Un débat, deux hommes, six points clés

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  924  mots
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Figure imposée de l'entre-deux-tours de l'élection présidentielle, le débat de ce soir entre Nicolas Sarkozy et François Hollande pourrait être l'occasion d'aborder les "vrais" sujets (compétitivité, emploi, Europe, etc.). Sauf si, une fois encore, ce face à face sombre dans la facilité, l'exposé de faux problèmes et le superficiel.

Les deux heures trente de débat programmées ce soir à compter de 21 heures ne seront pas de trop pour les deux candidats, tant les thèmes à aborder ne manquent pas. Reste à savoir si les explications de fond auront droit de citer dans ce type de "duel", ou si l'on restera au niveau de l'écume des choses avec des formules choc destinées à marquer les esprits, héritières des fameuses répliques "monopole du c?ur", "homme du passif", "dans les yeux je vous le dis"  entendues dans les précédents débats d'entre deux tours.

Sans parler du fait qu'une grande partie du temps de parole devrait être consacré au bilan du quinquennat finissant. L'un, bien sûr, le trouvant très honorable ; l'autre, bien entendu, l'estimant déplorable. Alors, espérons qu'il soit aussi question de l'avenir et des "vraies préoccupations". Car si François Hollande et Nicolas Sarkozy ont tous les deux conscience que les lendemains vont être rudes pour la France, il n'en demeure pas moins que sur plusieurs sujets, il n'ont pas la même idée sur la potion qu'il conviendra de faire avaler au pays. Tour d'horizon des six points clés.

Comptes et déficits publics

Tant Nicolas Sarkozy que Français Hollande souhaitent revenir à un déficit des comptes publics limité à 3% du PIB dès 2013. Le candidat-président prône même l'équilibre à l'horizon 2016, via 75 milliards d'euros d'économie, alors que le candidat PS penche, lui, pour 2017. S'il escompte, lui aussi, réaliser des économies, François Hollande s'est pourtant bien gardé de préciser dans le détail sur quel levier il compte agir, préférant mettre en avant les nouvelles recettes fiscales tirées d'un rabotage général des niches fiscales. Nicolas Sarkozy va certainement aussi titiller le candidat PS sur son projet de donner un coup de pouce au Smic et d'augmenter de 25% l'allocation de rentrée scolaire. La règle du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite va aussi animer le débat. Nicolas Sarkozy veut faire perdurer cette mesure, sauf dans l'école primaire. Il veut l'étendre aux collectivité territoriales de plus de 30.000 habitants. François Hollande, pour sa part, souhaite, au contraire, créer 60.000 emploi dans l'éducation nationale et 1.000 postes dans la magistrature.

Fiscalité

François Hollande entend taxer à 75% la tranche des revenus réguliers dépassant 1 million d'euro. Nicolas Sarkozy ne va pas manquer de parler  "d'impôt confiscatoire". Lui préfère demander aux exilés fiscaux de s'acquitter d'un nouvel impôt égal à la différence entre ce qu'ils payent dans leur pays d'accueil et ce qu'ils auraient du payer s'ils étaient restés en France. Le candidat PS va également certainement évoquer sa "grande réforme fiscale" tendant à équilibrer la fiscalité du capital et celle sur le revenu. Il veut aussi limiter à 10.000 euros par contribuable les avantages issus des niches fiscales, fusionner, à terme, CSG et impôt sur le revenu et rétablir les anciens taux de l'impôt sur la fortune.

Nucléaire

Encore un sujet potentiellement explosif ! François Hollande souhaite baisser progressivement de 75 à 50% la part du nucléaire dans la production d'électricité d'ici 2025, tout en faisant monter, en parallèle, la part des énergies renouvelables. Il s'est aussi engagé à fermer "durant le quinquennat" la plus vieille centrale, celle de Fessenheim. En revanche, il a confirmé vouloir faire aboutir le chantier de l'EPR de Flamanville. Nicolas Sarkozy, lui, a régulièrement réaffirmé son engagement en faveur du nucléaire qui assure "l'indépendance de la France".

Compétitivité et emploi

Le candidat-président va reprendre son antienne sur le "coût trop élevé du travail" en France. Il justifiera ainsi sa décision d'augmenter de 1,6 point le taux de TVA le 1er octobre, s'il est réélu. Cette hausse permettrait "d'alléger" le coût du travail en transférant sur la TVA, donc sur la consommation, les 13 milliards de cotisations patronales dédiées à la politique familiale. Il évoquera aussi certainement son souhait de voir aboutir entre le patronat et les syndicats la négociation sur les accords "emplois compétitivité" permettant de moduler temps de travail et salaires. Comme il fera référence à son projet de referendum sur la réforme de la formation professionnelle et de l'indemnisation du chômage. François Hollande s'oppose totalement à la "TVA sociale". En revanche, le candidat PS évoquera la possibilité d'instituer une cotisation sur la valeur ajoutée pour financer la protection sociale. Il mentionnera certainement son projet de  création d'une banque publique d'investissement. Sur le front du chômage des jeunes, il avancera aussi ses propositions de "contrat d'avenir" et de "contrat de génération".

L'Europe

François Hollande l'a maintes fois répété : s'il est élu, il demandera une renégociation du traité de mars dernier sur le pacte budgétaire européen, afin d'y faire ajouter un chapitre sur la croissance. Le candidat PS se dit à cet égard favorable à la création d'eurobonds. Nicolas Sarkozy, lui, donne un an à l'Europe pour revoir les règles régissant la libre circulation des hommes dans l'espace Schengen, sinon la France suspendra sa participation à cet accord. Le candidat-président veut également davantage de réciprocité dans l'accès aux marchés publics entre les différentes zones économiques mondiales. Il trouve l'Europe trop laxiste sur ce point.

Et aussi l'école, les retraites, la décentralisation...De quoi nourrir de beaux débats. Sauf si...