Le sénateur Marini sonne la charge fiscale contre le gouvernement

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  754  mots
Philippe Marini, président UMP de la commission des finances du Sénat Copyright Reuters
Le président UMP de la commission des finances du Sénat, accuse le gouvernement de dissimuler 30 milliards de mesures fiscales qui seront pourtant nécessaire pour tenir l'objectif d'un déficit public ramené à 3% du PIB en 2013, faute de croissance suffisante. Il dénonce aussi les "ambiguïtés et les" impasses" de l'équipe Ayrault.

Imprécisions, ambiguïtés, dissimulations... Philippe Marini, président UMP de la commission des finances du Sénat, n'a pas fait dans la dentelle pour dénoncer les projets économiques, fiscaux et sociaux du gouvernement Ayrault. Le sénateur de l'Oise accuse ainsi le Premier ministre et son équipe de dissimuler 30 milliards d'euros de mesures budgétaires supplémentaires en 2012 et 2013, indispensables selon lui pour ramener la croissance des dépenses publique de 2% du PIB à 1,1% en volume et pour tenir les engagements internationaux de la France, soit un retour du déficit limité à 3% du PIB en 2013. " Ces mesures, selon lui, passeront par un "coup de massue" fiscal, Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, a-t-il prédit, sera contraint à un plan d'austérité "qui ressemblera comme deux gouttes d'eau" à celui du gouvernement Fillon d'octobre 2011. Comment le sénateur de l'Oise parvient-il à trouver 30 milliards de mesures fiscales « dissimulées » ?


La croissance de 1,7% ne sera pas au rendez-vous de 2013


Tout d'abord, pour Philippe Marini, il manquera environ "10 milliards d'euros dès 2012 " correspondant à un supplément de déficit spontané, égal à 5% du PIB et non 4,4% comme initialement prévu. Ensuite, pour 2013, a poursuivi le sénateur de l'Oise, sur la base d'une croissance limitée à 1% (consensus des conjoncturistes) et non de 1,7% comme prévu par le programme de François Hollande, il faudra ajouter 10 milliards d'euros de mesures compte tenu de cette moindre croissance. Enfin, il restera encore "à préciser environ 10 milliards d'économies sur les dépenses"  pour parvenir à limiter leur croissance à 1,1% du PIB.  On arrive ainsi, au total, à 30 milliards d'euros. Pis, selon lui, dans un scénario encore plus pessimiste - une croissance nulle - ce serait même 40 milliards qui devront être trouvés.


Pierre Moscovici a déjà reconnu  un supplément de déficit pour 2012

Ce que reproche aussi le président de la commission des finances du Sénat au gouvernement, c'est de ne pas dire aux Français "avant le second tour des législatives" sur quelles dépenses il compte rogner ainsi que sur quelles recettes supplémentaires il table. Le 6 juin dernier, lors de sa première conférence de presse, le ministre de l'Economie Pierre Moscovici a lui-même reconnu que sans mesures nouvelles, le déficit public serait de 5 points du PIB en 2012 et non 4,4 points comme prévu dans le programme de stabilité. Or, cet écart de 0,6 point représente, en effet, environ 10 milliards d'euros. Tout comme il est évident qu'une moindre croissance en 2013 viendra aggraver les besoins de financement pour tenir l'objectif de 3% de déficit... Ou alors, il faut renoncer à cet objectif, ce qui  mettrait la France en difficulté face au reste de l'Union européenne.

Dès lors, comme le souligne Philippe Marini, il n'y a pas d'autres possibilités que d'augmenter les prélèvements et de réduire les dépenses. Encore faut-il le faire intelligemment pour ne pas casser la (faible) croissance. Quant au mutisme du gouvernement sur les dépenses visées par un plan d'économie, dénoncé par Philippe Marini, il convient de rappeler que Jean-Marc Ayrault a toujours dit qu'il attendait le rapport de la Cour des comptes sur l'état des lieux des finances publiques, prévu pour le 29 juin.


Des mesures fiscales et sociales jugées chères , voire inéfficaces

Le président de la commission des Finances du Sénat a critiqué aussi diverses mesures fiscales prévues par le programme de campagne de François Hollande comme la surtaxe de 15% sur les bénéfices des banques qui "poursuit un but punitif sans objectif de régulation" et qui pourrait freiner l'accès au crédit ou encore  le rétablissement de l'ancien barème de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), "un choix facile et périlleux" qui, couplé "avec un taux de 75%", sur la tranche de revenus supérieure à un million d'euros, conduira à une " fiscalité confiscatoire et anti-compétitivité". IIdem pour le doublement du plafond du Livret A, "ce qui va à l'encontre de l'équité" , car seuls les plus favorisés pourront en bénéficier. Et aussi de dénoncer les mesures sociales prévues par le gouvernement, jugées chères (augmentation du Smic, retour à 60 de l'âge de départ à la retraite pour les carrières logues) ou inefficace (comme l'alignement prévu du régime social de l'épargne salariale sur celui des salaires. Bref, Philippe Marini dresse un réquisitoire impitoyable à l'encontre du gouvernement. Les débats parlementaires risquent d'être houleux.