Le rachat de crédits est-il vraiment une solution miracle ?

Par Laura Fort  |   |  964  mots
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La loi Lagarde sur le crédit à la consommation devrait générer davantage de rachats de crédits à l'avenir. Le recours à une telle opération doit néanmoins s'accompagner d'une grande prudence.

On l?appelle rachat ou regroupement de crédits, ou encore restructuration de dettes. Il conduit à regrouper l?ensemble de ses prêts en un seul crédit sur une durée plus longue, pour obtenir  une mensualité de remboursement plus faible. Cette pratique permet de pallier un manque ou une réduction provisoire de revenus (suite à des événements type divorce, perte d?un emploi....) pour se donner un peu d?air. Le nombre de cas de retraités ayant recours à cette solution augmente également en raison de la baisse des revenus lors de l'abandon de la vie active.

Vigilance de mise

Ce phénomène a pris de l'ampleur : la production de rachat de crédits s?élèvait à 17 milliards d?euros à fin 2011, dont 9 milliards d?euros pour le rachat de crédits immobiliers et 8 milliards d?euros pour les crédits à la consommation, selon une étude du cabinet Jasmin. Il y a tout juste un an, la loi Lagarde portant réforme du crédit à la consommation a réglementé les activités de rachat de crédits. Elle permet aux emprunteurs d?avoir une meilleure visibilité sur le coût global de leurs crédits, avant et après une opération de regroupement. Et en cas de rachat de crédit renouvelable, l?emprunteur doit se voir proposer de clôturer ce crédit. La grande majorité de ces rachats sont effectués par les banques, mais aussi par les acteurs financiers spécialisés (via les courtiers) et les établissements spécialisés dans le crédit à la consommation. Sachant que la durée maximum pour un rachat de crédits à la consommation est de 12 ans et de 30 ans pour le crédit immobilier.
La plus grande vigilance est de mise lors d?une telle opération : il faut notamment bien avoir conscience de l?allongement de la durée du prêt qu?elle implique.

Le total des intérêts augmente

Dans une note de décembre 2011, la Fédération Bancaire Française indiquait : "Utilisez avec prudence le regroupement de crédits car le montant total à rembourser sera au final souvent plus élevé. Par ailleurs, il doit s?accompagner d?un rééquilibrage plus en profondeur de votre budget. "Effectivement, le fait de constituer une nouvelle opération de crédit peut engendrer des frais de dossiers, d?assurance, ou de pénalités de remboursement.
En juin 2008, la FBF réalisait une étude titrée "Le regroupement de crédits, la solution ?". Elle y remarquait qu' "en remplaçant par exemple 3 crédits en cours, ayant des échéances entre 1 et 3 ans, par un seul crédit à 5 ans, le montant des mensualités peut se trouver d?un seul coup réduit. [?] Ainsi, votre taux d?endettement, c?est-à-dire le total de vos charges financières comparé à vos ressources, sera moins important."
Et la FBF mettait déjà en garde : "Pour autant, ce n?est pas une solution miracle. Votre dette globale sera mieux étalée, mais restera la même en valeur. De plus, l?allongement d?un crédit augmente le total des intérêts et donc le coût du crédit."

Pratique interdite aux surendettés

Le recours à un rachat de crédit est interdit pour une personne identifiée comme surendettée. Eric Ghiringhelli, directeur des crédits spéciaux chez Meilleurtaux.com, ajoute que le seul risque d?une opération de regroupement de crédits, "c?est si le client ne respecte pas ses engagements, car c?est la dernière étape avant un contentieux". Nadia D., acheteuse, est quant à elle passée par le courtier Cafpi pour regrouper ses deux crédits, et a changé de banque pour l?occasion. Elle témoigne que ce regroupement a été positif : "Après avoir racheté les crédits et remis un peu d?argent au pot, j?ai pu renégocier de très bonnes conditions de crédit, par exemple en termes de baisse du taux d?intérêt ou des pénalités de rachat. Au final, en coût global, je suis très gagnante".
Meilleurtaux confirme que le résultat peut être assez spectaculaire. Le courtier donne l?exemple d'un couple de retraités, propriétaires, dont les revenus passent de 2 850 euros à 2 115 euros lors du passage à la retraite. Avec 4 crédits en cours et 1 324 ? à rembourser chaque mois, leur taux d'endettement est passé de 46.5% à 62,5 %. En faisant un rachat de crédits sur 84 mois, le couple rembourse 572 ? par mois et retrouve un endettement de 27 %.

Zone d?endettement limite

Par ailleurs, les banques pourraient même avoir intérêt à ne pas pousser leurs clients au rachat de crédits, parce qu?elles se priveraient alors d?une source de revenus non négligeable. Ainsi, "une personne qui a différents crédits à la consommation peut arriver dans des zones d?endettement limites et va jouer avec les autorisations de découvert. La banque se rémunère alors sur les rejets et les incidents de paiement, sur les agios et sur les frais de tenue de compte. Ce n?est généralement que lorsque la banque remarque que le découvert est en dépassement perpétuel, qu?elle va proposer un regroupement partiel des crédits. Mais le regroupement total n?est pas toujours dans son intérêt", atteste un professionnel du secteur.
Il peut aussi arriver que des demandes de rachat de crédits soient refusées si au final l'emrunteur dépasse le taux d?endettement maximum admis. Au-delà de 42% d?endettement (le taux de 33% est cependant le plus généralement admis) sur la durée maximale autorisée de 12 ans, le dossier sera systématiquement rejeté.