Wolfgang Schäuble en lice pour la direction de l'Eurogroupe

Par Romaric Godin  |   |  538  mots
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Berlin pourrait proposer Wolfgang Schäuble comme chef de l'Eurogroupe. Une option qui redessinerait la géographie de la puissance dans la zone euro.

La chancelière veut finalement donner à l'Allemagne la tête de l'Eurogroupe. Selon le Financial Times Deutschland de ce vendredi matin, qui cite des « sources bien informés », Angela Merkel a proposé à ses partenaires de la zone euro la candidature de Wolfgang Schäuble, son ministre des Finances. Pour le moment, cependant, Berlin refuse « de commenter des spéculations ».

Une instance de coordination.

L'Eurogroupe est la réunion des 17 chefs d'Etat et de gouvernement visant à coordonner la politique économique. Avec la crise de la dette souveraine, cette instance est devenue de plus en plus importante. Son président actuel est le premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker. Le premier ministre finlandais, Jyrki Katainen, puis son homologue italien Mario Monti avaient été successivement approchés pour prendre le poste, mais ils ont finalement décliné.

Chaises musicales

Cette nomination au sein de l'Eurogroupe ne peut être comprise que dans le jeu de chaises musicales qui a lieu en ce moment au sein de quatre institutions européennes. Jean-Claude Juncker ne souhaite pas continuer à diriger l'Eurogroupe parce qu'il veut que son compatriote Yves Mersch prenne un poste au directoire de la BCE au détriment de l'Espagne. La France, elle, viserait la direction de la Banque Européenne de Reconstruction et de Développement (BERD). A cela s'ajoute la course à la présidence du futur mécanisme européen de Stabilité (MES) qui remplacera le Fonds européen de stabilité financière le 1er juillet.

Géographie de la puissance

Comme toujours, c'est donc la géographie du pouvoir de l'Europe qui va se redessiner dans les prochains mois. Et évidemment, l'Allemagne veut jouer son vrai rôle, celle de la puissance dominante de la zone euro. Yves Mersch devrait, dans ce cas, faire entendre la voix de l'orthodoxie monétaire de la Bundesbank au sein de la BCE et, donc, Wolfgang Schäuble, pourrait venir prendre la tête de l'Eurogroupe. Ce serait une forme ouverte d'affirmation de la puissance allemande dont Angela Merkel a été jusqu'ici assez peu coutumière. Il lui faudra du reste encore convaincre Paris puisque selon la FAZ, Nicolas Sarkozy ne serait pas très « chaud » pour accorder cette place à Wolfgang Schäuble. Car si le ministre allemand des Finances est assez apprécié à Paris, la France semble attachée à limiter sur le plan formel la puissance de l'Allemagne.

Le jeu à deux bandes d'Angela Merkel

Pour Angela Merkel, cette nomination qui devrait avoir lieu avant l'élection présidentielle française permettrait de renforcer le leadership allemand sur la zone euro et d'assurer la mise en place du « pacte fiscal » qui est très contesté de ce côté-ci du Rhin et de plus en plus contesté en Europe, y compris en Allemagne par le SPD. Sur le plan intérieur, la chancelière verrait s'éloigner de la scène intérieure un rival toujours prompt à contester ses choix. Avant des élections fédérales de 2013 qui s'annoncent ouverte, ceci serait important : elle lui permettrait de se rapprocher, notamment en faisant des concessions sur le plan de la politique budgétaire, des Verts et du SPD pour construire une nouvelle coalition au centre. Une option qui ne sied guère à Wolfgang Schäuble.