Coronavirus : Internet infesté par les arnaques et les fake news

Par Sylvain Rolland  |   |  945  mots
Certains vendeurs tiers sur Amazon profitent de la paranoïa pour vendre des produits bien au-delà de leur prix habituel. (Crédits : DR)
Publicités frauduleuses pour des remèdes miracles, masques et gels désinfectants vendus à des prix exorbitants sur les marketplaces, fake news et théories du complot… La peur du virus Covid-19 entraîne une épidémie d’arnaques sur la Toile. Facebook, Twitter, Amazon, Le Bon Coin ou encore Google tentent -sans grand succès- d’endiguer le phénomène.

156 euros le bidon de 5L d'un gel désinfectant qui coûte d'ordinaire une trentaine d'euros. 370 euros le sachet de 10 masques de protection jetables, soit 37 euros le masque, alors que le prix « normal » se situe plutôt autour de 5 euros l'unité. Sur la marketplace d'Amazon, certains vendeurs n'hésitent pas à profiter de l'épidémie de coronavirus pour proposer des produits à des prix indécents, comptant sur la crédulité d'acheteurs paniqués.

[Exemple d'une arnaque -probablement ironique ?- sur Le Bon Coin]

Vaccins miracles et masques de protection soi-disant 100% efficaces

Le même opportunisme s'étale sur la plupart des marketplaces, à commencer par Le Bon Coin et Facebook. Contrairement à Amazon, ces plateformes sont ouvertes aux particuliers. On y trouve donc encore plus de « perles », comme ce masque « 100% fait main » composé en réalité d'un simple mouchoir en papier relié à des élastiques par des trombones et vendu 250 euros, ou cet internaute de Besançon qui demande 100 euros pour quelques tiges de forsythia « idéales pour l'extraction d'une huile essentielle appropriée contre le coronavirus ».

Certaines de ces arnaques sont même amplifiées par des publicités frauduleuses. Sur Facebook, Twitter ou Instagram, les annonces ventant des remèdes miracles qui n'existent pas, comme des « vaccins anti-coronavirus » ou des masques « efficaces à 100% », pullulent. Face au phénomène, le réseau social a enfin réagi fin février, en chassant toute publicité « qui fait référence au coronavirus pour créer une panique ou laisser entendre que ses produits constituent un remède ou empêchent les contaminations ». De son côté, d'après le magazine Wired, Amazon s'est lancé dans une grande opération de nettoyage pour supprimer les articles au marketing mensonger et vendus trop cher. Pas très efficace, comme en témoigne une simple recherche sur la plateforme :

[Sur Amazon, des vendeurs tiers proposent des masques de protection aux prix exorbitants]

Epidémie de fake news

L'autre gros problème auquel sont confrontées les plateformes sur Internet est l'épidémie de fake news autour du Covid-19. Sur Facebook particulièrement, les théories du complot et autre fausses nouvelles sur l'origine du virus, sa prolifération en France et dans le monde, et les remèdes pour s'en prémunir et le guérir, sont devenues très virales.

Depuis fin janvier, les plateformes font leur maximum pour repérer et supprimer ces fausses nouvelles le plus vite possible. Facebook, par exemple, affiche dans le fil d'actualité un message incitant les utilisateurs à s'informer via des sources officielles comme l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ou le gouvernement. Lorsque des acteurs officiels signalent des fake news, Facebook mobilise son armée de modérateurs et de fact-checkeurs pour supprimer la publication concernée et promouvoir l'information vérifiée.

"En moyenne, cela permet de réduire la distribution de ces fausses informations d'environ 80%, précise le réseau social. Nous envoyons également des notifications aux utilisateurs qui ont déjà partagé ou tentent de partager ce contenu pour les avertir qu'il a fait l'objet d'un fact-checking par l'un de nos partenaires."

En réalité, la lutte de Facebook montre très vite ses limites. De nouveaux faux contenus sont sans cesse créés et partagés, illustrant toute la difficulté des plateformes pour réagir efficacement face à la viralité des fake news sur des sujets qui font la une de l'actualité. La Tribune a mené sa propre expérience. En tapant le mot-clé "coronavirus" dans la barre de recherche de Facebook, nous tombons effectivement sur des groupes qui promeuvent une information vérifiée. Mais ce n'est pas une barrière efficace contre les fake news. Sur la page Coronavirus France, un groupe public qui vise à regrouper l'information sur le virus et qui se targue de supprimer toute publication mensongère, les théories du complot vont pourtant bon train. "La Chine a menti, c'est 250.000 morts déjà. Ils brûlent 1.200 personnes par jour dans 49 crématorium d'urgence", commente l'internaute Clément D sous un article d'une source vérifiée. Et de joindre le lien vers la "preuve", une vidéo publiée par le groupe "Réveillez-vous - Le pouvoir au peuple", qui reprend elle-même un contenu créé par un obscur site américain pro-Trump. Facebook a supprimé le lien, mais l'internaute a réagi en incitant ceux qui veulent accéder à la vidéo à aller sur son profil, qui mène à la page conspirationniste. En trois clics, l'utilisateur peut donc passer d'un article sérieux à une fake news et à sa constellation de contenus du même type.

Gare aux arnaques par e-mail !

En plus des fausses nouvelles qui entretiennent la paranoïa, les internautes peuvent aussi être confrontés au phishing, ou hameçonnage, cette pratique malveillante qui consiste à récupérer les données personnelles en infectant un ordinateur via une pièce jointe contenant un virus.

En se faisant passer pour de fausses agences de santé gouvernementales, des hackers envoient des courriels qui affirment dans leur objet contenir des informations capitales sur la propagation du covid-19. Certains internautes inquiets, particuliers ou entreprises, cliquent sur les pièces jointes et infectent ainsi leur ordinateur. D'après les experts en cybersécurité de l'entreprise IBM, cette pratique a surtout été observée au Japon, où un virus dissimulé dans une pièce jointe permettait de voler des données privées et bancaires en ligne.