Les approximations de Nicolas Sarkozy sur les futures hausses d'impôts

Par Ivan Best  |   |  517  mots
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Le président sortant évoque de futures hausses d'impôt à hauteur de 8 milliards d'euros. Mais le programme transmis en début d'année à Bruxelles table sur une hausse des prélèvements obligatoires de 1,2 point (25 milliards d'euros) entre 2012 et 2016

Au cours du prochain quinquennat, si Nicolas Sarkozy est réélu, "les impôts n'augmenteront que de 8 milliards d'euros" a déclaré le président sortant ce mercredi matin, sur Europe 1. Dans l'optique d'une baisse de 115 milliards d'euros du défcit public, afin que celui-ci soit ramené à zéro en 2016,  75 milliards d'euros d'économies sur les dépenses sont prévues, tandis que "32 milliards d'euros de hausses sont déjà derrière nous, sur un total de 40 milliards" a souligné le chef de l'Etat.CQFD. Il ne resterait donc que 8 milliards à trouver. 

115 milliards d'euros de baisse du déficit

Cette affirmation soulève au moins deux questions. D'abord, Nicolas Sarkozy fait référence à une programmation des finances publiques actualisée en début d'année, et transmise à Bruxelles. Cette programmation fait effectivement état d'un effort de redressement des finances publiques de 115 milliards d'euros entre 2010 et 2016, dont 74 milliards en dépenses et 41 en recettes (par des hausses d'impôts). S'agissant des dépenses, il s'agit d'une évaluation des économies par rapport à la tendance habituelle des crédits publics, de l'Etat ou de la sécurité sociale.  A elle seule, la réforme des retraites votée en 2010 représenterait ainsi une économie de 16 milliards d'euros en 2016. 

Côté hausses d'impôts, le programme transmis à Bruxelles estime que celles-ci (votées depuis l'automne 2010) rapporteront 27,6 milliards d'euros en 2012. Il faudra donc trouver plus de 13 milliards. Bercy table sur la montée en puissance de certaines mesures déjà votées. En tout état de cause, 12 milliards d'euros de nouveaux prélèvements fiscaux resteraient à trouver, selon le document de Bercy, et non 8 milliards d'euros comme l'affirme Nicolas Sarkozy.

Les prélèvements obligatoires à 46% du PIB, record absolu

Deuxième interrogation : comment cette estimation de 12 milliards s'accorde-t-elle avec la prévision gouvernementale de prélèvements obligatoires record, qui atteindraient 46% du PIB en 2016? Le dernier record avait atteint en 1999, sous Lionel Jospin (44,9%). Pour l'année 2011, les prélèvements sont estimés à 43,7% du PIB,  puis 44,8% en 2012. En tout état de cause, toujours si l'on retient les chiffres officiels, la marche à franchir pour passer du niveau de 2012 à celui de 2016 serait de 1,2 point. Une marche qui représente 25 milliards d'euros. Soit beaucup plus que le estimations affichées par Bercy, et trois fois plus que le chiffre avancé par Nicolas Sarkozy. Ce résultat repose peut-être sur une hypothèse de très bonnes rentrées fiscales spontanées: comme disent les experts, en cas de forte reprise économique, l'elasticité des recettes fiscales par rapport au PIB peut être supérieure à 1. Cela signifie que, pour 1% de croissance du PIB, les rentrées fiscales augmentent, spontanément, de plus de 1%. C'est ainsi que Lionel Jospin avait été contraint d'afficher des prélèvements record à la fin des années 90: dans toute la zone euro, les administrations fiscales avaient vu leurs caisses se garnir rapidement, notamment grâce aux bénéfices plantureux des sociétés. Une hypothèse qui paraît bien aléatoire, même si la croissance atteint 2% à partir de 2013, comme le prévoit de façon optimiste Bercy.