L'entrée de Canal Plus dans la TNT provoque un séisme dans le PAF

Par Jamal Henni  |   |  515  mots
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TF1 et M6 ont lourdement chuté en Bourse après l'annonce du rachat des chaînes Direct 8 et Direct Star de Bolloré par la filiale de Vivendi.

La nouvelle du rachat des chaînes TNT de Bolloré par Canal Plus a gâché la fête de TMC. La nouvelle est tombée jeudi soir alors que la filiale de TF1 présentait ses programmes. Et l'humeur des cadres de la Une est subitement devenue morose. Vendredi, l'action a été massacrée en Bourse (- 7,2%), comme celle de M6 (- 6,5%). "Ce rachat est une menace claire pour TF1 et M6", qui vont devoir désormais affronter la concurrence de Canal Plus dans la TV gratuite, estime Exane BNP Paribas.

Les analystes financiers s'inquiètent notamment pour M6, qui ne possède que deux chaînes sur la TNT gratuite. "Les rares opportunités d'acquisition - notamment la cession de Virgin 17 (Direct Star) à Bolloréeacute; en 2010 - n'ont pas été saisies par M6, qui se retrouve en position de dernier consolidateur", pointe le Crédit Mutuel-CIC, qui considère la chaînecomme "l'acquéreur naturel" de NRJ 12 et BFM TV.

De son côté, Bolloréeacute; a gagné 3,4% vendredi. Pour le CM-CIC, l'industriel breton réalise "une excellente opération : il sécurise la valeur de son investissement dans la télévision, au moment où s'aggravent les incertitudes sur le marché publicitaire et l'attribution éventuelle de nouvelles chaînes TNT". Enfin, il est payé en actions Vivendi (maison-mère de Canal Plus), plutôt sous valorisé actuellement. La question est maintenant de savoir si Vincent Bolloréeacute;, avec ses 1,3% du capital de Vivendi, compte y jouer un rôle. Interrogé sur sa volonté de demander un poste d'administrateur, son fils Yannick est peu disert : "il n'y pas eu de discussions sur ce point à ce jour".

Un plan imparable

Concernant Vivendi, la nouvelle a été accueillie par un cours quasi étal (- 0,25%). La pertinence du rachat est saluée, mais Exane déplore le prix "très élevé", qui rend difficile un bon retour sur investissement. De plus, ce rachat "met en lumière le manque de croissance : Vivendi dépense un demi-milliard d'euros pour gagner un petit peu de croissance : 0,5% à 1% par an pour Canal Plus".

Mais ce rachat fait une autre victime collatérale : il met fin au débat autour des chaînes bonus - qui devaient être attribuées aux opérateurs historique en compensation de l'extinction de leur fréquence analogique - chaînes qui sont dans le collimateur de Bruxelles et seront probablement retoquées. En effet, si TF1, M6 et les pouvoirs publics voulaient renvoyer les chaînes bonus aux calendes grecques, c'était avant tout pour empêcher Canal Plus d'utiliser la sienne pour se lancer dans la TV gratuite. Ils en auraient bien besoin aujourd'hui... En rachetant deux fréquences, la chaîne cryptée a trouvé un plan B imparable.

Certes, ce rachat devra obtenir le feu vert du CSA et de l'Autorité de la concurrence, qui n'apprécient guère Canal. Mais les deux gendarmes n'ont aucun motif solide pour le bloquer. Ils devront donc le bénir, sans doute en imposant quelques conditions à la chaîne cryptée concernant l'acquisition de droits.