Déficit des retraites de 100 milliards d'euros en 2050 : découvrez le rapport du COR

Par latribune.fr  |   |  1546  mots
D'ores et déjà disponible sur la tribune.fr, le rapport du Conseil d'orientation des retraites, qui sera publié officiellement mercredi, situerait le déficit du système français en 2050 dans une fourchette de 72 à 115 milliards d'euros. Lundi, la première journée de rencontres entre gouvernement et partenaires sociaux sur la future réforme s'est traduite par de vives tensions.

Le besoin de financement annuel du système de retraite à l'horizon 2050 varierait dans une fourchette de 72 à 115 milliards d'euros, en fonction des hypothèses économiques, selon un document de travail du Conseil d'orientation des retraites (COR), cité ce mardi par l'AFP (Agence France Presse) . Le document est d'ors et déjà disponible (ici), mais sa présentation officielle n'est prévue que demain mercredi.

A l'horizon moins lointain de 2020, le COR évalue le besoin de financement du système de retraite entre 40 et 49 milliards d'euros. Le conseil propose par ailleurs trois scénarios en partant du principe que la durée de cotisation pour avoir une retraite à taux plein atteindra 41,5 ans en 2020, en application de la réforme de 2003.

Le scénario le plus optimiste repose sur un taux de chômage à 4,5% à partir de 2024, équivalent à celui de 1978. Quant à l'hypothèse la plus pessimiste, elle repose sur un chômage à 7% à partir de 2022, un point bas presque atteint en 2008 pour la première fois depuis environ 25 ans.

Début des rencontres bilatérales lundi

Le grand rendez-vous 2010 pour la réforme des retraites a en tout cas bel et bien démarré lundi  avec une série de rencontres entre gouvernement et partenaires sociaux. Le ministre du Travail, Eric Woerth, a rejeté en fin de journée le reproche des syndicats de proposer un calendrier trop serré. "Le calendrier n'est pas trop court", a-t-il déclaré devant la presse. "On en parle depuis des années, il faut surtout passer à l'action", a-t-il poursuivi.

Nicolas Sarkozy avait fait la promesse, en mars, d'adopter la réforme des retraites "dans les six mois". Eric Woerth a confirmé lundi que la concertation allait se poursuivre jusqu'en mai avec des réunions thématiques (pénibilité, emploi des seniors, etc...). Un "document d'options" sera ensuite sur la table du gouvernement en mai ; il sera rediscuté afin d'aboutir à un projet plus détaillé mi-juin, pour un passage au conseil des ministres début juillet. Le gouvernement espère présenter le texte en septembre au parlement.

La proposition qui fâche

Lundi, le ministre s'est dit ouvert à toutes les propositions des partenaires sociaux, sauf une. "Il y a un sujet sur lequel évidemment le gouvernement n'est pas ouvert, c'est l'augmentation des prélèvements", a-t-il dit.

Interrogé sur l'idée d'un prélèvement sur une catégorie de la population, évoquée par l'Elysée, il a répondu: "Il peut y avoir ici ou là un certain nombre de points de recettes qui peuvent être acquis, puisque tel type de profession, tel type d'assiette semblerait comme ne contribuant pas suffisamment au système de solidarité". "Mais la clé de la réforme, ce n'est pas l'augmentation générale des impôts, parce que ça, c'est la diminution générale du niveau de vie", a-t-il insisté.

Les divergences entre partenaires sociaux sont connues et se sont une fois de plus exprimées lundi. "Ce n'est pas le début de la concertation, c'est le début de la confrontation", a résumé Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de FO.

Côté syndicats

Pour Jean-Claude Mailly, les délais proposés sont évidemment trop courts. Le syndicat reproche par ailleurs au gouvernement de ne pas chercher d'autres solutions à la pérennité des régimes de retraites que l'allongement du temps de travail. Or les militants de FO sont "fermement opposés à tout allongement de la durée du travail quelle qu'en soit la forme" (allongement de la durée de cotisation et/ou report du droit au départ à 60 ans) et à toute "remise en cause" des régimes de retraite des fonctionnaires. Le syndicat plaide en revanche pour une hausse des prélèvements.

Jean-Claude Mailly a proposé le 7 avril à ses homologues syndicaux "un appel commun à 24 heures de grève interprofessionnelle, au moment opportun". Un appel qui a été raillé par le numéro de la CGT, Bernard Thibault, qui a fait remarquer que FO s'était "plutôt distinguée" récemment par son "absence" aux actions communes.

Le patron de la CFDT, François Chérèque, a également estimé le calendrier "trop court pour aller au fond des sujets", d'où le risque d'une réforme se limitant à changer les paramètres de l'âge, ce qui risque "d'accentuer les inégalités" du système. Il a ainsi réaffirmé son attachement à la retraite à 60 ans, un "élément central" pour la CFDT, mais sans fermer la porte à un nouvel allongement de la durée de cotisation pour une retraite complète.

La CGT a étalement remis en cause la méthode et le calendrier choisi. Pour  Bernard Thibault, "il est hors de question d'être mis devant le fait accompli". Bernard Thibault a "invité l'ensemble des salariés à se mobiliser le 20 avril dans les entreprises", une journée d'action intersyndicale étant prévue ce jour-là, "et surtout, surtout, à organiser un grand 1er mai". La CGT entend assurément défendre le droit légal de la retraite à 60 ans.

Côté patronal

Du côté des organisations patronales, le président de la CGPME, Jean-François Roubaud, a jugé que l'augmentation de la durée du temps de travail était la seule "chose à peu près certaine", notamment à travers une hausse de la durée de cotisation pour une pension complète. "Fixer 42 ans en 2020 paraît une mesure qui pourrait être raisonnable", a-t-il dit. Quant à l'âge légal, "il faudra sans doute aussi y toucher", a-t-il ajouté. Il s'est dit également hostile à toute "taxation supplémentaire".

La présidente du Medef, Laurence Parisot, s'est gardée de répéter ce lundi devant la presse sa demande récurrente de relèvement de l'âge légal et a dit espérer un "consensus". Dimanche, elle avait déclaré lors du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro : "nous sommes un des derniers pays européens à ne pas avoir déplacé l'âge légal de 60 ans.Soixante ans c'est un symbole qui marque profondément la gauche [...] il faut sortir de ce tabou symbolique."

Elle s'est en revanche lundi opposée à une hausse des cotisations, qui pénaliserait selon elle le niveau de vie des Français et la compétitivité du pays.

Enfin, le président de l'Union professionnelle artisanale (UPA), Jean Lardin, s'est déclaré hostile à "une augmentation des cotisations" retraite , mais favorable à la mise à contribution "d'autres revenus que les revenus du travail". Le responsable syndical s'est dit "ouvert à toute discussion autour de l'allongement de la durée des cotisations" et du recul de l'âge de départ à la retraite .

UMP et PS avancent leurs propositions

L'UMP présentera ses propositions pour la réforme à l'issue d'une convention le 19 mai à l'Assemblée nationale et après avoir mené des débats sur le sujet au plan national et dans chacun des départements, a annoncé lundi son porte-parole, Frédéric Lefebvre.

Le parti socialiste - par la voix de son porte-parole Benoît Hamon - a de son côté demandé une réforme des cotisations patronales - qui seraient calculées sur la valeur ajoutée produite par l'entreprise et non plus sur la masse salariale - pour financer les retraites.

Il a également demandé une taxation des revenus financiers, par exemple en soumettant à cotisations sociales les plus-values des stock-options dont bénéficient cadres et dirigeants des grandes entreprises. Cette mesure avait déjà été proposée en 2007 par la Cour des comptes, qui avait également suggéré que la mesure pourrait s'étendre  aux "parachutes dorés" et aux indemnités de départ.

Le PS s'est également lundi opposé au relèvement de l'âge légal de la retraite. La conséquence immédiate de l'allongement de la durée de cotisation, dans un contexte où le taux d'emploi des seniors un des plus faibles d'Europe, ne dépasse pas 35 % des plus de 55 ans, est la baisse du niveau des pensions", a déclaré Benoît Hamon lors d'un point de presse hebdomadaire.

La fonction publique également concernée

Le régime des retraites des fonctionnaires est également concerné par la réforme 2010. La FSU, premier syndicat de la fonction publique d'Etat, qui doit être reçue par Eric Woerth le 22 avril, a annoncé lundi qu'elle opposerait à "de nouvelles régressions" en matière de retraites comme "l'allongement de la durée de cotisation, le recul de l'âge légal, la remise en cause des six derniers mois" pour les fonctionnaires.

"Il s'agit de maintenir le niveau de vie en garantissant une retraite dès 60 ans", écrit le syndicat dans un communiqué. "Depuis 2003, les réformes ont conduit à de fortes dégradations et à la baisse des pensions, pénalisant particulièrement les femmes, les salariés qui ont connu le chômage, la précarité, le temps partiel", insiste la FSU. Dans la fonction publique, "les personnels ont dû retarder leur départ à la retraite de six mois en moyenne et ont vu dans le même temps leur taux de pension diminuer de 1,5%".

Pour le syndicat, qui appelle les personnels à porter leurs revendications lors de la journée du 20 avril, il n'est pas question non plus d'accepter "l'alignement des régimes de retraite " public et privé.