Paris, capitale de la résistance mondiale contre le terrorisme

Par latribune.fr avec AFP  |   |  1246  mots
Paris est aujourd'hui la capitale du monde contre le terrorisme pour une journée historique. En accueillant une immense et très internationale manifestation d'hommage aux 17 personnes tuées cette semaine par trois jihadistes français, la France veut adresser un message de résistance et d'unité, en marchant de la République à la Nation. Dans le monde entier, des manifestations ont lieu au nom de la devise du pays : liberté.

« Et il est où, le Pape ? ». Voilà ce qu'auraient pu titrer avec leur ironie de « bouffeurs de curé » les dessinateurs assassinés de Charlie Hebdo à qui le monde va rendre en ce dimanche un hommage historique au nom de la liberté d'expression. Dirigeants du monde entier, partis politique, syndicats, groupes religieux juifs, chrétiens, musulmans, associations, personnalités vont accompagner dans une union sacrée une foule immense de probablement plusieurs centaines de milliers de personnes à Paris. Réunis par l'émotion suscitée par les deux agressions terroristes qui ont frappé le journal Charlie Hebdo, des policiers et 4 clients d'une épicerie kasher. A n'en pas douter, ce 11 janvier 2015 sera, avec sa marche républicaine, un jour historique.

"Paris est aujourd'hui la capitale du monde", a lancé François Hollande dimanche aux membres du gouvernement réunis à l'Elysée avant de se rendre à la marche républicaine contre le terrorisme, a indiqué son entourage. "Le pays tout entier va se lever vers ce qu'il a de meilleur", a poursuivi le chef de l'Etat,

Une mobilisation internationale massive

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, le président palestinien Mahmoud Abbas et le couple royal jordanien ont annoncé leur venue à Paris pour se joindre à François Hollande. De même que le président ukrainien, Petro Porochenko, et le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov. Participeront aussi huit présidents africains et les plus hauts dirigeants européens, d'Angela Merkel à David Cameron, de Mariano Rajoy à Jean-Claude Juncker. Le président des Etats-Unis, Barack Obama, ne sera pas présent,. Mais Washington est solidaire de Paris: "Aucun acte de terrorisme n'arrêtera jamais la marche de la liberté", a salué dimanche le secrétaire d'Etat, John Kerry.
Au total, ce sont près de 50 dirigeants et responsables étrangers que François Hollande, omniprésent sur tous les fronts de la crise depuis mercredi, devrait recevoir auparavant à l'Elysée. C'est la première fois, depuis François Mitterrand, en 1990, après la profanation du cimetière juif de Carpentras, qu'un président français participe ainsi à une manifestation de rue.

Le défilé, avec deux parcours pour permettre de drainer la foule immense, est prévu entre République (15H00) et Nation, deux grandes places de l'est parisien distantes de trois kilomètres. Les journaux français lancent dimanche un appel unanime pour la défense des libertés et à la "résistance", quelques heures avant la marche parisienne.
Ainsi, Le Monde appelle à "marcher contre la terreur", le Journal du Dimanche souligne que "Le monde se lève", alors qu'Aujourd'hui en France/Le Parisien titre: "Ensemble". Libération paraît exceptionnellement avec en Une le "Je suis Charlie" emblématique de la mobilisation des Français.

A l'Elysée, on a salué à la fois "la mobilisation internationale exceptionnelle" et l"'union nationale". Mais a-t-on ajouté, il s'agit d'abord du "rassemblement du peuple français". Ce que confirme un sondage Ifop Paris Match publié samedi soir : 97% des Français jugent nécessaire de faire preuve d'unité nationale. A noter que seuls 17% des Français avouent avoir peur, après les attaques, selon un sondage Odoxa, pour Le Parisien Dimanche/Aujourd'hui en France.

Les familles des victimes doivent marcher en tête du cortège. Suivront le chef de l'Etat et les hôtes étrangers, puis les personnalités politiques françaises. Tous les partis seront là à l'exception du FN. Marine Le Pen, vexée de ne pas avoir été invitée formellement, a appelé à manifester en province et non à Paris. Elle-même sera à Beaucaire, une mairie d'extrême droite.

De nombreux rassemblements sont en effet également prévus en province, notamment à Lyon, Bordeaux, ou encore Reims. Comme samedi, des rassemblements doivent aussi avoir lieu à l'étranger, à Londres, Berlin ou Washington notamment. Les mobilisations impressionnantes samedi dans les grandes villes de province - 700.000 personnes en tout, selon l'Intérieur, 120.000 dans la seule Toulouse - semblaient augurer de chiffres massifs, d'autant que la météo doit être clémente. "Plusieurs centaines de milliers" de manifestants, a prudemment avancé Bernard Cazeneuve, "des millions", s'est aventuré le Premier ministre Manuel Valls. Le record reste la liesse collective de quelque 1,5 million de personnes descendues dans les rues de la capitale pour la victoire au Mondial de football en 1998.

Manuel Valls a promis des mesures de sécurité à la hauteur. Elles seront draconiennes avec 2.200 hommes mobilisés, 10 stations de métro fermées, le stationnement interdit. Cette manifestation intervient alors que le plan Vigipirate est à son niveau le plus élevé - "alerte attentat" - en Ile-de-France. Dans le cadre de ce plan, 2.000 policiers et 1.350 militaires protègeront en outre les sites sensibles à Paris et son agglomération: sièges des médias, lieux de culte, écoles confessionnelles, bâtiments publics, représentations diplomatiques.

Car la menace n'a pas disparue. Dimanche matin, en Allemagne, un quotidien de Hambourg, qui avait publié des caricatures de Mahomet venant de Charlie Hebdo a été la cible d'une attaque avec un engin incendiaire, sans qu'il y ait eu de blessés.

François Hollande sur tous les fronts

La couverture médiatique devrait être elle aussi exceptionnelle, comme elle l'a été tout au long d'une crise qui a été comparée à un "11 septembre" français. Non pas par le nombre de morts, heureusement incomparable, mais par l'impact mondial qu'a eu l'agression délibérée contre un symbole, celui de la liberté de la presse, cœur de la démocratie.
Mais la journée de l'exécutif ne se résume pas à ce cortège. L'agenda de Hollande est sans répit. Il reçoit d'abord le matin, avec son Premier ministre, les représentants de la communauté juive, avec qui il devrait parler des conséquences en terme de sécurité de ce qu'il avait qualifié dès vendredi d'"acte antisémite effroyable" commis porte de Vincennes par un affidé de Daech. Il devait par ailleurs se rendre à la grande synagogue de la rue de la Victoire à 18h30.

A midi, le gouvernement sera réuni au grand complet à l'Elysée. Suivront à 13H00 les ex-présidents et ex-Premiers ministres. Dans la première catégorie, seul son prédécesseur Nicolas Sarkozy a accepté l'invitation, déclinée par les octogénaires Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac. Mais les ex-chefs de gouvernement seront au complet, de Michel Rocard à Jean-Marc Ayrault, en passant par Alain Juppé.
François Hollande accueillera aussi à l'Elysée dirigeants internationaux et personnalités françaises et se rendra ensuite avec eux à la marche républicaine.

Son ministre de l'Intérieur aura aussi fort à faire, outre la sécurisation du cortège monstre sur fond de nouvelles menaces formulées contre la France. Ainsi qu'une réunion internationale sur le terrorisme avec 11 ministres de l'Intérieur européens et le ministre américain de la Justice, Eric Holder, proche de Barack Obama. Après ces temps d'hommage, de deuil et de communion viendront sans nul doute celui des débats, des mises en cause, des doutes sur les systèmes de sécurité où, a admis M. Valls, il y a eu "des failles" dans l'organisation du système français de renseignement et de prévention du terrorisme. Des moyens nouveaux seront sans doute dégagés et l'arsenal législatif français pourrait être renforcé.

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 >>> LIVE À partir de 14h30 sur LCP et LCP.fr : émission spéciale consacrée à la marche républicaine organisée à Paris.