Rentrée scolaire, retraite, Smic : le gouvernement doit vite trancher

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  1024  mots
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Revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire de 25%, décret retraite à 60 ans pour les salariés ayant commencé à travailler à 18 ans, "coup de pouce au Smic"... Le gouvernement planche sur les dossiers sociaux. De premières décisions seraient arrêtées lors du prochain conseil des ministres du 23 mai.

Dans les ministères sociaux, les équipes se sont mises au travail. Les réunions et déjeuners de cabinet s'enchaînent. Pas de temps à perdre pour concrétiser les promesses du candidat François Hollande d'aller vite sur certains sujets. De fait, le candidat socialiste s'était engagé à rapidement  "redonner du pouvoir d'achat aux Français". Première mesure concrète dans ce domaine, la revalorisation de l'allocation de rentrée scolaire (ARS) qui profite à quelque 3 millions de foyers. La question devrait être au menu du prochain conseil des ministres, mercredi 23 mai. François Hollande s'était engagé à revaloriser l'ARS de 25%, soit un coût d'environ 380 millions d'euros. Actuellement, le montant de l'ARS varie entre 287,84 et 314,24 euros selon l'âge de l'enfant. Elle est octroyée aux familles sous conditions de ressources - par exemple, la famille ne doit pas percevoir un revenu net supérieur à 23.200 euros pour un enfant- et est versée sous forme de chèque vers la mi août. Il faut donc aller vite. Le ministère des Affaires sociales, sous l'autorité de Marisol Touraine, est donc en train de rédiger un projet de décret qui sera soumis à consultation du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). C'est ce projet de décret qui serait examiné en Conseil des ministres le 23 mai.


Arbitrage attendu sur le dossier retraite

Autre sujet plus délicat : la retraite. Là aussi, il semble que les choses bougent un peu sur ce dossier co-piloté par Marisol Touraine et Michel Sapin, le nouveau ministre du Travail. François Hollande a promis de rabaisser à 60 ans l'âge possible de départ à la retraite pour les salariés ayant commencé à travailler à 18 ans et totalisant leurs 41 annuités de cotisation. Or, jusqu'ici, le candidat Hollande considérait qu'il devait s'agir des annuités "cotisées" auxquelles s'ajouteraient éventuellement les périodes de service militaire, de maladie, et de maternité dans la limite de quatre trimestres. En revanche, les périodes "validées" mais non cotisées, par exemple celles passées au chômage ne devraient pas être comptabilisées.... Ce qui fait hurler les syndicats qui ne comprennent pas que les personnes ayant eu des accidents de carrière ou que les mères de famille nombreuse soient laissées au bord de la route. A cela s'ajoutent d'autres problèmes, comme celui des polypensionnés. Selon nos informations, le gouvernement pourrait assouplir, finalement, la position adoptée initialement par François Hollande encore candidat. "Les congés maternité seront évidemment comptabilisés dans cette période-là, de même que les périodes de service militaire" et "les périodes de maladie, dans certaines limites", a indiqué hier Marisol Touraine, sans préciser si les périodes de chômage le seraient. "Je ne veux pas rentrer dans les détails (...), je souhaite d'abord échanger avec les partenaires sociaux". Elle a précisé qu'elle rencontrerait "les organisations syndicales et les représentants patronaux dès la semaine prochaine" et que le décret sera publié "fin juin ou début juillet". Il concernait "150.000 personnes par an", pour un coût évalué à "un milliard par an". "Dans un deuxième temps", a confirmé Mme Touraine, le gouvernement se penchera sur l'ensemble du dossier des retraites "dans le cadre d'une large négociation avec les partenaires sociaux à partir de l'été ou de l'automne". "La question de la pénibilité et de la retraite des femmes" devrait notamment être abordée.

Ainsi, le plafond des quatre trimestres pris en compte pour les maternités pourrait être relevé. Mais, problème, un simple décret peut-il suffire dans ce cas ? De même, le décret devrait aussi concerner les personnes répondant aux critères demandés (âge du début d'activité et nombre d'annuités) mais relevant d'un autre régime de retraite que celui du régime général. Rien n'est encore vraiment décidé. Là aussi, il reviendra au conseil des ministres du 23 mai de débattre avant arbitrage éventuel du Premier ministre. Puis, un projet de décret sera envoyé à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) pour concertation. A cet égard, le ministre du Travail commence lundi une série de consultations avec les organisations patronales et syndicales pour une  "prise de contact". Le sujet des retraites sera certainement sur la table. Concrètement 150 000 personnes devraient bénéficier de cette correction pour un coût de 5 milliards d'euros à la fin du quinquennat (1 milliard par an), qui seront financés par un « supplément de cotisation de 0,1 % par an sur les salariés comme sur les employeurs ». Reste à savoir comment les régimes complémentaires Agirc-Arrco, gérés par les partenaires sociaux de façon plus indépendante que la branche retraite, intégreront cette correction, le Medef étant très opposé à toute augmentation de cotisation.


Faute de croissance, quel coup de pouce pour le Smic?

Sur la question du Smic, les perspectives négatives de l'Insee en matière de croissance (progression nulle du PIB au premier trimestre et guère mieux au deuxième) viennent quelque peu perturber les intentions du gouvernement. Pour éviter la sempiternelle querelle sur l'opportunité d'accorder un "coup de pouce" au Smic, François Hollande souhaitait indexer l'évolution du Smic sur celle de la croissance. Concrètement, actuellement, le Smic est revalorisé en début d'année en fonction de l'indice des prix et de la moitié de l'évolution du pouvoir d'achat du taux de salaire de base des ouvriers. Un paramètre supplémentaire devait donc être ajouté, tenant compte de la croissance. Or, François Hollande voulait inaugurer cette nouvelle donne, sous forme d'un  "coup de pouce" immédiat dès cet été, à l'issue de la grande conférence sociale prévue mi juillet. Faute de croissance, a priori c'est raté. Il va donc falloir au gouvernement trouver une autre "clé" pour la revalorisation  immédiate du Smic (9,22 euros brut de l'heure et 1398,87 euros par mois sur la base de 35 heures de travail par semaine), réclamée par les syndicats mais combattue par le patronat.