La BPI souhaite créer un Mittlestand à la française

Par Fabien Piliu  |   |  598  mots
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Nicolas Dufourcq, le directeur général de la Banque publique d'investissement souhaite favoriser la création d'ETI. Comment ? En permettant à la BPI de reprendre des entreprises sous LBO, ce que ne pouvait faire le Fonds stratégique d'investissement (FSI).

Petit à petit, la Banque publique d?investissement (BPI) dévoile ses ambitions. "BPI France doit pouvoir reprendre des sociétés sous LBO, sous réserve de valorisations raisonnables, et en co-investissant avec des acteurs privés, afin de créer des consolidateurs d'origine française", a souligné Nicolas Dufourcq, le directeur général de l?institution dans un entretien accordé à l?Agefi. La BPI regroupe CDC Entreprises, le fonds stratégique d?investissement (FSI) et FSI régions, et OSEO. Elle dispose d?une force de frappe d'une force de frappe de 42 milliards d'euros qui lui permet d?offrir toutes les solutions de financement aux entreprises pour renforcer le haut et du bas de bilan, soutenir l?innovation, l?export et donc pour favoriser la consolidation.
"Beaucoup d'entreprises peuvent devenir des ?Essilor? 2030", a-t-il expliqué en mettant en avant le succès de cette petite entreprise française devenue leader mondial des verres ophtalmiques.

La BPI a plus de latitude que le FSI

"La doctrine du FSI lui interdisait de pratiquer le ?cash out?, c'est-à-dire de racheter des sociétés sous LBO à des fonds. Il a dû refuser beaucoup de dossiers qui peuvent aujourd'hui laisser des regrets, car on a laissé sortir du patrimoine français de belles entreprises de taille intermédiaire (ETI)", a-t-il poursuivi tout en précisant que l'intention de la BPI n'était pas de "saupoudrer" mais "d'identifier au sein d'un secteur les entreprises hors normes", préférant parler de "champion plutôt que de filières".
Selon Nicolas Dufourcq, la BPI n?a pas de « problème de capacité" car il reste "3,6 milliards d'euros à libérer du côté du FSI".

Une approche statistique de ce côté du Rhin

Favoriser la consolidation sera bien utile, à condition que l?action de la BPI se traduise effectivement par de nombreux rapprochements entre PME aux activités concurrentes ou complémentaires. Mais la consolidation ne peut être qu?un outil parmi d?autres de la puissance publique. Si la France ne compte que 4.600 ETI, soit deux fois moins qu?en Allemagne, c?est aussi parce que les conditions de développement des TPE et des PME ne sont pas optimales. Les contraintes fiscales et réglementaires ? à l?origine du nouveau choc de simplification promis par le gouvernement - ; les difficultés d?accès au financement bancaire - la principale source de liquidités des entreprises -, sont autant d?urgence à régler. Entre autres blocages.

Par ailleurs, augmenter voire doubler le nombre d?ETI, encourager en France la création d?un Mittlestand ? c?est ainsi que l?on appelle TPE, les PME et les ETI de croissance outre-Rhin permettrait-il de redresser la compétitivité de l?économie tricolore ? Ce n?est pas certain. Comme si les difficultés de la France n?étaient qu?un problème statistique !

Créer un Mittlestand en France, illusoire ?

« Il serait illusoire de vouloir créer un Mittlestand à la française tant le Mittlestand allemand est le produit de l?histoire, de la culture et de l?identité de l?Allemagne. La France et son industrie ont des atouts qu?il ne faut pas nier, ceux de la puissance économique mondiale. Dans le même temps, ignorer les facteurs de la réussite du système productif allemand serait absurde : la France, bien au contraire, sans vouloir les copier pourrait bien utilement s?en inspirer », explique Jean-Yves Gilet, le directeur général du ? FSI en introduction du rapport « Pour un nouveau regard sur le Mittlestand » publié cet automne à la Documentation française.