Reprise, la BCE et l'Allemagne ne jouent pas le jeu

Par Olivier Passet, Xerfi  |   |  487  mots
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi / DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, la BCE et l'Allemagne ne jouent pas le jeu de la reprise.

Le début d'une reprise est une phase critique, on le sait. Comme pour une mécanique, il faut vaincre l'inertie et le risque de caler est important. C'est donc un moment où les politiques doivent être pro-cycliques, c'est-à-dire jouer le rôle de starters. Cet enjeu est bien compris des pays anglo-saxons. Ils le démontrent encore aujourd'hui en jouant le relâchement monétaire. Car c'est la diffusion de la reprise, son amplification puis son autonomisation qui se jouent alors.

  • Et c'est le talon d'Achille de la reprise européenne. Le mouvement de retournement est aujourd'hui incontestable, au Sud comme au Nord. Pas besoin d'y revenir mais avec en arrière-plan des politiques budgétaires qui n'ont toujours pas retrouvé leur neutralité.
  • Et dans ce contexte fragile, ni la BCE, ni l'Allemagne ne jouent actuellement le jeu de la diffusion et de l'amplification de la reprise.

La BCE, d'abord. On l'a dit mainte fois continue à résorber son bilan. Les banques remboursent aujourd'hui les avances à court terme qui leur avaient été consenties. Autrement dit, la BCE a échoué dans sa tentative de relance du crédit européen. Face à cela, elle tarde à mettre en oeuvre des stratégies alternatives. Notamment des taux de dépôt négatifs pour les banques, qui pourraient les inciter à faire travailler davantage la liquidité bancaire. Elle tarde à agir plus directement sur les marchés obligataires, face aux réticences allemandes.

Pendant ce temps, le piège de la déflation se referme peu à peu. Plus précisément un cercle vicieux de hausse de l'euro et de gel de l'inflation et de ralentissement des salaires. Autrement dit, la reprise européenne, est à la fois pénalisée sur le plan intérieur et extérieur.

Côté allemand, c'est la dynamique des salaires qui inquiète. La reprise européenne a besoin d'une locomotive en interne. Les économies du Sud notamment, si elles veulent tirer avantage de leur dévaluation interne et ressortir du trou dans lequel les a plongé la crise. Or que voit-on ? Alors que les négociations salariales semblaient redonner un élan au pouvoir d'achat allemand, le mouvement est en train de s'enrayer.

Pourquoi ? Parce que face à la hausse de l'euro, les entreprises allemandes distribuent moins de bonus que l'an dernier. Résultat, la modération salariale est en train de gagner outre Rhin, ou la croissance des salaires n'est plus que de 1,5 à 2% contre 3,5% en début d'année.

Le piège de la hausse de l'euro et de la déflation salariale se referme sur l'activité européenne. Et si la BCE ne prend pas la mesure du risque face aux stratégies hyper- volontaires du Japon, du Royaume-Uni ou des Etats-Unis, l'Europe restera la région du monde qui résorbe les surcapacités des autres.

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