Combien les engagements de la COP21 nous coûteront-ils ?

Par Bjorn Lomborg  |   |  870  mots
Surtout, ne le demandez pas aux politiciens! Par Bjorn Lomborg, directeur du Copenhagen Consensus Center et professeur adjoint au Copenhagen Business School. Bjorn Lomborg commente chaque jour l'actualité de la COP21 pour La Tribune

Lorsque vous faites vos courses - que ce soit dans le magasin du coin ou dans les boutiques chics des Galeries Lafayette ou du Printemps à Paris - vous vous attendez naturellement à connaître le prix que vous allez payer et ce que vous gagnez en retour.

Etrangement, lorsqu'il s'agit des traités climatiques, nos politiciens aiment à s'engager dans des politiques extrêmement coûteuses sans vouloir admettre qu'elles ont un prix.

En écoutant les discours comme je le fais ici Paris, vous entendrez une multitude d'exhortations pour l'action, beaucoup de débats sur les dangers du changement climatique, et des discussions sur la responsabilité morale ainsi que sur les futures générations. Mais pratiquement rien sur ce que ces réductions d'émission de carbone nous coûteront.

 Aucune estimation officielle

Hier, j'ai abordé les impacts de l'accord qui va probablement être établi ces jours-ci à Paris. Dans le meilleur des cas, un scénario exagérément optimiste, il ne réduira la température globale moyenne de la planète que de 0.17°C en 2100.

Aujourd'hui, je vous invite à vous pencher sur ce que la réduction de la hausse de température globale de la planète va nous coûter.

Il est extraordinaire que les représentants de l'ONU n'aient fourni aucune estimation officielle des coûts du traité qui va probablement ressortir de ce sommet de Paris. Cela nous amène à faire nous-même un décompte non-officiel, chose qui peut s'effectuer facilement en additionnant les coûts des promesses climatiques formulées par les États-Unis, l'Union Européenne, le Mexique et la Chine, qui forment au total 80% des promesses de réduction des émissions sur la planète.

Aux Etats-Unis, 145 à 162 milliards d'euros de PIB en moins chaque année

Ici, je tiens à préciser qu'aucune estimation officielle des coûts n'a été réalisée même au niveau national. Le Président Obama s'est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) des États-Unis de 26 à 28% par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2025. En nous référant aux données des études - approuvées par un comité de lecture - de l'Energy Modeling Forum de Stanford, nous découvrons que la réalisation de cet objectif se traduira par une réduction annuelle du PIB du pays à hauteur de 145 à 162 milliards d'euros.

L'Union Européenne a annoncé un objectif de réduction de 40% par rapport aux niveaux de1990 d'ici 2030. Encore une fois ici, nous ne disposons d'aucune estimation officielle. Et encore une fois, nous allons nous tourner vers les analyses de l'Energy Modeling Forum de Stanford qui suggèrent que pour atteindre cet objectif, l'UE diminuera son PIB de 1.6% en 2030, soit 287 milliards d'euros - valeur en 2010.

4,5% de PIB en moins au Mexique

Il est également important de mettre en avant les analyses des promesses du Mexique dans la mesure où ce pays a mis en place la législation climatique la plus rigoureuse des pays en voie de développement. Le Mexique s'est engagé à une réduction conditionnelle de ses émissions de 40% d'ici 2030 par rapport à un scénario au fil de l'eau. Les estimations de coût effectuées par le gouvernement mexicain sont 14 à 79 fois inférieures à celles des publications appuyées par l'agence américaine de protection de l'environnement (US EPA) et par l'UE. Selon ces publications, le coût de cet objectif équivaudrait à 4.5% du PIB annuel du pays en 2030, soit 70 milliards d'euros par an. En 2050, le Mexique va perdre environ un milliard de dollars par an à cause de ses engagements climatiques.

Pour finir, la Chine a promis de réduire ses émissions de carbone par unité de PIB d'au moins 60% par rapport aux niveaux de 2005 d'ici 2030. Selon les résultats de l'analyse effectuée par l'Asia Modeling Exercise, cet objectif coûtera au pays 188 milliards d'euros par an.

Au total, la réalisation des engagements climatiques de l'UE, du Mexique, des États-Unis et de la Chine va amputer l'économie mondiale d'au moins 686 milliards d'euros par an d'ici 2030 - et cela dans un scénario idéal où les politiciens réduisent les émissions de façon constante en utilisant les moyens les plus pertinents et les plus efficaces.

Le gaspillage, encore et toujours

Mais cela n'arrivera pas. Cela ne s'est jamais passé dans l'histoire. Les politiciens ont l'habitude de gaspiller de l'argent dans le subventionnement du solaire et des biomasses, qui s'est révélé être extraordinairement inefficient. L'expérience de l'Union Européenne nous montre qu'un tel gaspillage peut doubler les coûts des politiques de réduction d'émission de carbone.

Outre cela, il faut aussi compter avec les 122 autres pays qui ont également annoncé leurs engagements pour la COP21. Ce qui augmente d'un quart la totalité des promesses de réduction. En substance, les réductions d'émission promises à Paris vont amputer l'économie mondiale de 1000 milliards de dollars par an pour le reste de ce siècle - et cela, si les politiciens mettent tout œuvre pour mener à bien les choses. Autrement, le coût réel sera deux fois supérieur.

Il n'est pas étonnant que les politiciens présents ici à Paris restent silencieux sur le prix de leurs promesses.

Traduit par Ninah Rahobisoa