Les très divergents programmes économiques de Mélenchon et Hollande

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  650  mots
Jean-Luc Mélenchon/Reuters
Aux antipodes de "l'austérité de gauche", le programme économique de Jean-Luc Mélenchon se fonde sur l'interventionnisme de l'Etat, notamment dans la sphère financière. Les réformes préconisées par le Front de Gauche sont très éloignées des propositions du candidat socialiste

C'est tout le pari de Jean-Luc Mélenchon : peser le plus lourd possible dans la campagne présidentielle, pour mieux négocier ensuite le soutien du Front de Gauche à François Hollande et, ainsi, obtenir le plus grand nombre possible de circonscriptions gagnables lors des élections législatives de juin. A cet égard, il ne va pas être facile pour les négociateurs PS et du Front de Gauche de parvenir à un certain consensus pour aboutir à un contrat de législature. L'exercice pourrait même s'avérer encore plus difficile que ce qu'il fût entre les socialistes et les écologistes de Europe Ecologie-Les Verts. De fait, autant la quasi-totalité des 60 propositions du candidat François Hollande sont marquées par une certaine retenue et la rigueur du temps, autant le programme économique de Jean-Luc Mélenchon et du Front de Gauche se veut absolument l'antithèse de "l'austérité de gauche", préférant parier sur le volontarisme et l'interventionnisme de l'Etat... Des thèses plus vraiment d'actualité au PS, sauf au sein de son aile gauche, celle qui a majoritairement soutenue Arnaud Montebourg lors de la  "primaire" de l'automne 2011.

Le Smic mensuel  porté à 1.700 euros brut

Elaboré par une équipe composée d'hommes connus pour leur engagement (dont l'économiste Jacques Généreux, Pierre Kalfa, coprésident de la Fondation Copernic et l'un des anciens leaders de SUD, Frédéric Boccara, économiste du Parti communiste, etc.), il privilégie "le partage de la richesse" via différentes mesures, d'ailleurs non chiffrées. Ainsi, sur le plan social, le Front de Gauche plaide pour un retour "aux 35 heures effectives", sans annualisation possible et un recours aux heures supplémentaires extrêmement encadré. Le projet préconise aussi de porter le Smic à 1.700 euros brut par mois (contre 1.398 actuellement).

Instauration d'un "salaire maximum" fixé à 360.000 euros par an

A l'autre bout de l'échelle salariale un "salaire maximum sera instauré", fixé à "20 fois le salaire médian, soit actuellement 360.000 euros par an". Le droit à la retraite à taux plein (75% du salaire de référence) serait aussi rétabli. Le financement serait assuré en particulier par une cotisation nouvelle sur les revenus financiers des entreprises, au même taux que les cotisations retraite employeurs sur les salaires . Par ailleurs, l'accroissement du taux et de la masse des cotisations patronales sur les salaires serait modulé en fonction des choix de gestion des entreprises. Enfin, le Front de Gauche compte interdire  "les licenciements boursiers".


Création d'un service public du crédit et  de l'épargne

Côté recettes, Jean-Luc Mélenchon propose une "taxation des revenus et des actifs financiers, la taxation des revenus du patrimoine ainsi que la suppression des exonérations de cotisations sociales patronales - près de 30 milliards d'euros par an - et des niches fiscales". Il s'agirait aussi d'augmenter le rendement de l'ISF. Sans oublier la fameuse mesure reprise par Nicolas Sarkozy : "permettre l'imposition des revenus des Français à l'étranger". Sur un autre terrain, le financement des crédits alloués au logement social serait assuré par le relèvement du plafond du Livret A à 20.000 euros (contre 15.300 actuellement).
Le candidat préconise aussi la création d'un "pôle financier public" par la mise en réseau des institutions financières publiques existantes (Caisses des dépôts, Crédit foncier, Oseo, CNP, Banque postale). Ce réseau serait chargé d'une "nouvelle mission de service public du crédit et de l'épargne, au service de l'emploi (...) de la croissance réelle". Sur ce sujet, il y aura peut-être du grain à moudre dans les négociations avec le PS qui, lui aussi, milite pour la création d'un pôle financier public décentralisé destiné à aider les PME.
Pour le reste, en revanche, les convergences entre les deux programmes s'avèrent très ténues. A moins que François Hollande décide de "gauchir" son discours .