Emprunts toxiques : "Ce projet de loi n'est pas une amnistie pour les banques" (Eckert)

Par latribune.fr  |   |  661  mots
Une grande partie de l'UMP et le RDSE (à majorité PRG), à une exception, se sont abstenus tandis que 22 centristes étaient contre, 3 pour et 3 se sont abstenus.
Le Sénat a donné son feu vert à un projet de loi visant à sécuriser les contrats de prêts structurés. Le texte a été voté par 138 voix pour et 48 contre.

"Ce projet de loi n'est pas une amnistie pour les banques", a déclaré mardi le Secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert à propos du texte adopté au Sénat, visant à sécuriser les contrats de prêts structurés souscrits principalement par les collectivités, afin d'écarter un risque sur les finances publiques pouvant s'élever à 17 milliards d'euros. Et d'assurer: "Il est destiné à protéger l'État, et donc les contribuables".

Dans le détail, le projet de loi a été voté par 138 voix pour, notamment socialistes et écologistes, et 48 contre, en particulier le groupe Communiste, républicain et citoyen (CRC). Une grande partie de l'UMP et le RDSE (à majorité PRG), à une exception, se sont abstenus tandis que 22 centristes étaient contre, 3 pour et 3 se sont abstenus.

Remplace un dispositif de la loi de finance 2014

Il remplace un premier dispositif de la loi de finances 2014, censuré par le Conseil constitutionnel, qui validait rétroactivement le défaut de mention du taux effectif global (TEG) dans les prêts aux collectivités locales et établissements publics locaux, dont le coût s'est avéré prohibitif pour ceux-ci.

Le Conseil constitutionnel a reproché à ce dispositif d'avoir "une portée très large", insuffisamment ciblée, car il portait sur tous les contrats de prêts et concernait toutes les personnes morales.

Aussi "le gouvernement s'est assuré de la constitutionnalité du dispositif qu'il vous propose aujourd'hui", a souligné le secrétaire d'Etat au budget Christian Eckert. "La validation législative concerne exclusivement les personnes morales de droit public, les emprunts structurés et non plus l'ensemble des emprunts, et elle est limitée au défaut ou à l'erreur de mention du taux effectif global (TEG)", a-t-il ajouté, précisant qu'"elle ne prive nullement les collectivités territoriales des armes dont elles disposent sur le terrain du défaut de mise en garde".

Ce n'est pas une amnistie pour les banques

"Le moment est venu pour les banquiers de faire un petit effort pour que les comptes publics des collectivités, ne soient pas grevés de charges financières indues", a jugé Marie-France Beaufils (CRC). "C'est donc par le rejet de ce texte que nous pourrons mener, avec une efficacité renouvelée, la lutte contre les déficits de nos finances publiques", a-t-elle dit.

Tout en dénonçant un dispositif "non équilibré", Fabienne Keller a annoncé que son groupe UMP s'abstenait "car nous sommes très réservés sur le maintien d'un risque lourd pour les collectivités locales, hôpitaux et HLM".

Des collectivités territoriales, mais aussi des hôpitaux ou des organismes HLM, ont conclu des contrats de prêts structurés à partir des années 2000, attirés par un coût du crédit initialement faible, le risque réel étant masqué par la complexité de ces produits, et encouragés par des banques "dont les pratiques commerciales se sont révélées parfois agressives", a souligné le rapporteur Jean Germain (PS).

10 milliards d'euros de prêts

Ces prêts représentent aujourd'hui un encours total estimé à 10 milliards d'euros, dont les trois quarts sont portés par Dexia et la Société de financement local (SFIL).

Le tribunal de grande instance de Nanterre a considéré que le contrat entre la banque et une collectivité devait respecter certaines formalités, dont la mention du TEG, a rappelé Jean Germain. "A défaut, le taux d'intérêt légal (0,04 % en 2014) se substitue au taux d'intérêt prévu, pour toute la durée du contrat et de manière rétroactive".

Cette substitution entrainerait une perte pour Dexia et la SFIL estimée à 10 milliards d'euros. La viabilité de la SFIL pourrait être menacée, ce qui pourrait représenter un coût supplémentaire pour l'Etat de 7 milliards d'euros.

Le dispositif consacre aussi la création d'un fonds de soutien aux collectivités de 1,5 milliard alimenté à 61% par les banques et le reste par l'Etat.