Participer à Pékin Express n'est pas un travail

Par Sandrine Cassini  |   |  551  mots
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Le conseil des prud'hommes de Nanterre a débouté vendredi 22 participants à trois émissions de télé-réalité, Pékin Express, les Colocataires, The Bachelor. Une décision qui va à l'inverse de jugements rendus dans l'Ile de la Tentation et Koh Lanta.

Participer à l?Ile de la Tentation ou à Koh Lanta sur TF1 est considéré comme un travail à part entière. Se montrer dans les Colocataires, The Bachelor, ou Pékin Express, trois émissions de M6 est simplement un jeu. Telle est la drôle de situation de la télé-réalité aujourd?hui. Vendredi, le conseil des prud?hommes de Nanterre a débouté 22 participants qui réclamaient face à studio 89 (M6) la re-qualification de leur participation à ces trois émissions en contrat de travail.

Cette décision prend le contre-pied de l?arrêt rendu en juin 2009 par la cour de cassation. Cet arrêt stipulait que participer à l?Ile de la Tentation, une émission où des couples non mariés sur une île isolée mettaient à l?épreuve leur fidélité, relevait d?une activité professionnelle. Il a depuis servi de jurisprudence dans des dizaines d?affaires, impliquant d?autres émissions de télé réalité. En décembre dernier, 13 participants à Koh Lanta, à Mister France ou Greg Le Millionnaire ont eu gain de cause devant la cour d?appel de Versailles, qui a condamné la société de production à verser entre 13.000 et 18.000 euros de dommages et intérêts aux candidats.

Mais qu?est-ce qui différencie Pékin Express par exemple de Koh Lanta, deux jeux d?aventure? Pour le moment, le Conseil des Prud'hommes de Nanterre n?a pas rendu les motifs écrits de sa décision. Il le fera dans un mois. Dans les autres affaires, les tribunaux se sont appuyés sur les conditions du déroulement de l?émission et les engagements pris par les candidats. Ainsi, pour qu?il y ait un contrat de travail, il faut réunir trois conditions -l?existence d'un travail, d?une rémunération et d?un lien de subordination.

Le 12 février dernier, la cour d?appel de Montpellier a donné raison à une candidate, qui avait participé à Koh Lanta. Dans la mesure où le participant s?est engagé à «être disponible toute la durée du tournage, à répondre aux interviews, et participer loyalement aux différents jeux», s?il accepte expressément d'être filmé à tout moment, et dispos quotidiennement de phases de répit», il a travaillé. Enfin, même s?il n?y a pas eu de rémunération, les prises en charge et autres dédommagements prévus par la production (aller/retour, frais de visa , organisation matérielle de l'absence, versement d'une somme de 100.000 ? au vainqueur...) ont fait office de salaire.

Dans le cas de M6 et de Pékin Express, l?avocat Laurent Carrié, du cabinet Deprez Guignot Associés, a tenté de démontrer devant les Prudhommes que les participants de l?émission étaient libres de faire ce qu?ils voulaient, que la production ne donnait aucune directive, et et que l?émission était proche de la course d?orientation, comme feu la Chasse au Trésor. Pourtant, dans Pékin Express, des gains importants sont proposés aux vainqueurs.

Les participants aux émissions de M6 ont encore la possibilité de faire appel. Ils sont défendus par Jérémie Assous, l?avocat à l?origine de l?arrêt de la cour de cassation, qui a fait depuis 2005 de la télé-réalité son principal fond de commerce.