Atos : les négociations pour la cession de Tech Foundations à Daniel Kretinsky ont échoué

Par latribune.fr  |   |  915  mots
(Crédits : STEPHANE MAHE)
Atos a annoncé ce mercredi dans un communiqué l'échec des négociations avec le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky concernant Tech Foundations. Les deux parties ont en effet mis un terme aux discussions officialisées à l'été 2023 par « consentement mutuel » d'après le directeur général de l'entreprise française.

[Article publié le mercredi 28 février 2024 à 08h34 et mis à jour à 15h53] Le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, via sa société EPEI, ne rachètera pas Tech Foundations. Atos a annoncé l'information ce mercredi dans un communiqué présentant quelques-uns des résultats annuels de l'entreprise, marqués par un flux de trésorerie disponible pour l'année négatif de plus d'un milliard d'euros.

« Nous suivons étroitement les négociations avec les financeurs du groupe », a indiqué la secrétaire d'État chargée du Numérique, interrogée à l'Assemblée nationale ce mercredi. Marina Ferrari a répété que la situation d'Atos était « étroitement surveillée » par le gouvernement.

Dans le détail, les deux parties ont mis fin aux discussions officialisées à l'été 2023 par « consentement mutuel », a précisé Paul Saleh, directeur général d'Atos, lors d'une prise de parole ce mercredi. Le projet de vente à Airbus des activités Big Data & Security (BDS), dévoilé début janvier, est, quant à lui, toujours en cours, les deux parties ayant entamé une phase de due diligence (consultation des comptes, ndlr).

« Les parties ne sont pas parvenues à un accord mutuel satisfaisant. Il a par conséquent été mis fin d'un commun accord aux discussions ainsi qu'à l'option de vente, sans aucune indemnisation de part et d'autre (...). Atos continuera de gérer Tech Foundations et Eviden comme deux activités séparées avec une stratégie commerciale coordonnée », a indiqué Atos dans un communiqué.

Ce n'est cependant « pas une énorme surprise », a commenté auprès de l'AFP Lionel Melka, associé gérant de la société de conseil pour les affaires Swann Capital. L'abandon de ce projet de cession, officialisé en août 2023, faisait depuis plusieurs semaines l'objet de nombreuses rumeurs.

« Ce n'est peut-être pas une mauvaise nouvelle », a-t-il même ajouté au sujet de la fin des discussions avec Daniel Kretinsky, « très mal vues par beaucoup d'actionnaires ».

La partie Tech Foundations reste donc en vente, a précisé une source proche du dossier à l'AFP. Cette entité, qui regroupe les activités historiques d'infogérance de l'entreprise, est issue de la scission réalisée à l'été 2022.

Cet abandon pourrait, en revanche, provoquer la mise en marche d'autres projets de cession. En octobre, Atos avait indiqué que « si l'opération avec EPEI n'[avait] pas lieu, le groupe devra[it] accéder aux marchés de capitaux (dettes et actions) et/ou envisager la vente d'actifs supplémentaires, afin d'assurer une liquidité adéquate pour faire face aux échéances de la dette en 2025 ».

Marge opérationnelle de plus de 4%

En pleine déroute financière, Atos, qui devait publier jeudi ses résultats annuels 2023, a reporté cette publication au 20 mars, en attente de la remise d'un rapport indépendant relatif aux comptes de l'entreprise. L'entreprise française a néanmoins indiqué avoir réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires de 10,683 millions d'euros, en légère hausse de 0,4%, avec une baisse de 1,7% pour Tech Foundations et une hausse de 2,9% pour Eviden. Le tout pour une marge opérationnelle de 4,4%.

L'avenir de l'entreprise reste flou depuis plusieurs mois : le projet de restructuration patine et que le niveau d'endettement affole les investisseurs, avec 3,65 milliards d'euros d'emprunts et obligations à rembourser ou refinancer d'ici fin 2025. Début février, Atos, qui emploie quelque 110.000 salariés dans le monde, a même renoncé à une augmentation de capital à hauteur de 700 millions d'euros et nommé une mandataire pour négocier avec ses créanciers. L'action d'Atos, dévaluée de plus de 70% depuis le début d'année, a atteint de nouveaux records à la baisse. En clôture lundi, elle ne valait que 2,25 euros.

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« Ce qui va être scruté dans les résultats, c'est la partie liquidités, c'est-à-dire combien il y a d'argent dans les caisses, combien il y a de dettes, quelles sont les échéances », pointait la veille Lionel Melka, associé gérant de la société de conseil pour les affaires Swann Capital.

« Atos n'est pas loin du défaut de paiement », soulignait-il.

Inquiétude des pouvoirs publics

Les difficultés économiques et les incertitudes sur l'avenir de la société suscitent aussi l'inquiétude des pouvoirs publics. Atos, qui possède des supercalculateurs - notamment utilisés dans le secteur de la défense et le nucléaire - renferme des « enjeux sociaux et de souveraineté technologique », souligne Lionel Melka.

Interrogée au Sénat mi-février, la nouvelle secrétaire d'État chargée du Numérique, Marina Ferrari, a martelé « la pleine et entière mobilisation de l'intégralité des membres du gouvernement » sur un dossier « crucial ». Quelques jours plus tôt, Bruno Le Maire avait assuré aux Echos que l'État utiliserait « tous les moyens à sa disposition pour préserver les activités stratégiques d'Atos ». Une mission d'information sénatoriale s'est également emparée du sujet et a déjà débuté avec des auditions à huis clos. Les dirigeants actuels, Jean-Pierre Mustier (président) et Paul Saleh (directeur général), seront entendus en public le 10 avril.

 (Avec AFP)