Polémique en France autour de l'examen des budgets nationaux par Bruxelles

Par latribune.fr avec Reuters  |   |  600  mots
La France a émis des réserves sur la proposition de la Commission européenne d'examiner les budgets nationaux des Vingt-sept en amont de leur adoption.

La France a émis des réserves mercredi sur la proposition de la Commission européenne d'examiner les budgets nationaux des Vingt-sept.  La Suède, de son côté, a fait savoir qu'elle y était opposée.

Afin de tirer les leçons de la crise grecque, la Commission  propose en effet une évaluation semestrielle des budgets nationaux en amont de leur adoption. Elle suggère également l'accélération de l'adoption de sanctions pour les pays violant les règles communautaires.

"Utile"

Devant les députés français, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a précisé avoir appelé le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, afin de "savoir quelle était la nature exacte de sa proposition". Olli Rehn "pense bien sûr à un avis et il n'est pas question dans son esprit d'examiner toutes les grandes lignes du budget de chacun des Etats, mais simplement d'avoir une indication concernant les directions adoptées et les soldes", a-t-elle expliqué lors des questions au gouvernement.

"Nous avons considéré qu'il était utile de croiser les documents, et notamment pour le Parlement d'examiner les Pactes de stabilité soumis par les Etats", a aussi indiqué la ministre de l'Economie.  La France est favorable à une meilleure coordination des politiques économiques, fiscales et budgétaires européennes, a rappelé de son côté le porte-parole du gouvernement. 

Anticonstitutionnelle ?

"Avoir vis-à-vis des autorités européennes un débat en amont pour fixer les objectifs communs, c'est sûrement nécessaire", a fait valoir Luc Chatel lors du compte rendu du conseil des ministres. Mais, a-t-il souligné, "c'est le Parlement qui vote le budget de la nation française, ce n'est pas la Commission européenne".  A l'instar du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, Luc Chatel a jugé "très important" de ne pas déposséder les Parlements nationaux de leurs prérogatives en matière de décisions budgétaires.

Gérard Larcher, le président du Sénat, est allé plus loin en jugeant "inconstitutionnelle" la proposition de Bruxelles au motif que c'est au Parlement d'approuver ou non le budget. Il s'est cependant dit favorable "à une autorité européenne indépendante qui puisse se pencher sur les comptes publics". "Ce n'est pas tellement illogique que dans une gouvernance économique, il y ait des procédures d'alerte", a-t-il indiqué.

Vers une Europe fédérale ?

Pour sa part, le rapporteur de la commission des Finances du Sénat, Philippe Marini, voit dans les propositions d'Olli Rehn une avancée de l'Europe fédérale, ce qui n'est pas sa "tasse de thé". "Je crois que ce pays comme les autres devrait être suffisamment lucide pour faire ses propres choix, ses propres arbitrages sans y être forcé par des gens venus d'ailleurs et qui peuvent exprimer d'autres intérêts que les nôtres", a-t-il estimé.

A l'heure actuelle, les Parlements se bornent à respecter - ou non - la règle d'un déficit plafonné à 3% du produit intérieur brut. Quand cette dernière est dépassée, les Etats reçoivent une protestation de la Commission. Pour calmer les marchés inquiets des dettes de certains pays européens, l'heure est à la rigueur budgétaire : le Premier ministre espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero a annoncé mercredi de nouvelles mesures d'austérité qu'il avait encore exclues il y a quelques jours. Le nouveau gouvernement de coalition britannique dirigé par le conservateur David Cameron vient par ailleurs de faire de la réduction de son déficit colossal (12% du PIB, comme la Grèce) sa priorité.