Réforme de la fiscalité locale : il est urgent d'attendre

Par Ivan Best  |   |  503  mots
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Le projet de loi sur la décentralisation présenté ce mercredi a été sérieusement édulcoré. Ce qui ne présage rien de bon pour certaines réformes espérées comme celle de la fiscalité locale, mal conçue et injuste. En 2014, les régions, qui ont perdu quasiment toute autonomie fiscale, devraient percevoir quelques ressources en plus.

La fiscalité locale est complexe, incohérente, injuste... Tous les adjectifs négatifs ou presque peuvent la qualifier. Pour autant, il ne faut pas s'attendre à de grands chambardements, dans les mois à venir, qui accompagneraient la nouvelle étape de décentralisation. Ni même après... C'est que le sujet est à haut risque. Surtout à l'approche des élections locales de 2014.Les élus locaux sont sous tension alors que leurs dotations sont réduites. Ils voudraient percevoir des recettes fiscales plus dynamiques que celles qui leur ont été attribuées. « L'État a gardé pour lui la fiscalité dynamique en laissant, pour l'essentiel, l'impôt foncier aux collectivités, auquel il a ajouté des droits de mutation pour les départements et un peu de taxe intérieure sur les produits pétroliers pour les régions, et récemment la CVAE [cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, ndlr] », remarque Martin Malvy, porte-parole PS de l'Association des régions de France, dans un ouvrage récent*.

Mais l'État n'a évidemment pas les poches assez pleines pour se priver de recettes fiscales qu'il transférerait aux collectivités. Il préfère leur attribuer des dotations pour boucher les trous. Dotations qu'il ajuste en fonction de la conjoncture (elles baisseront de 1,5 milliard d'euros en 2014).Les régions, qui ont quasiment perdu toute autonomie fiscale (elles ne perçoivent qu'une partie des taxes sur l'essence et sur les cartes grises), devraient se voir attribuer quelques recettes supplémentaires dans la loi de finances pour 2014. Pas question de toucher directement au portefeuille des Français, à l'heure où François Hollande promet la stabilité fiscale.

La piste de nouveaux prélèvements indirects

Il s'agira d'augmenter des prélèvements indirects : on parle d'une taxe sur les sociétés d'autoroute, d'une augmentation du « versement transport » à la charge des employeurs... Bien sûr, les régions voudraient aller plus loin, lever des impôts locaux, mais ce ne sera probablement pas le cas.
Quant aux départements, tous les experts s'accordent à les décrire comme exsangues. Il est vrai qu'ils font figure de guichets d'aides sociales, et se voient débordés par la croissance de ces dépenses (RSA, autonomie...), tandis que certaines de leurs recettes comme les droits de mutation sur les ventes de logements s'effondrent avec le marché immobilier.
La logique, approuvée par nombre de politiques, serait que ces départements perçoivent une partie de la CSG. Mais cela reviendrait à creuser le trou de la sécurité sociale...Quant à l'idée, émise dans le premier avant-projet de loi sur la décentralisation, consistant à expérimenter un impôt départemental sur le revenu - une vieille idée des socialistes -, Bercy pourrait l'évacuer rapidement...Le seul ballon d'oxygène dont bénéficieraient les départements serait la création d'un nouveau « risque » de la sécurité sociale, lié à la dépendance : ils seraient déchargés de ces dépenses.

* Pour décoincer la France, décentralisons !, éditions Privat.