Investissements des PME : Bercy joue avec le feu

Par Fabien Piliu  |   |  542  mots
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Bercy envisage de raboter de 100% à 80% le taux de déductibilité des intérêts d'emprunts. Pour les PME, une franchise est prévue. Le financement de l'investissement peut-il être fragilisé ?

Le serpent n?a pas fini de se mordre la queue. Selon une information recueillie par nos confrères des Echos, Bercy envisage de raboter de 100% à 80% le taux de déductibilité des intérêts d?emprunts. Une franchise est prévue pour les PME. Le seuil pourrait être fixé à 3 millions d?euros. Avec cette mesure, qui devrait être la plus marquante de la partie recettes du projet de loi de finances 2013 qui sera dévoilé à la fin du mois, le ministère du Budget compte d?une part augmenter ses recettes fiscales. D?autre part, il espère rendre plus juste l?accès au crédit bancaire entre les petits et les grands. Actuellement, la déductibilité des intérêts d?emprunts permet aux grandes entreprises d?abaisser de 14 points le taux d?impôt sur les sociétés.

Est-ce le bon moment ?

Si cette mesure est définitivement adoptée par le gouvernement, puis votée par le Parlement, quelles peuvent être les conséquences pour les PME qui sont les entreprises qui éprouvent le plus de difficultés à convaincre leurs partenaires bancaires de leur accorder des financements ?

Dans le contexte macroéconomique actuel, cette mesure n?est-elle pas risquée ? On peut facilement imaginer que leurs investissements en biens matériels ou en capital, tels que les titres de participation, seront bridés. Le gouvernement espère réduire le poids de l?intermédiation bancaire dans le financement des PME et abaisser le taux d?endettement sur la valeur ajoutée des entreprises non financières qui atteint 130% et augmenter le taux d?autofinancement qui ne s?élève qu?à 67,2%. Ce n?est pas incongru. Mais ces espoirs se heurtent aux difficultés persistantes des entreprises à redresser leur taux de marge sur la valeur ajoutée. Selon l?Insee, il est actuellement de 28,6%. Sur ce point, le débat à venir sur le coût du travail sera éminemment crucial.

Le financement par les marchés financiers est en panne

Ces espoirs se heurtent également à la quasi impossibilité des entreprises à recourir à d?autres voies de financement. La Bourse ? En attendant la création envisagée de la bourse des PME, Alternext ne séduit pas. Selon la Caisse des dépôts et consignations, 500 PME et ETI françaises seulement sont cotées ! Le chiffre est faible en comparaison des 28.000 PME et 4.200 ETI recensées dans l?Hexagone. Par ailleurs, la vitalité actuelle des marchés financiers inquiète plus qu?elle ne rassure les chefs d?entreprise. Fragilisé par les règles prudentielles Bâle III et Solvency II dans les secteurs de la bancassurance, le capital-investissement voit ses perspectives s?assombrir.

Les perspectives du capital-investissement sont maussades

Alors que les experts relèvent régulièrement le manque d?envie des dirigeants à ouvrir le capital de leur entreprise, cette dégradation de l?environnement du capital?risque et du capital-développement déjà insuffisamment développés en France par rapport à son importance dans la plupart des autres pays industrialisés, tombe mal. Quant aux business angels, ils sont trop peu nombreux et moins bien incités qu?au Royaume-Uni par exemple pour aider réellement les entrepreneurs dans le financement de leurs projets.