"Cette réforme territoriale ignore la culture des territoires" (Fabienne Keller, UMP)

Par Propos recueillis par Fabien Piliu  |   |  520  mots
"Cette réforme territoriale ne tient pas compte du passé des territoires, de leur présent et ne dessine aucun futur concret", estime Fabienne Keller, la sénatrice UMP du Bas-Rhin.
Fabienne Keller, la sénatrice UMP du Bas-Rhin, rappelle, dans cet entretien accordé à La Tribune, les enjeux de la réforme territoriale examinée en seconde lecture par le Sénat mardi et mercredi. elle détecte de nombreuses insuffisances au texte voté en juillet par l'Assemblée nationale et soutenu par le gouvernement. Interview.

La Tribune. La réforme territoriale peut-elle encore évoluer ?

Fabienne Keller. Je le souhaite vivement. Le Sénat est prêt à enrichir le texte pour le faire évoluer positivement, pour le bien de tous les Français.

Matignon soutient pourtant le projet de loi modifié et voté par l'Assemblée nationale et qui dessine une France à treize régions.

Je ne peux pas penser que le Premier ministre et son gouvernement prennent une seconde le risque d'écarter les propositions du Sénat. Ce serait un mépris total pour les milliers d'élus qui sont au quotidien aux côtés des citoyens. Le texte voté par l'Assemblée nationale n'est pas parfait. Le gouvernement doit entendre la voix du Sénat, apaisée mais forte.

Quelles sont les modifications que vous souhaitez apporter au texte ?

Il faut amender l'article 1A pour redonner plus de pouvoir aux communes et aux départements, notamment dans le domaine financier. Concrètement, il faut défendre et renforcer le rôle de nos différents échelons de collectivité, l'intercommunalité ne s'inscrivant que dans une logique de subsidiarité.

Pour quelles raisons le Sénat veut-il porter de treize à quinze le nombre de régions ?

Pour une raison simple. La carte votée par les députés ne correspond pas vraiment à la réalité du terrain, à la vie économique des territoires, à leur histoire et à leur futur. C'est le cas des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon qui n'ont pas besoin de fusionner pour exister et rayonner, mais aussi de l'Alsace qui peut suivre son chemin seule tout en travaillant en bonne intelligence avec les autres régions du grand Est. Nous l'avons notamment prouvé lors des phases 1 et 2 du TGV Est. Tout le monde se félicite de cette coopération.

Pourquoi l'Alsace joue-t-elle sa propre carte ?

Il faut bien avoir à l'esprit que nous n'avons pas attendu le projet de réforme du gouvernement pour travailler sur ce sujet. La région Alsace réfléchit depuis longtemps à son propre projet de développement, ce qui ne l'empêche pas de travailler très intelligemment avec les régions Champagne-Ardenne et Lorraine. Depuis plus de cinq ans, la Région travaille sur le projet de collectivité territoriale unique par fusion de la région Alsace et des conseils généraux des Bas-Rhin et Haut-Rhin. Ce projet a été approuvé par plus de 55% des habitants de la Région lors du référendum organisé le 7 avril 2013, mais il a malheureusement échoué en raison d'une participation insuffisante.

Globalement, que vous inspire le projet de réforme du gouvernement ?

Il est incompréhensible. Cette réforme territoriale ne s'appuie sur aucune étude d'impact chiffrée. Il ignore la culture des territoires et les flux migratoires. Il ne tient pas compte du passé des territoires, de leur présent et ne dessine aucun futur concret. A quoi sert la réforme territoriale souhaitée par le gouvernement ? On ne le sait toujours pas. Nous attendons toujours quelques précisions sur les futurs schémas économiques, de transport ou encore universitaires des prochaines régions.