Bertrand Piccard : "C'est notre survie qui est en jeu et donc c'est notre état d'esprit qu'il faut changer"

Par Patrick Cappelli  |   |  496  mots
Bertrand Piccard, lors du Forum Smart City Paris. (Crédits : La Tribune)
L’aventurier et scientifique Bertrand Piccard a prouvé en 2015 avec son avion Solar Impulse qu’on pouvait boucler un tour du monde sans énergie fossile. Au Forum Smart City du Grand Paris organisé mardi 27 novembre par La Tribune, il a délivré un message d’espoir sur la transition énergétique : "Les solutions existent, à condition de changer notre mode de pensée".

"Les spécialistes m'ont dit qu'il était impossible de faire voler un avion jour et nuit sans carburant fossile. Pourtant, j'ai parcouru 40.000 km sans une goutte de pétrole. La révolution des clean tech a pris son envol", a expliqué Bertrand Piccard mardi 27 novembre 2018 en ouverture du forum Smart City du Grand Paris organisé par La Tribune sous les ors de la salle des fêtes de l'hôtel de Ville.

Lorsque l'aviateur écologiste est allé voir les industriels de l'aéronautique pour leur demander de construire un aéronef en fibre de carbone avec l'envergure d'un Boeing 747, le poids d'une voiture et la puissance d'un scooter, le verdict est tombé : impossible. L'aventurier suisse s'est donc tourné vers un chantier naval. "Ce sont les spécialistes qui résistent au changement et les outsiders qui amènent des solutions. La première voiture électrique à succès n'a pas été faite par les fabricants automobiles mais par un milliardaire d'Internet, Elon Musk, qui a imaginé la Tesla", rappelle Bertrand Piccard, pour qui le grand obstacle à l'innovation n'est pas technologique mais psychologique.

En réalité, "the fuel is the limit"

Son message : "Cessons de penser en ligne droite et empruntons les chemins de traverse". Par exemple, il faut arrêter de croire que la protection de l'environnement coûte cher et demande des sacrifices. Pour l'aviateur, c'est même le contraire : la transition écologique est rentable, enthousiasmante et il existe de nombreuses solutions pour vivre mieux émanant de startups et de grands groupes. Il est d'ailleurs en train de rassembler avec sa fondation Solar Impulse, 1000 solutions labellisées pour apporter des réponses concrètes à l'accompagnement de la transition énergétique, qu'il veut présenter à l'ONU, dont il est Ambassador of the Earth, et aux gouvernements lors d'un nouveau tour du monde.

"On dit toujours « the sky is the limit » (le ciel est la limite). En réalité, « the fuel is the limit » ! Solar Impulse a volé sans bruit, sans carburant, sans pollution. Ce n'est pas de la science-fiction mais le présent. Le reste du monde vit dans le passé, avec des technologies inventées au XIXe siècle : les moteurs à combustion ont un rendement de 27% (ratio de la puissance mécanique restituée par rapport à la puissance thermique fournie par le carburant, ndlr), l'ampoule à incandescence à 5% d'efficacité contre 95% pour une LED", s'enflamme l'aérostier.

"La taxe carbone, personne n'en veut quand un pays ne l'a pas encore instituée, mais tout le monde en veut quand c'est le cas", a-t-il ajouté, citant l'exemple de la Suède ou de la Californie, où la baisse des émissions de CO2 s'est accompagnée d'une amélioration de la croissance. "Le changement est nécessaire et il est possible. C'est notre survie en tant qu'humanité qui est en jeu et donc c'est notre état d'esprit qu'il faut changer" !

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