Pigeons : le gouvernement recule pour éteindre le feu

Par Sandrine Cassini  |   |  667  mots
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Pierre Moscovici a annoncé trois mesures en faveur des entrepreneurs et des fonds de capital risque, mécontents des augmentations de taxe sur les plus values de cession. Une façon de mettre fin à la polémique qui l'oppose depuis plusieurs jours à l'entreprenariat français.

Sur le fond, le gouvernement ne recule pas. C'est le préambule qu'a tenu à faire Pierre Moscovici en présentant les aménagements qui seraient fait sur le projet de loi de finances 2013 (PLF), qui a suscité un vent de colère chez les entrepreneurs et dans le monde du capital risque. «Il est hors de question de remettre en cause ce principe de justice. Beaucoup de chiffres ont été donnés, sans qu'ils soient toujours exacts», a indiqué le ministre de l'Economie et des finances, avant d'en venir à l'objet de préoccupations des entrepreneurs.

«Il y a eu une émotion sur les plus-values de cession des entreprises. C'est la rémunération du travail, des efforts. Le risque doit être récompensé. On souhaite taxer la rente, pas le risque. La politique du gouvernement a toujours été d'appuyer le développement des PME», a assuré le ministre, en sortant d'une table ronde où étaient présents à la fois des investisseurs comme Marc Simoncini, Geoffroy Roux de Bézieux ou France Digitale, mais aussi des fédérations professionnelles comme le Syntec numérique (SSII, éditeurs de logiciels et start-ups) et l'Afdel (éditeurs de logiciels), sans oublier des organisations allant au delà du numérique comme Croissance Plus ou la Confédération Générale des PME.

Trois types d'évolution

Tous ont eu gain de cause: le dispositif de taxation des valeurs mobilières, qui doit être aligné sur celui du travail, subira des aménagements par rapport à la version initiale. «Il y aura trois natures d'évolution», a indiqué Pierre Moscovici. Tout d'abord, il y aura une amélioration du système d'exonération des entrepreneurs qui réinvestissent les plus-values de cession dans des nouvelles activités. L'exonération sera calculée à la hauteur de son investissement, «soit 100% s'il réinvestit la totalité», a précisé le ministre. Autre aménagement: s'il ne réinvestit pas sa participation, l'entrepreneur qui cède ses parts sera taxé au niveau actuel, soit 19% sur les plus-values (hors CSG-CRDS). Reste maintenant à donner une définition exacte de la notion l'entrepreneur.

Enfin, les fonds d'investissements n'ont pas été oubliés, puisque «le carried interest» - ces bonus spécifiques que touchent les managers des fonds lorsqu'ils cèdent une entreprise à des conditions particulières (calculés en fonction de la vitesse de sortie et du niveau de la culbute), fera aussi l'objet d'une modification. Mais dans un cadre plus général, et lors du Projet de loi de finance sur la sécurité sociale (PLFSS). Karine Berger a ainsi été mandatée pour mener une mission plus générale sur le capital risque.

A l'origine, la polémique n'a pas été lancée par des entrepreneurs mais par le représentant du fonds ISAI, Jean-David Chamboredon, qui a signé une tribune sur les start-ups publiée sur notre site. Il a notamment été suivi par Marc Simoncini, devenu lui aussi investisseur. Effectivement, le PLFSS, qui modifie substantiellement les prélèvements sur le secteur financier, a jeté un vent de panique dans le milieu du capital investissement. L'Association Française des Investisseurs pour la Croissance (AFIC) s'est alarmée des conséquences des réformes: «Il s'agirait donc de taxer le carried interest au taux marginal de 95%!», a-t-elle indiqué dans une note. Selon nos informations, elle a ainsi demandé au gouvernement à ce que ces rémunérations, actuellement exclues de l'assiette des cotisations sociales, ne soient pas considérées comme des revenus du travail mais du capital.

Le gouvernement espère que ces décisions éteindront une polémique qu'il n'a pas réussi à anticiper. Signe de retombée du mouvement, les Pigeons ont annulé la manifestation prévue dimanche devant l'Assemblée nationale. Présente au côté de Pierre Moscovici, la ministre déléguée au numérique Fleur Pellerin n'a pu s'empêcher une pique contre les Pigeons : «Le traitement médiatique du mouvement était disproportionné par rapport à sa sincérité».