La BCE décide de doubler son capital

Par Frank Paul Weber et Séverine Sollier  |   |  691  mots
La BCE a décidé ce jeudi d'augmenter son capital de 5 milliards d'euros. Il s'agit d'un doublement puisqu'elle le porte ainsi à 10,76 milliards d'euros. La Banque de France y participera à hauteur de 711 millions d'euros. Ayant accumulé pour 72 milliards d'euros d'emprunts d'Etat grecs, irlandais, espagnols et irlandais depuis mai, la BCE couvrera ainsi mieux un risque de défaut de ces Etats.

Le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) a décidé ce jeudi matin de quasiment doubler son capital. "La BCE a décidé d'augmenter son capital souscrit de 5 milliards d'euros, le portant de 5,76 milliards à 10,76 milliards d'euros, avec effet au 29 décembre 2010" a annoncé l'institution de Francfort dans un communiqué à 15 heures.

Bien qu'officiellement les "sages" de Francfort nient un lien direct entre cette opération sur le capital de la BCE et l'actuelle crise de la dette de plusieurs pays membres de la zone euro, ce doublement est aussi à voir dans le contexte des plus grands risques que la banque a du inscrire à son bilan depuis mai dernier.

La BCE a en effet acquis depuis le large plan de sauvetage décidé pour aider la Grèce et d'autres éventuels pays en difficulté pour quelque 72 milliards d'euros d'emprunts grecs, portugais, irlandais et espagnols, ce qui a pour effet d'abaisser les taux de ces obligations et de réduire le coût de refinancement de ces Etats.

Mais dans le cas d'une faillite de ces Etats, la BCE et les banques centrales nationales qui la composent (dont la Banque de France et la Bundesbank) devraient supporter des pertes importantes.

Implicitement la BCE reconnaît que l'augmentation de capital actée ce jeudi permettra à son Conseil des gouverneurs "d'augmenter ses provisions d'un montant équivalent à l'augmentation de capital, en commençant avec une allocation d'une partie de ses bénéfices de cette année", indique-t-elle dans son communiqué.

L'augmentation de capital se fera en trois tranches égales de 1,16 milliard d'euros, prévues à fin décembre 2010, 2011 et 2012. Elle est souscrite exclusivement par les banques centrales nationales (BCN) qui font partie du Système européen des banques centrales (SEBC).

La Banque de France devra souscrire 14,22 % de cette augmentation soit un montant d'un peu plus de 710 millions d'euros. Conformément à la même clé de répartition, la Bundesbank allemande versera 947 millions d'euros pour participer à cette augmentation de capital de la BCE.

Si formellement ce sont les banques centrales nationales qui souscrivent à ce doublement de capital, l'opération pourrait avoir un impact financier non négligeable sur les comptes publics des pays européens concernés.

Ainsi la Banque de France devrait dégager 711 millions d'euros à verser au capital de la BCE. Cette année, la Banque de France a versé à l'Etat français un dividende de 1,702 milliard d'euros sur un résultat net sur l'exercice 2009 de 2,473 milliards d'euros (égal à 13 millions près à son bénéfice net de 2008).

Reste à voir si ces 711 millions seront pris sur les réserves de la Banque de France (du coup mécaniquement réduites d'autant) ou bien si la banque centrale française puisera dans son bénéfice net pour honorer l'augmentation de capital. Dans ce cas cela devrait réduire nettement le dividende reversé à son actionnaire, l'Etat français.

Plus simplement la Banque de France pourrait tout simplement procéder à une réallocation de certains de ses placements vers le capital de la BCE, il ne s'agirait donc que d'actifs changeant d'affectation, sans impact sur les comptes publics ou sur le résultat net de la Banque de France.

Côté allemand, il devrait en être de même, à mois que l'augmenation de capital soit financée en ponctionnant le bénéfice annuel versé par la Bundesbank au budget fédéral de l'Etat allemand.

Les banques centrales nationales de la zone euro verseraient leur contribution en trois fois. Les autres banques centrales des pays de l'Union européenne qui n'ont pas adopté la monnaie unique participeront également à l'augmentation de capital en une seule fois le 29 décembre de cette année.

L'objectif de la Banque centrale européenne est de faire face à la volatilité des "taux de change, des taux d'intérêts et des risques de crédit". "Si on se place dans une perspective à plus long terme, cette augmentation de capital - la première en douze ans - s'explique également par le besoin d'afficher une base de capital adéquat dans un système financier qui a crû de manière considérable", a précisé la BCE.