Le vainqueur du ... scrutin sera confronté à une conjoncture médiocre

Par Ivan Best  |   |  558  mots
Nicolas Sarkozy et François Hollande, copyright AFP
Nicolas Sarkozy comme François Hollande ont calé leurs programmes sur l'hypothèse d'un rebond de la croissance en 2013. La réalité risque d'être moins rose. Les conjoncturistes d'Euler-Hermes tablent, par exemple, sur une très faible expansion l'an prochain (+1%).

Sur quelle conjoncture le futur président de la République pourra-t-il tabler, pour mettre en ?uvre son programme ? Pour 2012 comme 2013, François Hollande s'est calé sur les données officielles, affichées par l'équipe Sarkozy, à savoir une très faible croissance cette année (0,7%), qui reprendrait un peu de tonus en 2013 (+1,75%). Or, la plupart des économistes, qui commencent à élaborer des scénarii pour 2013, sont loin de partager ce relatif optimisme.
Ainsi, les experts d'Euler-Hermes ont diffusé hier une étude témoignant d'attentes assez fortes concernant la croissance mondiale, qui pourrait rebondir à 3,1% en 2013... mais la zone euro n'en bénéficierait pas. En 2012, l'activité y reculerait de 0,3% « plombée par l'entrée en récession de deux des quatre principaux contributeurs (Italie à -1,2%, Espagne à -1,3%) et le ralentissement des deux autres (France à 0,4% et Allemagne à 0,9%) ». Et en 2013 ? La croissance atteindrait péniblement 1%. Ludovic Subran, chef économiste d'Euler Hermès souligne à quel point les pays du sud de la zone euro « ont enclenché des politiques d'austérité, qui, sans croissance, sont de véritables cercles vicieux, non seulement pour eux pour les autres pays de la zone ».

Le temps du rebond

François Hollande peut appeler à une renégociation du traité, les esprits peuvent évoluer en Europe, en faveur d'un soutien à l'activité sous forme d'investissement, le temps de la politique risque d'être beaucoup plus long que celui de l'économie : entre l'émergence d'un consensus sur le sujet, le déblocage effectifs des fonds, et son effet sur l'activité, de longs mois risquent de s'écouler.
Et encore, ce scénario est celui d'une inflexion du cap de la politique économique en Europe. En attendant, la stratégie poursuivie de l'austérité à tout crin mène à l'échec, selon une majorité d'économistes. C'est un risque majeur, estime Euler-Hermès : « l'absence de coordination des politiques budgétaires et l'ampleur des ajustements fixés (baisse du déficit public à marche forcée), alors même que les fondamentaux domestiques sont faibles (taux de chômage record à plus de 10% dans la zone euro) augmentent le risque d'une spirale récessive au sein des économies européennes et d'un affaiblissement de la demande mondiale ».

Un économiste libéral qui souligne les dangers d'une "austérité irréfléchie"
Même un économiste libéral comme Charles Wyplosz, professeur d'économie internationale à Genève, souligne dans un texte publié récemment, les dangers d'une « austérité irréfléchie » qui risque de « faire perdre toute crédibilité à la politique économique ». Alors que cet expert estime qu'à long terme, la discipline budgétaire n'entrave en rien la croissance, « prendre des mesures de réduction du déficit public dans le creux d'une récession n'a jamais eu aucun sens » affirme-t-il. Car ces mesures ne font alors qu'accentuer la récession et fondre les recettes fiscales, de sorte que le déficit n'est, in fine, en rien réduit.
Et d'insister sur la vanité d'objectifs annuels de diminution du déficit: il faut inscrire le redressement budgétaire sur le long terme. Une restructuration des dettes publiques, préventive (car « il vaut mieux taxer les marchés que les citoyens ») permettrait « à des pays comme le Portugal, l'Italie, mais aussi potentiellement, l'Espagne, la France et même l'Allemagne d'éviter de porter le poids d'une dette qui empêche le retour à la croissance » souligne Wyplosz.