Cinq chantiers pour l'économie française : 3/ retraites, une réforme a minima qui fait "Pschitt"

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  566  mots
Les français ont encore du mal à croire en la pérennité de la réforme des retraites proposée par le gouvernement. DR
Sur le dossier des retraites, la crédibilité de François Hollande reste encore à prouver si l'on en croit un sondage BVA, paru samedi 31 août. La réforme annoncée il y a quelques jours par Jean-Marc Ayrault serait très mal accueillie par les Français qui seraient 62% à se dire défavorables aux décisions prises. C'est plus encore qu'en juin 2010, lors du report de l'âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans (61 %). Toujours d'après ce sondage, 86% des Français ne pensent pas que cette réforme permettra durablement d'équilibrer le financement des retraites.

François Hollande et la majorité ont sans doute commis une erreur. À force de décrier les réformes « de droite » de 1993, 2003, 2008 et 2010, et notamment l'augmentation de la durée de cotisation, les socialistes, alors dans l'opposition, avaient laissé entendre, qu'une fois au pouvoir, ils proposeraient une « vraie » réforme structurelle et systémique. De surcroît, une fois revenu aux commandes, le même PS a martelé durant plus de douze mois que la prochaine réforme des retraites serait « La Réforme » définitive. Résultat, les annonces de Jean-Marc Ayrault ont fait « pschitt » !

Rien sur l'ébauche d'un grand régime unifié englobant tout le monde : fonctionnaires, salariés du privé et du public, indépendants, commerçants... Au contraire, la future réforme prend bien soin d'épargner (sauf s'agissant de l'allongement de la durée de cotisation et des revalorisations des cotisations) les régimes spéciaux et celui des fonctionnaires. Officiellement, pour laisser le temps à la réforme Sarkozy de 2008 les concernant de produire totalement ses effets.

Une réforme qui ne manque pourtant pas de subtilité

Les Français se disent, encore une fois, que ce sont toujours les mêmes « qui trinquent ». Pis, le projet Ayrault entérine la réforme Sarkozy-Woerth de 2010. Non seulement en actant les augmentations de durée de cotisation prévues jusqu'en 2020 - un trimestre supplémentaire tous les trois ans -, mais surtout en prolongeant le mouvement... jusqu'en 2035. Une véritable trahison pour beaucoup d'électeurs.

Et pourtant, si elle manque d'ampleur par rapport à ce qui avait été annoncé, la réforme ne manque pourtant pas de subtilité. Elle partage les efforts nécessaires entre salariés, retraités et entreprises ; elle ne bride pas outrageusement le pouvoir d'achat ; elle s'attaque à des dossiers restés jusqu'ici fermés, comme la prise en compte de la pénibilité ou les inégalités hommes-femmes. D'ailleurs, pour l'instant les organisations patronales ne se sont pas arc-boutées plus que de raison en attendant la baisse du coût du travail promise en compensation.

Réforme tranquille

Dans le camp syndical, les opposants à la réforme (CGT, FO et Solidaires) ne semblent pas non plus vouloir « se battre » jusqu'au bout. Certes, elles organisent une journée d'action ce 10 septembre. Mais, il s'agit davantage, à ce stade, d'un test sur leur capacité à mobiliser. On ne sent pas venir une lame de fond.

Attention cependant, la prévision sociale est une science bien difficile. Une allumette peut toujours mettre le feu aux poudres. C'est d'ailleurs pour ça que François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont concentré leurs efforts sur le régime général des retraites du privé. En cette période de morosité économique, il ne faudrait pas brusquer les gros bataillons des fonctionnaires - déjà concernés par le gel du point d'indice - ou des salariés du public. Quitte à un peu perdre son âme.

On reconnaît bien là le style de François Hollande, apôtre de la réforme tranquille et cherchant toujours à renoncer à tout ce qui peut faire réellement polémique.


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