La menace d’un débordement de la Seine plane sur les finances publiques

Par Fabien Piliu  |   |  637  mots
Les Grands boulevards, en janvier 1910
Selon l’OCDE, une inondation majeure de la Seine pourrait potentiellement affecter 5 millions de citoyens de la métropole francilienne. Le coût des dégâts pourrait grimper jusqu’à 30 milliards d’euros. Les finances publiques seraient directement impactées si la Seine devait sortir de son lit.

Sera-t-il plus facile de mettre Paris en bouteille si la Seine déborde ? L'OCDE ne répond pas à cette question totalement farfelue. En revanche, les experts du Château de la Muette ont estimé les conséquences économiques d'une crue comparable à celle observée en 1910, qui fut le dernier évènement de ce type subi par la capitale.

Pour quelles raisons l'OCDE s'est-elle penchée sur ce phénomène ?

" La métropole francilienne est fortement exposée au risque d'une inondation par débordement de grande ampleur de la Seine, telle que celle qui s'est produite en 1910. Une crue majeure, au cœur de la plus importante métropole économique d'Europe continentale, pourrait causer des dégâts considérables. Les récentes inondations en Europe et celles causées en 2012 à New York par la tempête Sandy ont souligné la vulnérabilité des grandes villes modernes et toujours plus dense, et le besoin d'adapter les infrastructures critiques au risque d'évènements climatiques extrêmes ", explique l'étude de l'OCDE.

Des dégâts estimés à 30 milliards

Une inondation majeure de la Seine pourrait affecter 5 millions de citoyens à Paris et ses alentours. Les dommages sont estimés par l'OCDE à entre 3 à 30 milliards d'euros pour les dommages directs selon les scénarios d'inondation, assortis d'une réduction significative du PIB qui atteindrait sur cinq ans de 1.5 à 58.5 milliards d'euros. Bien évidemment, l'activité des entreprises serait aussi impactée. La réduction de leur activité affecterait la demande en main-d'œuvre jusque 400 000 équivalents temps plein dans le cas extrême.

" Même si le rebond d'activité pourrait réduire certains de ces effets rapidement après une année, les conséquences dommageables d'une crue majeure de la Seine pourraient se faire sentir à long terme et peser sur les finances publiques. Dans le cas où l'impact dépasserait les réserves disponibles pour y faire face via le régime d'indemnisation CatNat, l'État serait conduit à jouer pleinement son rôle de garant de dernier ressort ", explique l'Organisation, rappelant que la Seine avait mis plusieurs semaines pour retourner dans son lit en 1910.

En 2013, les réserves du régime d'indemnisation étaient évaluées à 5,7 milliards d'euros. Il couvre l'ensemble des dommages privés et des entreprises affectés directement par l'inondation, y compris les pertes d'exploitation des entreprises, " pour autant que ces dernières soient assurées contre les pertes d'exploitation en garantie incendie ", précise l'OCDE

Au-delà de ce montant, la garantie d'État serait automatiquement activée pour financer les autres dommages et les pertes couvertes par ce régime sur le budget de l'État, affectant ainsi les dépenses publiques.

Un record en 2011

A titre de comparaison, le coût économique des dégâts provoqués par le passage de l'ouragan Sandy sur New-York et une partie de la cote est des États-Unis en 2012 avait dépassé les 80 milliards de dollars.

Au total, cette année-là, les catastrophes naturelles avaient coûté 160 milliards de dollars selon l'assureur allemand Munich Re. Un montant à comparer aux 400 milliards de dégâts enregistrés en 2011, année notamment marquée par le tsunami au Japon.

Une quinzaine de recommandations

Pour limiter les conséquences d'un débordement de la Seine, l'OCDE formule une quinzaine de recommandations. La plupart d'entre elles insistent sur la nécessité d'anticiper l'évènement. Ainsi, l'institution suggère de placer les infrastructures de protection face à une crue sous la responsabilité d'un maître d'ouvrage unique ; d'accompagner la stratégie locale de gestion des risques d'inondation de la Seine en Île-de-France par une stratégie financière claire ; de poursuivre l'effort de clarification des critères de priorisation des investissements de l'État dans la prévention des risques ; et de renforcer la culture du risque des citoyens, des décideurs et des entreprises.