La pause déjeuner sacrifiée sur l'autel de la crise ?

Par Pierre Manière  |   |  363  mots
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Les Français sont de plus en nombreux à sauter le repas du midi. Selon l'Insee, plus de 60% des cadres, des indépendants et des professions intermédiaires, et près de la moitié des ouvriers feraient "de temps en temps" l'impasse sur le déjeuner.

Avec la crise, le déjeuner a de moins en moins la cote. Selon une étude de l'Insee ("Le temps de l'alimentation en France") parue ce mois-ci, "plus de 60% des cadres, des indépendants et des professions intermédiaires déclarent sacrifier [...] de temps en temps la pause déjeuner". Chez les ouvriers, ils seraient près de la moitié (46%) à faire de même. Pourquoi? "Pour libérer du temps", précise l'étude, qui ne fait pas de parallèle immédiat avec une possible conséquence de la crise. Et pour cause : "nous ne disposons pas de données antérieures", argue Thibaut de Saint Pol, du Centre de recherche en économie et statistiques (Crest) et co-auteur de l'étude.

Des "arbitrages temporels"

Toutefois, les vagues de licenciements et les charges de travail plus importantes qui en découlent pourraient-elles expliquer un accroissement du nombre de personnes prêtes à sauter leur déjeuner? "Sans doute", concède Thibaut de Saint Pol. Avant de se prémunir de quelques bémols : "depuis les 35 heures, le repas du midi est de plus en plus perçu comme un temps professionnel", pointe-t-il. Puis ajoute que certains salariés "sont peut être tentés de procéder à des arbitrages temporels", profitant ainsi de leur pause déjeuner pour avancer dans leurs travaux, et finir plus tôt.

"Dépenser moins"

Toutefois, ces hypothèses sont battues en brèche par les récentes études du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie. Pour Pascale Hébel, qui en dirige le département consommation, il y a "un effet crise important". En se basant sur des études réalisées en 2007 et en 2010, "soit en plein pendant la crise", elle assure que la courbe des personnes qui sautent un repas "au moins une fois par mois" est en nette ascension. Même si elle juge que la rédution du temps de travail à aussi dû avoir un certain impact, Pascale Hébel insiste surtout sur la volonté des Français de faire des économies, de "dépenser moins". Le sacro-saint déjeuner à la française aurait donc du soucis à se faire.