Ce que pense la presse étrangère du gouvernement Valls

Par latribune.fr  |   |  1027  mots
Le gouvernement Valls 1 rassemble 16 ministres, dont seulement deux nouvelles têtes, Ségolène Royal et François Rebsamen.
Les titres de presse étrangère ont immédiatement réagi à l'annonce du nouveau gouvernement. Ils en retiennent surtout un resserrement à gauche, la promotion du protectionniste Arnaud Montebourg à l'Economie, et le retour de Ségolène Royal.

La composition du gouvernement Valls est loin d'être une affaire franco-française. Lourde de sens pour l'Union européenne, elle a suscité de vives réactions chez nos voisins ainsi qu'outre-atlantique. Après avoir largement spéculé sur les possibles scénarios de remaniement, les titres de presse étrangère livrent leurs analyses de la nouvelle équipe présentée mercredi 2 avril.

Financial Times: Montebourg menace "les engagements pro-business" de Hollande

Pour le quotidien britannique, le gouvernement Valls, composé "essentiellement de ministres déjà en place", est un mélange "d'alliés proches (de Hollande) et de personnalités incontournable du parti". Il témoigne d'un "resserrement à gauche" et devrait "décevoir" ceux qui espéraient que le Président saisirait l'occasion pour "faire entrer des outsiders, comme Pascal Lamy".

Le "FT" s'inquiète notamment de la promotion d'Arnaud Montebourg, "partisan radical de l'intervention de l'Etat et détracteur acharné des politiques d'austérité de Berlin", à la tête d'un vaste ministère de l'Economie. Une nomination qui "menace de jeter la confusion sur les récents engagements pro-business de Hollande".

Wall Street Journal: "les différents courants socialistes" sont satisfaits

Pour le quotidien financier américain, la nouvelle équipe gouvernementale rassemble des "poids lourds du parti" - parmi lesquels "la mère des enfants de Hollande" - et établit "un équilibre entre les différents courants socialistes". Il insiste sur le "triple challenge" que devra relever le gouvernement Valls : "relancer la croissance à travers des baisses d'impôts""renverser la courbe du chômage" et "regagner un électorat de gauche déçu".

Le quotidien rappelle par ailleurs que le nouveau ministre des Finances, Michel Sapin, qui aura la tâche de négocier une plus grande flexibilité budgétaire auprès de Bruxelles, "a mené à bien de nombreuses promesses de campagne" de François Hollande, mais "a connu moins de succès (...) quant à la lutte contre le chômage".

Die Welt : une regrettable "mise à l'écart de Moscovici"

A l'instar du WSJ, le journal allemand insiste surtout sur le passage de Michel Sapin au ministère des Finances et sur la lourde tâche qui l'attend "d'expliquer à ses collègues de Bruxelles pourquoi la France n'a pas réduit son déficit." Et le quotidien de déplorer "la mise à l'écart de Pierre Moscovici qui avait noué une relation enrichissante avec Wolfgang Schäuble", son homologue allemand.

Süddeutschezeitung : Valls est "un coup de Poker"

Pour le quotidien bavarois, ce remaniement ministériel est une partie de cartes : François Hollande, "le prudent tacticien tente un coup de poker et mise toutes ses chances sur une seule carte. Le joker s'appelle Valls." Un mauvais calcul estime le journal, car "François Hollande devient dépendant de son plus grand vassal. Le chef d'Etat le plus impopulaire de l'histoire de la Ve République, s'est risqué à faire du ministre préféré des Français le numéro 2".

Ségolène Royal, coqueluche des journaux allemands

Ce qui retient également l'attention de la presse allemande, c'est le retour de Ségolène Royal sur le devant de la scène politique. Les journaux n'hésitent pas à faire dans le people. "La revanche de l'ex" titre le très sérieux Frankfurter Allgmeneine Zeitung, tandis que Le Spiegel synthétise plus sobrement "Ségolène royal fait son retour au gouvernement".

Il Sole 24 Ore : équilibre entre le "volcanique" Montebourg et le "fidèle" Sapin

Le quotidien économique italien prévoit "des relations mouvementées entre Paris et Bruxelles", à cause de la nomination d'Arnaud Montebourg, "le prophète volcanique du patriotisme économique" et "militant du "non" à la Constitution européenne en 2005".

Il Sole 24 Ore souligne toutefois que François Hollande et Manuel Valls ont fait en sorte "d'équilibrer la situation à Bercy" par la nomination de Michel Sapin aux Finances, "fidèle aux politiques d'assainissement du bilan". Si Montebourg correspond parfaitement au "gouvernement de combat" voulu par le président français et est le "grand vainqueur" du remaniement, Sapin, lui, fort de son expérience en économie, est une garantie.

La Stampa : Economie à deux têtes ; et "vengeance tardive" de Ségolène Royal

Le quotidien de Turin insiste également sur "une forte discontinuité dans l'économie, dont la gestion est partagée entre deux différents dicastères", et met en avant les différences entre Arnaud Montebourg, "ennemi de l'austérité et partisan du patriotisme économique comme de l'interventionnisme publique", et Michel Sapin, chargé des relations avec les adeptes de la rigueur, notamment l'UE et l'Allemagne. 

Le quotidien souligne aussi le retour sur la scène politique de Ségolène Royal, "confinée dans les limbes après sa défaite" aux présidentielles de 2007. Il s'agit "une vengeance tardive, puisqu'elle est rappelée juste au moment où le parti verse dans des difficultés bien plus graves que celles qui lui étaient imputées à l'époque", analyse le journal italien.

El Pais: Montebourg, "fléau de la Commission européenne" et "germanophobe furibond"

Comme ses homologues italiens, le quotidien espagnol pro-européen considère que "la nouveauté la plus marquante" est le "changement d'équipe économique" avec la sortie du "libéral Moscovici" et la promotion du très "polémique et protectionniste" Arnaud Montebourg.

Le journal n'hésite pas à qualifier le nouveau ministre de l'Economie de "fléau de la Commission européenne", "champion de l'antimondialisation", "germanophobe furibond" et "eurohostile". Arnaud Montebourg, qui a "une clef de lecture personnelle" de l'Europe, "ne sera cependant pas la voix de la France à Bruxelles", rappelle El Pais, puisque cette fonction reviendra au "compagnon de service militaire de Hollande", Michel Sapin, ministre des Finances.

El Mundo: "L'unique nouvelle", c'est Royal qui "sort de son couvent"

Le quotidien espagnol de centre-droit reste relativement avare en analyse générale sur le gouvernement Valls, qui présente "très peu de nouvelles têtes", mais consacre deux articles à Ségolène Royal, "l'unique grande nouvelle" de ce remaniement. Il s'interroge avec ironie sur la capacité du Président et de "son ex-compagne de 30 ans" à gérer leur relation au travail maintenant que celle-ci est "sorti de son couvent".