Les emplois verts : c'est bien pour la planète mais c'est peut être nuisible à l'homme

Par Dominique Pialot  |   |  685  mots
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Un récent rapport de l'Organisation internationale du travail (OIT) analyse la croissance verte, non pas en termes économiques, mais d'impacts sur la santé.

Lorsque la Direction générale de la santé a récemment annoncé le bannissement d'ici à 2022 du perchloréthylène utilisé dans les pressings pour le nettoyage à sec, les écolos se sont réjouis. A juste titre, si l'on en juge par les dégâts sur la santé provoqués par ce neurotoxique. Seulement voilà, rien ne prouve que les hydrosilanes qui doivent le remplacer soient moins nocifs ! Ils entrent dans la catégorie des substances surveillées, dont on ignore encore l'impact.

Des produits verts analysés sur toute leur durée de vie

Cette question, de savoir si l'on ne fuit pas la peste pour le choléra, commence à être posée de façon de plus en plus scientifique concernant l'impact environnemental des produits, notamment grâce aux analyses de cycle de vie qui chiffrent cet impact depuis l'extraction des matières premières jusqu'à la fin de vie des produits en passant pas leur phase d'usage. Par exemple, en combien d'années une éolienne ou un panneau solaire compensent-ils l'énergie nécessaire à leur fabrication ? Quels sont les bénéfices comparés d'un produit bio ayant fait le tour de la terre en avion et d'un produit industriel fabriqué localement ?

Des emplois verts évalués sur le plan quantitatif

Concernant les emplois « verts » à proprement parler, c'est d'abord en termes quantitatifs que la question se pose le plus fréquemment : certains secteurs de l'économie verte sont-ils vraiment susceptibles de générer la création de nouveaux emplois, ou s'agit-il dans le meilleur des cas d'une transformation, d'un « verdissement » d'emplois existants ? Et, s'ils existent, le solde net est-il positif entre les nouveaux emplois et ceux qui sont détruits parce qu'ils appartiennent à des secteurs polluants en perte de vitesse (typiquement, dans l'industrie automobile traditionnelle ou d'autres secteurs contraints à évoluer pour s'adapter au double défi énergétique et climatique) ?

Environnement ou santé, faut-il choisir ?

Mais il est nettement plus rare de voir remis en cause les bénéfices de ces emplois verts sur la santé. C'est ce que vient de faire l'Organisation internationale du travail (OIT) dans un rapport publié la semaine dernière en amont de la journée internationale de la santé et la sécurité au travail (SST) du 28 avril, qui avait pour thème « Promouvoir la sécurité et la santé dans une économie verte ».

Plus précisément, les auteurs mettent en garde : si ces nouveaux métiers ont, par construction, un impact positif (ou moins négatif) sur l'environnement, cela ne signifie pas qu'ils sont sans danger pour la santé, notamment celle des travailleurs. Il faut donc mettre en place des mesures de ces impacts et le cas échéant, des solutions pour remédier aux nouveaux dangers.

Recyclage et énergies renouvelables sous surveillance

Les exemples cités dans le rapport sont pléthores. Les secteurs les plus dynamiques de l'économie verte sont particulièrement concernés. Le recyclage de déchets d'équipements électroniques contenant des substances dangereuses, par exemple, exigerait des précautions particulières qui sont loin d'être généralisées. D'autant plus qu'il s'agit d'une activité dans laquelle l'économie informelle domine dans les pays émergents.

Quant aux énergies renouvelables, la maintenance des éoliennes s'accompagne de risques de chutes et d'électrocution, et les panneaux solaires dégagent des substances toxiques dès leur fabrication, sans parler des conséquences en cas d'incendie des bâtiments sur lesquels ils sont posés.

Mais c'est sur la substitution de produits à la nocivité avérée par d'autres sur lesquels on manque de recul, que le problème se pose avec le plus d'acuité. Cela concerne par exemple le remplacement de peintures à base de solvants par des peintures hydrodiluables contenant des biocides potentiellement nuisibles à la santé ; celui des gaz hydrochlorofluorocarbones (HCFC) utilisés pour les équipements de refroidissement et nuisibles pour l'effet de serre par des chlorofluorocarbones aux risques cancérogènes accrus.

Mais pour revenir au cas du perchlo dans les laveries, le seul fait de se poser ces questions constitue en soi un progrès...