Une plainte contre la famille Ben Ali est en préparation en France

Par Xavier Harel  |   |  499  mots
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Les associations Transparency International et Sherpa s'apprêtent à déposer plainte pour "recel de détournement de fonds publics" contre Ben Ali et son entourage familial, sur le modèle des plaintes déposées contre trois chefs d'Etats africains.

Après les familles Bongo (Gabon), Sassou (Congo-Brazzaville) et Obiang, c'est au tour de la famille Ben Ali d'être visée par une plainte. Selon nos informations, l'association Transparency International France, présidée par l'ancien directeur du Trésor Daniel Lebègue, et l'association Sherpa, présidée par l'avocat William Bourdon, s'apprêtent à déposer - ce lundi ou mardi - une plainte simple pour "recel de détournement de fonds publics" contre le président déchu Ben Ali et son entourage familial.

Les deux associations, à l'origine de la plainte contre trois chefs d'Etats africains, doutent sérieusement de la détermination des autorités françaises à saisir les biens immobiliers et mobiliers amassés par la famille de Ben Ali en France.

En vingt ans trois ans de règne, la famille de Leïla Trabelsi, épouse du chef de l'Etat, a mis la main sur des pans entiers de l'économie tunisienne et accumulé une fortune colossale. Ils possèdent notamment de nombreux biens immobiliers en France. Selon les services secrets français, Leïla Trabelsi aurait quitté la Tunisie pour Dubaï avec une tonne et demi d'or à bord de son avion. Un télégramme diplomatique de l'ambassade des Etats-Unis à Tunis de 2009 révélé par Wikileaks qualifiait en outre le régime de Ben Ali que "quasi mafia".

Les auteurs de la plainte doutent de la volonté de Paris de restituer à la Tunisie les avoirs détournés par la famille Ben Ali au cours de ses vingt-trois ans de pouvoir. L'annonce ce week-end d'un gel des avoirs de la famille Ben Ali en France était surtout un exercice de communication de l'Elysée

La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a en effet précisé ce lundi que les avoirs tunisiens dans les banques françaises étaient sous "vigilance particulière", mais qu'il n'y avait pas de "gel des avoirs" car cela nécessitait une décision judiciaire ou internationale. La France fut pourtant le premier pays à ratifier la convention des Nations-Unies sur la restitution des avoirs détournées. Cette convention, dite Merida, pose le principe d'une coopération internationale en matière de blocage et de restitution d'avoirs volés dans le cadre d'acte de corruption par des dirigeants politiques ou d'entreprises. Mais pour agir, la France doit être saisie par la Tunisie.

Pourquoi ne pas attendre que la Tunisie ne saisisse la France ? "Deux précautions valent mieux qu'une", explique Daniel Lebègue qui constate avec regret que "le ministère de l'Economie n'a toujours pas donné d'instruction au secteur bancaire pour geler les comptes de la famille Ben Ali".

"A l'heure actuel nous n'avons pas autant d'informations que sur les familles Bongo, Sassou ou Obiang mais nous n'aurons aucune difficulté à réunir des preuves", poursuit Daniel Lebègue.

La famille Trabelsi est honnie en Tunisie où elle incarne l'impunité et le pillage du pays. Plusieurs villas des Trabelsi ont été mises à sac et incendiées ce week-end.