La BCE veut débloquer le marché interbancaire de la zone euro

Par Isabelle Croizard  |   |  477  mots
La Tribune infographie
La Banque centrale cherche de nouveaux moyens de dévérouiller le marché interbancaire de la zone euro.

À ceux qui réclament que la Banque centrale européenne augmente massivement ses achats de titres de dette publique des pays en détresse de la zone euro, il convient de répondre que l'on ne peut pas tout attendre d'elle, en voulant le beurre et l'argent du beurre. Certes, ses homologues américaine et britannique ont choisi de monétiser la dette publique. Mais outre que les traités européens interdisent à la BCE de financer directement les États, son conseil a choisi de privilégier la liquidité du secteur bancaire. Car ce qui fait la spécificité de la zone euro, c'est que les banques assurent 75 % du financement de l'économie, beaucoup plus que les institutions financières anglo-saxones, où cette arme n'est pas utilisée.

Après avoir exhumé les opérations de liquidités à un an lors du dernier conseil de gouverneurs présidé par Jean-Claude Trichet le 6 octobre, en annonçant même une opération inédite à treize mois qui se déroulera les 20 et 21 décembre, la BCE envisagerait de lancer des adjudications à deux et trois ans. L'information reste à confirmer, mais ce serait une contribution majeure au déblocage du marché monétaire à nouveau menacé de paralysie. En atteste le creusement entre le taux interbancaire de référence, à savoir l'Euribor trois mois, et le taux des swaps sur l'Eonia - le taux au jour le jour (voir graphique).

Comme on avait pu le constater au plus fort de la crise des subprimes et plus encore après la faillite de Lehman Brothers, les banques sont rentrées dans l'ère du soupçon. Elles refusent de se prêter entre elles de peur de ne pas être remboursées, du fait de leur implication supposée sur les emprunts d'État « toxiques » de la zone euro qu'elles détiennent.

Abondance de liquidités

Cette thrombose provoque un premier effet pervers : les banques se précipitent au guichet de la BCE. Mardi dernier, les établissements ont emprunté 247 milliards d'euros lors de son opération de refinancement hebdomadaire, le montant le plus élevé depuis deux ans. Autant d'argent qu'elles ne peuvent pas se procurer directement sur le marché, malgré l'abondance de liquidités mises à la disposition des banques par la BCE à des conditions très privilégiées, en quantités illimitées. Car, c'est l'autre effet pervers de la suspicion: les banques déposent et gèlent des tombereaux de cash au jour le jour auprès de la banque centrale de Francfort. Au lieu de prêter leurs fonds disponibles, elles préfèrent se contenter de la rémunération de 0,75 %, correspondant au taux des dépôts, offerte par la BCE. Actuellement près des deux tiers des fonds emprunts sont ainsi parqués auprès de la BCE contre un tiers après la chute de Lehman.