Manu-La-Chance ?

Par Philippe Mabille  |   |  609  mots
La première année du (premier ?) quinquennat d'Emmanuel Macron s'achève sur de bonnes nouvelles pour le président et pour la France.Non seulement le chef de l'État a réussi à inverser la courbe de sa propre impopularité, après un sérieux dévissage cet été jusqu'au début de l'automne, fait inédit (en général, quand un président déçoit les Français, il ne s'en relève plus) ; mais aussi, les deux phénomènes étant peut-être liés, la courbe de la croissance s'accélère.

L'Insee vient de relever de 1,8 à 1,9 % sa prévision pour 2017 et s'attend à une poursuite de cette reprise au moins jusqu'au milieu de l'an prochain. Climat des affaires, moral des ménages, créations d'emplois, investissements, consommation, tous les indicateurs sont au vert, sauf un, le point noir de l'économie française, le déficit commercial.

Emmanuel le veinard ? Sans doute, mais il n'est pas interdit d'allier la chance à la jeunesse et à l'audace. Toute la question est de savoir qu'en faire et comment la faire durer. Du point de vue de l'action, le bilan des premiers mois est globalement positif. Force est de reconnaître que l'élection d'Emmanuel Macron a créé un électrochoc pour l'image du pays tant à l'intérieur qu'à l'étranger, et que le rythme des réformes engagées a été soutenu. Ordonnances sur le travail, réforme de l'ISF et flat tax sur le capital, transfert de cotisations salariales sur la CSG, suppression progressive de la taxe d'habitation, baisse programmée de l'impôt sur les sociétés...

Et pourtant, il reste tant à faire... C'est tout le défi qui attend Emmanuel Macron en 2018. En 2017, il a occupé le terrain en mettant en oeuvre ses promesses de campagne. Mais elles mettront du temps, au moins deux ans, a-t-il dit, avant de produire d'éventuels résultats visibles. Deux ans pendant lesquels rien ne dit que la conjoncture restera aussi favorable, deux ans d'imprévus et d'incertitudes notamment géopolitiques qui pourraient mettre à bas les espoirs de succès d'une politique qui a sa cohérence, mais dont les mesures restent homéopathiques à l'échelle des problèmes que la France a à résoudre.

Pour Emmanuel Macron, 2018 sera donc forcément une année d'accélération. D'abord parce qu'en l'absence de réelle opposition en 2017, le président se dit probablement qu'il a encore une fenêtre de tir pour faire bouger les lignes. Il est probable aussi que ce soit ce qu'attendent de lui la majorité des Français. En 2018, des réformes importantes débattues cette année seront engagées : choc d'offre dans le logement, alors que le bâtiment commence à battre de l'aile, loi sur les nouvelles mobilités du quotidien, acte II des réformes sociales avec l'assurance-chômage universelle, les réformes de l'apprentissage et de la formation professionnelle.

Mais Emmanuel Macron est surtout attendu sur des sujets plus difficiles : réforme de l'État et de l'action publique alors que malgré la croissance, qui dope les recettes d'impôt, les comptes publics restent préoccupants et que sur la diminution des effectifs de la fonction publique (120 000 postes prévus sur cinq ans), on reste très loin du compte. Sur les impôts, le chef de l'État risque aussi de devoir jongler avec l'exaspération des classes moyennes qui verront leur charge fiscale globale augmenter de 4,5 milliards l'an prochain.

Enfin, Emmanuel Macron va devoir en 2018 sortir du bois sur des sujets délicats : statut des cheminots et réforme de la SNCF surendettée, avenir d'EDF et basculement vers les énergies renouvelables, privatisations avec quelques cas brûlants, comme Orange, alors que pointe de nouveau l'idée d'une concentration du nombre des opérateurs télécoms. Ou comme l'avenir du service public de la télévision, chantier que le président a ouvert de lui-même en appelant, lors de sa déambulation élyséenne, à une réforme profonde. Bref, on l'a compris, en 2018, Emmanuel Macron sera sur tous les fronts. Dans le calendrier chinois (à partir du 6 février), ce sera l'année du chien. Animal loyal, bienveillant et fidèle, mais parfois aboyant...