Musique classique ou odeur d'orange... ces petites choses qui poussent à acheter plus

Par Laszlo Perelstein  |   |  765  mots
Copyright Reuters
Casino a pris cette année la décision d'arrêter la diffusion de musique dans 450 de ses magasins afin de ne pas avoir à payer les droits à la SACEM. Écouter de la musique influence pourtant le comportement des acheteurs, comme la couleur des emballages ou... sentir une odeur de chocolat.

Depuis le début de l'année, il n'y a plus musique dans les supermarchés et hypermarchés Casino. Le groupe n'en a pour autant pas perdu sa voix, puisqu'il communique encore, notamment à propos du rachat prochain de Monoprix.  Interrogé par Le Progrès, Philippe Mattelon, chef du service des licences, en charge des grands comptes au sein de la SACEM estime la décision « provisoire », le groupe ayant « conscience que la musique dans un magasin favorise l'acte du consommateur ». Nombreux sont les facteurs à avoir un tel effet sur les achats.

Les études à propos de l'ambiance musicale dans les magasins sont nombreuses et parfois réalisées sur des échantillons peu représentatifs. Ainsi, en 1997 des chercheurs sont parvenus à prouver  que l'écoute de musique française ou allemande dans le rayon vin d'un supermarché anglais influence le consommateur dans le choix des bouteilles. Ils ont « sondé » pour cela 44 personnes en deux semaines, difficile de tirer des conclusions avec un tel échantillonnage.

Les classiques, moteur d'achat

Dans sa thèse, Sophie Rieunier détaille ce qui ressort des études faîtes sur le sujet. La maître de conférence en marketing à la Sorbonne explique que « les individus passent plus de temps dans le magasin et dépensent plus lorsque la musique correspond à leurs goûts musicaux » comme des chansons du Top 50 ou des gens appréciés des masses. Les clients « dépensent également plus dans un magasin lorsqu'on y diffuse de la musique supposée en accord avec le type de produits qui y est vendu ».

De nombreux magasins diffusent ainsi leur propre musique d'ambiance pour créer un univers qui leur est propre et se distinguer des autres. Starbucks a une préférence pour le jazz, quand Victoria's Secret voue un amour au classique et Nature & Découvertes préfère les sons d'ambiance rappelant la nature. Commercialiser ces compilations peut rapporter gros puisque l'enseigne française a vendu plus de 95 000 albums de « Mers et océans », récoltant un disque d'or.

Ces odeurs qui font acheter

Pour ne pas faire perdre le rythme aux acheteurs, les professionnels du marketing ont du nez. Une étude récente démontre ainsi qu'une odeur de chocolat a augmenté les ventes de livres dans une librairie.  Les chercheurs ont ainsi constaté une augmentation globale des ventes de 20%, allant jusque 40% pour les livres en lien avec l'odeur. Ou comment Milka fait exploser les ventes de roman à l'eau de rose.

Pour booster les ventes, l'odeur d'orange peut également être utilisée. Livescience  rapporte ainsi les effets stimulant d'essences de cet agrume, boostant de 20% les achats des clients d'une boutique. Si une telle progression des ventes a pu être observée, c'est parce qu'une odeur « simple » était diffusée, comme pour le chocolat. Une senteur plus élaborée à base d'orange, basilic et thé vert a été testé, récoltant les mêmes résultats que l'absence d'odeur, c'est-à-dire aucun.

 Perte des repères, hausse des ventes

Le problème de tels artifices est qu'ils sont soumis aux personnalités des individus. C'est pourquoi les supermarchés et certaines marques (IKEA notamment) ont recours à la perte de repères pour augmenter leurs ventes. Les produits du quotidien sont généralement placés à l'arrière du magasin dans le but évident de « perdre » le consommateur. Sur le chemin, la lumière artificielle remplace celle du soleil, il n'y a pas de fenêtres et les sorties sont difficilement accessibles. Une fois dans le « tracé de route » des allées, les consommateurs sont conditionnés pour les parcourir de haut en bas sans dévier. Et ont d'autant plus de chance de succomber.

Chez IKEA, la situation est identique, comme l'expose Alan Penn. Interrogé par Rue89, le chercheur à l'University Colllege de Londres explique ainsi que « les premiers produits que les gens aperçoivent sont les plus chers, car ils doivent passer dans les pièces reconstituées. Une fois arrivés dans les rayons à thèmes où les produits sont moins coûteux, ils s'autorisent une récompense en s'en offrant quelques-uns ».

VIDÉO : The Clash - Lost in the Supermarket

Finalement, les Clash n'avaient rien compris en chantant Lost in the supermarket. Être perdu n'empêche pas de consommer joyeusement mais au contraire le permet. Avec la multiplication de l'utilisation des données personnelles, l'on peut être sûr que d'autres méthodes pour « stimuler » les ventes feront bientôt leur apparition dans les supermarchés. Le consommateur l'ignore mais il est confiné dans l'?il du cyclone, autour de lui, le marketing sensoriel s'active.