L'introduction de Facebook, déjà gros succès ou flop annoncé ?

Par Delphine Cuny  |   |  493  mots
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Des rumeurs contradictoires circulent sur le placement des actions du réseau social. L'offre serait déjà largement sursouscrite selon Reuters, la demande plus faible qu'attendu selon Bloomberg. Les perspectives de croissance du géant de l'Internet font débat.

« L'introduction record de Facebook est déjà un succès, la demande des investisseurs institutionnels dépassant le nombre d'actions disponibles » affirme l'agence Reuters vendredi au petit matin, citant « une source proche du dossier. » Le placement serait donc déjà, une semaine avant la fixation du prix définitif prévue le 17 mai, sur-souscrit. Quelques heures plus tard, l'agence rivale Bloomberg assure au contraire que la demande provenant des institutionnels s'est avérée jusqu'ici « plus faible que prévu, du fait d'inquiétudes sur les perspectives de croissance. » Il reste encore près d'une semaine aux banquiers introducteurs pour convaincre les investisseurs.

Un relèvement du prix d'envisagé ?
Bloomberg s'appuie notamment sur les résultats d'une enquête qu'elle vient de réaliser auprès de 1.50 investisseurs, analystes et traders : 79% des sondés estiment que Facebook ne mérite pas une valorisation de 96 milliards de dollars, qui correspond au plus haut de la fourchette de prix annoncée par le réseau social le 3 mai, soit entre 28 et 35 dollars. Seuls 7% des sondés considèrent que la société est correctement valorisée. Facebook aurait lui-même prévenu des analystes qu'il n'atteindrait peut-être pas leurs projections trop optimistes de ventes, affirme l'agence Bloomberg. Vendredi après-midi, CNBC a rejoint le camp de Reuters : depuis son compte officiel sur Twitter, la chaîne de télévision a publié un « exclusif » selon lequel « l'IPO de Facebook serait de nombreuses fois sursouscrites » et que le réseau social « pourrait relever la fourchette de prix la semaine prochaine. » Le livre d'ordres devrait être clos mercredi soir.

Le tassement de la croissance inquiète
L'introduction de Facebook, qui fête ses huit ans d'existence, sera la plus importante jamais réalisée par une entreprise Internet, tant en montants levés qu'en valorisation, loin devant celle de Google en 2004 (un peu moins de 2 milliards levés et 23 milliards de capitalisation à l'entrée en Bourse). Le moteur de recherche pèse actuellement 199 milliards de dollars, pour un chiffre d'affaires dix fois supérieur à celui de Facebook. Or le prix en haut de fourchette reflète un multiple de 20 fois les ventes, contre 5 fois pour Google et Apple. En outre, la croissance de Facebook se tasse : elle s'est élevée à 44,7% au premier trimestre mais en termes séquentiels, par rapport au quatrième trimestre 2011, le chiffre d'affaires de 1,05 milliard de dollars a en fait reculé de 6,5%, ce qui s'explique en partie par la saisonnalité ; la marge opérationnelle a aussi décliné (de 53% à 36% en un an). De quoi faire tiquer Wall Street, qui attend des chiffres explosifs pour justifier une valorisation aussi ambitieuse. Pour autant, Facebook apparaît comme la valeur incontournable pour un investisseur voulant jouer les réseaux sociaux. Et LinkedIn, son équivalent, en plus petit, pour les professionnels, est lui-même très généreusement valorisé : 89 fois ses bénéfices de l'an prochain, contre 30 à 40 fois pour Facebook en haut de fourchette.