Nicolas Sarkozy n’a plus le choix

Par Jean Christophe Gallien  |   |  832  mots
Selon Jean-Christophe Gallien, l’affaire Bygmalion a déjà beaucoup nui à Nicolas Sarkozy. ./DR
Le retour de l'ancien président de la République ne sera pas triomphal. Il doit prendre ses responsabilités et proposer une vraie ligne politique tournée vers le futur. Par Jean Christophe Gallien, professeur associé à l’Université de Paris 1 la Sorbonne.

Brice Hortefeux, le plus proche des proches de Nicolas Sarkozy, le martèle : il souhaite que ce dernier "soit candidat à la présidence de l'UMP" lors du congrès du parti prévu en octobre. Il ose même dire : "Le retour de Nicolas Sarkozy, qui était une possibilité, devient une nécessité." On a envie de compléter : Pour Nicolas Sarkozy, oui c'est nécessaire ! Et surtout : il n'a plus vraiment le choix, même à trois ans de la présidentielle, il doit accélérer ou accepter de s'effacer, inexorablement.

L'ex-chef de l'Etat subit un décrochage inédit dans les sondages, Alain Juppé se situe même devant lui dans les enquêtes d'opinion effectuées auprès des sympathisants de l'UMP. Nicolas Sarkozy est touché par l'implosion de son parti et il est, désormais comme les autres, emporté par le discrédit général qui frappe la classe politique. L'affaire potentielle dite Bygmalion lui a fait très mal. Une ligne de défense consistant à dire qu'il n'était au courant d'aucun aspect logistique de sa campagne ne tient pas. Les Français comprennent qu'un dépassement dans un budget est sinon repérable au moins perceptible par un homme politique rompu aux campagnes électorales.

 

La communication ratée de Nicolas Sarkozy

La narration de l'ex-président subit, depuis plusieurs mois, une série d'échecs qui limitent les chances de valorisation politique d'une audience médiatique et populaire positive qui demeure encore. La magie s'est effacée. Sarko a peu à peu disparu laissant la place à un Nicolas Sarkozy normalisé.

Il y a d'abord l'échec de la posture narrative de la victime. Victime de la crise face à François Hollande puis d'un complot permanent des juges. Trop difficile à porter et à croire tant le nombre de cas s'additionnent jusqu'au dernier lancé par Jérôme Lavrilleux. Il y a l'échec de la narration du recours, de la responsabilité du « héros » face à la crise et aux errements et insuffisances gouvernementaux, hollandiens,... Lorsqu'il disait ne pas en vouloir mais devoir répondre à sa responsabilité spécifique comme transcendée, le sauveur légitime du pays, c'était lui. Cela n'a pas fonctionné.

 

Nicolas Sarkozy doit proposer une vrai ligne politique renouvelée

Demeure encore pour un temps peut-être la narration du véritable chef visionnaire au cœur d'une démarche « nécessaire » face à la déliquescence de sa famille politique, la chute du pays dans une Europe injuste et mortifère. Mais le temps file vite, la situation se dégrade en France, il doit accélérer sa mise en place et pour que son retour soit crédible, il lui faut une véritable ligne politique, renouvelée, tournée vers le futur, pas de flash back nostalgique permanent vers un son premier mandat. Les Français ne seront pas séduits par une démarche opportuniste ou défensive faite d'improvisation politique. Les sympathisants et militants de l'UMP non plus. Les Français veulent des résultats désormais, ils ne veulent plus d'incantations et encore moins des promesses pour demain.

Il doit donc passer à l'action. Entrer dans l'arène. Demain il sera trop tard. Au risque même d'être abattu en plein champ par les balles des juges, nombreux, qui travaillent sur les affaires nombreuses qui semblent l'impliquer de près ou de loin. Il est impossible pour celui que le "peuple de droite" considérait encore, il y a peu, comme son leader naturel, de continuer à ne pas prendre ses responsabilités de chef en reprenant le commandement. S'il demeure à l'écart, s'il ne vient pas assumer ses responsabilités de chef de la droite pour la tirer d'une crise majeure, le même "peuple de droite" ne peut que se détourner de lui. Ce qui est déjà en cours. Nicolas Sarkozy aura déçu en passant son tour.

 

Le retour de Nicolas Sarkozy ne sera pas un triomphe

Reste que quoi qu'il décide, son retour sera très éloigné d'un triomphe. Il faudra sauter à pieds joints dans la galère turbulente et instable de l'UMP gardé par des intérimaires qui s'épient et se contrôlent tout en ambitionnant pour beaucoup de récupérer une mise incertaine et qui pour la plupart ont déjà du mal à le supporter en commandeur des croyants ou n'ont aucune envie de le retrouver comme patron en titre.

Amis ou ennemis, défaite ou victoire, quel que soit le bord, pour une grande majorité, la page 2012 doit être tournée. Pas de promesses de succès futurs donc !

S'il l'emporte, il lui restera à changer le nom de l'UMP pour tenter de nettoyer la maison des affaires liées à ce nom. Il devra aussi élargir la géographie politique du mouvement et tenter de créer un nouveau rassemblement des droites et des centres. Ce sera aussi, pour lui, la possibilité d'éviter la primaire. A suivre …