Le projet de Banque publique d'investissement ne fait pas l'unanimité

Par Fabien Piliu  |   |  644  mots
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Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre a déclaré vendredi lors d'un déplacement à Nantes qu'un avant-projet de la Banque publique d'investissement serait présenté à l'automne. Celle-ci devrait être opérationnelle à la fin de l'année ou, au plus tard, au début de l'année prochaine.

Patience, patience. Promise par le candidat Hollande, la création de la Banque publique d'investissement (BPI) est pour bientôt. « La banque publique d'investissement, plus que jamais, apparaît nécessaire. J'ai demandé que nous accélérions sa préparation pour que, dès l'automne, nous disposions d'un avant-projet pour que, à la fin de l'année ou, au plus tard, au début de l'année prochaine, l'outil soit opérationnel », a déclaré vendredi Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre lors d?un déplacement à Nantes.

Le temps de la France jacobine est-il révolu ?

Plusieurs indications ont été fournies par le chef du gouvernement. Ce nouvel instrument « ne travaillera pas de Paris, il sera en lien étroit avec les territoires, là où se posent les vraies questions, avec les conseils régionaux, les autres collectivités territoriales, notamment les métropoles, mais aussi les acteurs économiques, les chambres de commerce et d'industrie, les chambres des métiers, les représentants du personnel, tous ceux qui, avec les universités, les chambres de recherche, peuvent dynamiser notre industrie. Voilà l'enjeu, voilà le défi qui est le nôtre: faire face à l'urgence, engager les réformes de structure à moyen terme mais avec la volonté de réussir le redressement de la France », a-t-il expliqué. Lors de la rencontre Planète PME, Pierre Moscovici, le ministre de l'Économie, avait déjà livré quelques indications surles contours de la BPI. Elle fonctionnera comme un réseau de distribution unique de l'ensemble des outils publics de financement, c'est à dire les prêts garantis, les fonds propres, les subventions et les projets à l'export.

Remise en cause des structures existantes

A mots à peine couverts, Jean-Marc Ayrault remet en cause l?action des structures existantes, comme CDC et sa filiale CDC Entreprises, France Investissement, OSEO et le Fonds stratégique d?investissement (FSI), la toute nouvelle banque de l?industrie... Elles seraient trop jacobines ? Pourtant, OSEO est fortement implantée dans les régions, tout comme le FSI avec FSI Régions. Quand à CDC Entreprises, elle a lancé 77 fonds régionaux qui gèrent plus de 12 milliards d?euros.

Dans ce contexte, créer cette BPI est-il utile ? Peut-être. « En attendant de connaître la capacité financière de la future BPI, il est essentiel que cette nouvelle institution permette de clarifier et de simplifier l?accès des entreprises aux différents dispositifs de financement public existants », estime Céline Choulet, économiste chez BNP Paribas. La BPI pourrait aussi pacifier les relations entre tous les acteurs, relations qui ont été parfois tendues par le passé.

Patrice Coulon, le directeur général délégué de GE Capital, est pour sa part assez sceptique. "La France est suffisamment pourvue de dispositifs de soutiens. Pourquoi en créer un autre, sachant que sa force de frappe, qui ne devrait pas dépasser la vingtaine de milliards compte tenu de l'état des finances publiques, sera insuffisante pour avoir un réel impact sur l'économie ?", s'interroge-t-il. Si tel était le cas, d?une part, l?action de la BPI ne pourrait se concentrer que les entreprises qui souffrent le plus et/ou sur celles qui sont promises au plus bel avenir. D?autre part, elle ne pourrait absolument pas se substituer au marché mais seulement pallier ses carences.

Les banques n'ont pas coupé l'accès au crédit

Par ailleurs, le timing est-il bon ? Ce n?est pas si certain. Les statistiques récoltées par GE Capital, le principal acteur du recouvrement en France, indiquent que les entreprises ne souffrent pas actuellement d'un problème d'accès au crédit bancaire. "Depuis 18 mois, elles ne consomment que 50% à 60% des droits de tirage des prêts qui leur ont été accordés. C'est plutôt d'un nombre insuffisant de projets à financer dont souffre l'économie", poursuit Patrice Coulon.