Le programme énergétique de Macron : dans les pas de François Hollande

Par Les Arvernes  |   |  809  mots
L'énergie devrait être un des principaux thèmes de la présidentielle pour remettre ce secteur sur pieds. Mais le programme d'Emmanuel Macron est à ce titre dans la droite ligne de la politique énergétique menée durant le mandat de François Hollande

Les brumes de l'euphorie post-COP21 dissipées, le retour à la réalité pour l'administration Hollande a été particulièrement dur. La conférence sur le climat de Paris, au delà des intentions, beaucoup de ses promoteurs le reconnaissent à demi-mot, n'a rien réglé. En sus, le cœur de l'action de S. Royal, la « transition énergétique », est à largement inapplicable et surtout en retard sur ses objectifs d'après un rapport parlementaire de l'automne 2016.

Dans un tel contexte, l'énergie doit être un des principaux thèmes de la présidentielle pour remettre ce secteur sur pieds. Le programme d'E. Macron est à ce titre dans la droite ligne de la politique énergétique menée durant le mandat de F. Hollande. Le candidat libéral défend ainsi en même temps la transition énergétique, précisant que la loi relative à cette dernière est une étape et qu'elle doit être approfondie, et la filière nucléaire. Or les deux semblent difficilement compatibles, puisque le cœur de cette transition consiste à raboter la part du nucléaire dans le mix énergétique. Il est ainsi étonnant que le candidat évoque « le courage de penser à long terme » alors même que son embryon de programme l'oriente vers le court terme.

 Promettre beaucoup, au risque de décevoir cruellement

Le programme d'Emmanuel Macron sur le sujet énergétique est ainsi fait inspiré par la philosophie qui a présidé au cours des années récentes : promettre beaucoup, au risque de décevoir cruellement. La loi sur la transition énergétique telle qu'elle était promue par S. Royal, dont certains des objectifs peuvent être repris témoignait, hélas, d'une méconnaissance inquiétante des réalités technico-économiques. La volonté de promouvoir coûte que coûte les énergies renouvelables, en augmentant de manière inconsidérée - par ce qu'il faut bien appeler des processus incantatoires - leur part dans le mix énergétique, va à l'encontre des réalités. En l'état de la technologie et du mode de consommation énergétique des Français, le mix électrique national doit disposer d'une base robuste, prévisible et économiquement soutenable. Il doit ainsi être fondé sur une source d'énergie fossile, charbon, gaz ou nucléaire.

Un mix illusoire à base de renouvelable

Nos voisins ont le plus souvent fait le choix du charbon ou du gaz, au prix d'une dépendance accrue aux fournisseurs d'hydrocarbures et d'une augmentation de leurs émissions de gaz à effet de serre. L'originalité de la France était justement ce choix du nucléaire comme énergie de base, réduisant fortement les émissions et limitant drastiquement la dépendance à l'étranger par la maîtrise de l'ensemble de la filière sur notre territoire.

Remettre en cause ce choix pour aller à marche forcée, au mépris du temps long inhérent à l'énergie, vers un mix illusoire composé en majorité de renouvelables - et en réalité à long terme en visant la quasi disparition du nucléaire - reviendrait à augmenter drastiquement la fiscalité des ménages, à l'exemple de l'Allemagne ou du Danemark, et à remettre en cause notre sécurité énergétique. La quasi-totalité des éléments industriels concourant aux énergies renouvelables (éoliennes, panneaux solaires, etc.), sont ainsi fabriqués hors de France et hors d'Europe, en Chine principalement.

Un financement par la "French Tech"?

En outre le projet du candidat Macron, par appel à la finance, se manifeste par la volonté de faire intervenir la « French Tech » dans le financement de ce projet énergétique. Qu'il soit permis de rappeler ici que les financements nécessaires au secteur de l'énergie sont bien supérieurs à ce que l'écosystème embryonnaire de la « French Tech » peut faire. Il s'agit par essence du lieu du régalien, des grandes infrastructures et de la recherche publique qui doit être orientée et soutenue et non pas privatisée dans les mains de tel ou tel. Alors que les grandes puissances mettent en place des synergies public-privé avec un soutien massif de l'Etat, le candidat Macron veut aller à l'encontre de ce modèle, au risque de brader notre secteur énergétique. C'est évidemment une erreur.

Au total, les orientations d'E. Macron sur le nucléaire sont floues. Comment défendre une filière d'excellence quand on veut diminuer sa taille et arrêter de la financer directement ? Il y a là un numéro d'équilibriste dangereux. Contrairement à ce qui a été trop souvent fait au cours des années récentes, on ne peut, concernant l'énergie, saupoudrer les efforts au nom de la recherche du consensus permanent. Dans le domaine énergétique, le prochain président devra trancher, diriger, choisir : la politique énergétique de la France le mérite.

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, chefs d'entreprises, essayistes, professeurs d'Université.