Pas d’économie de guerre sans numérique !

Par Laurent Giovachini  |   |  704  mots
« Les systèmes d'information doivent bénéficier des ressources nécessaires à leur réalisation dans le cadre de la future Loi de programmation militaire. C'est à ce prix que nos armées pourront demain remplir les missions qui leur seront assignées pour défendre notre pays » (Laurent Giovachini, directeur général adjoint de Sopra Steria) (Crédits : Syntec)
Le numérique est aujourd'hui omniprésent et irremplaçable dans les armées. C'est pour cela que les systèmes d'information doivent bénéficier des ressources nécessaires à leur réalisation dans le cadre de la future Loi de programmation militaire. Par Laurent Giovachini, directeur général adjoint de Sopra Steria.

Depuis la chute du mur de Berlin, l'armée française est bâtie sur un modèle de corps expéditionnaire. Ce modèle, cohérent et complet en termes de capacités militaire, nous a permis de nous assurer la supériorité technologique sur les théâtres d'opération extérieure où notre pays a été amené à intervenir seul ou en coalition. Plus qualitatif que quantitatif, il n'est toutefois pas conçu pour faire face à une puissance majeure qui nous imposerait de participer sur notre continent à un conflit de haute intensité et de longue durée.

L'agression russe en Ukraine nous oblige à repenser dans l'urgence ce modèle, dans le cadre de ce qu'il est convenu d'appeler « l'économie de guerre ». Il s'agit non seulement de remplacer les équipements fournis à l'armée ukrainienne, mais plus globalement de se réinterroger sur le nombre de systèmes d'armes nécessaires (chars de combat, systèmes d'artillerie, drones, avions de combat, hélicoptères, dispositifs de défense antiaérienne, bâtiments de surface, sous-marins, etc.) ainsi que sur les stocks de missiles et de munitions dont nous devons disposer.

Un apport irremplaçable

Pour utiles qu'ils soient, les efforts visant à « redonner de l'épaisseur » à nos armées ne seront toutefois pas suffisants s'ils ne s'accompagnent pas d'un saut quantitatif et qualitatif dans le domaine des systèmes d'information. Véritable « multiplicateur de forces », le numérique a en effet un rôle majeur à jouer au service de l'économie de guerre. Dans les domaines du renseignement, du commandement et de la conduite des opérations, de la lutte antiaérienne et anti-drone, de la maintenance des matériels et de la logistique, du soutien des combattants et bien sûr de la cyberdéfense, son apport est irremplaçable.

Le ministère des Armées l'a bien compris, qui s'est doté d'une Agence du Numérique de Défense (AND) chargée de représenter les « intérêts numériques » de toutes les parties prenantes en son sein (état-major des armées et états-majors d'armée, direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information, direction générale de l'armement, secrétariat général pour l'administration, etc.). C'est ainsi qu'il revient désormais à l'AND d'assurer la maîtrise d'ouvrage des programmes de systèmes d'information dont la réalisation est confiée au secteur privé.

Les industriels en ordre de bataille

Si l'État s'est réorganisé pour « passer à la vitesse supérieure » dans le domaine du numérique, l'industrie n'est pas en reste. Rassemblés au sein du groupement Licorn, les acteurs français du numérique sont désormais en ordre de bataille. Les maîtres de d'œuvre de Licorn, Sopra Steria et Thales, coopèrent avec leurs partenaires Airbus, Cap Gemini et Atos, ainsi qu'avec le tissu français des ETI, PME et startups du numérique, pour apporter aux armées le meilleur de leurs expertises et savoir-faire.

Dès aujourd'hui, ce sont plusieurs centaines d'architectes, de chefs de projet et de développeurs qui travaillent quotidiennement dans le cadre de Licorn et ce chiffre est amené à augmenter significativement dans les années à venir.

Future LPM : le numérique ne doit pas être oublié

L'ambitieux programme de Système d'Information des Armées (SIA), qui vise notamment à remplacer et à unifier les systèmes de commandement en service dans chacune des trois armées et au niveau interarmées, est emblématique de ce nouveau mode de travail entre la jeune AND et une industrie du numérique pleinement mobilisée dans le cadre de l'économie de guerre.

Parce qu'ils représentent un irremplaçable facteur de supériorité opérationnelle, parce qu'ils constituent une composante indispensable à la remontée en puissance de notre appareil militaire, parce que l'écosystème public-privé du numérique de Défense est désormais en ordre de marche, les systèmes d'information doivent bénéficier des ressources nécessaires à leur réalisation dans le cadre de la future Loi de programmation militaire. C'est à ce prix que nos armées pourront demain remplir les missions qui leur seront assignées pour défendre notre pays.