irlandaise, l'impact concernerait toute son activité au départ du Royaume-Uni, notamment de sa base principale de Londres-Stansted).

Ce point est crucial pour Easyjet qui doit son succès au marché commun du transport européen mis en place il y a une vingtaine d'années. Seule véritable compagnie paneuropénne (avec Ryanair), elle peut voler où elle le souhaite dans l'UE. Sortir de ce schéma serait catastrophique pour la compagnie anglaise.

Ce vendredi, Easyjet s'est empressée de demander au gouvernement britannique et à la Commission européenne de faire "du maintien du Royaume-Uni dans le marché européen du transport aérien une priorité".

"Nous sommes confiants sur le fait que ce vote n'aura pas d'impact conséquent ni sur notre stratégie ni sur notre capacité à générer une croissance en termes de résultats et de bénéfices pour nos actionnaires. Easyjet s'était préparée à cette éventualité jusqu'au vote référendaire et a travaillé sur un certain nombre d'options qui lui permettront de continuer à voler dans tous ses marchés. La priorité sera d'accélérer le dialogue entre le Royaume-Uni, les Etats membres de l'Union Européenne et leurs régulateurs afin de garantir que le Royaume-Uni continuera à faire partie du marché unique du transport aérien européen. Ceci permettrait aux compagnies européennes de voler librement au sein du Royaume-Uni ainsi qu'entre l'Europe et le Royaume-Uni et aux compagnies aériennes du Royaume-Uni de voler librement en Europe, comme aujourd'hui", a déclaré Easyjet dans un communiqué.

Les exemples suisse et norvégien

Ne pas être dans l'Union européenne ne constitue pas néanmoins un obstacle. Le cas de la Norvège ou de la Suisse en témoignent. Les compagnies norvégiennes par exemple ont un accès total au marché unique du transport aérien européen. La signature d'un accord entre la Suisse et l'Union européenne permet aux compagnies suisses d'être assimilées comme des transporteurs européens et donc de pouvoir bénéficier des mêmes facilités. A une condition. Les compagnies suisses doivent appliquer les règles européennes.

Peu d'experts imaginent un refus à un tel régime de la part des grands pays de l'UE, même si  cela permettrait d'affaiblir la concurrence sur leurs compagnies nationales des puissantes compagnies low-cost britanniques.