La Tunisie compte pourchasser le clan Ben Ali - Trabelsi qui a racketté le pays

Par Source Reuters  |   |  759  mots
Infographie La Tribune
L'entourage familial du président déchu contrôlait une grande partie des secteurs économiques. Les autorités tunisiennes ont arrêté Imed Trabelsi, un neveu du président tunisien déchu Zine ben Ali. Malgré tout, les manifestations contre le Premier ministre Mohamed Ghannouchi continuent.

Les autorités tunisiennes ont arrêté Imed Trabelsi, un neveu du président tunisien déchu Zine ben Ali, et poursuivront les autres membres recherchés de la famille Ben Ali, a annoncé vendredi le ministre de l'Intérieur, Ahmed Friia. Lors d'une conférence de presse retransmise par la télévision tunisienne, le ministre a souligné que "fuir la Tunisie ne les aiderait pas". "La Tunisie est liée par des traités avec des pays partout dans le monde", a-t-il ajouté.

Le gouvernement d'union nationale a annoncé cette semaine que 33 membres de la famille Ben Ali avaient été arrêtés mais n'en avait pas identifié un seul jusqu'à vendredi. Imed Trabelsi, membre de la famille de l'épouse de l'ex-président, Leïla, est soupçonné d'avoir volé le yacht d'un homme d'affaires français. Sa villa, comme celles d'autres membres de la famille, a été pillée et vandalisée après la chute de Ben Ali.

Malgré tout, des milliers de Tunisiens sont descendus dans les rues samedi pour exiger de nouveau le départ du gouvernement d'union nationale des anciens membres du parti de Zine ben Ali et la démission du Premier ministre Mohamed Ghannouchi. Des centaines de manifestants ont franchi un cordon de police déployé devant les bureaux où le Premier ministre avait, samedi matin, réuni ses ministres. "Pas de place pour les hommes du tyran dans un gouvernement d'union nationale", pouvait-on lire sur une banderole.

Dans une interview télévisée vendredi soir, le Premier ministre, à la tête du gouvernement depuis 1999, s'est engagé à quitter la vie politique à l'issue des prochaines élections. Cette promesse visait à calmer la colère d'une partie de la population, furieuse de la présence au sein de la nouvelle équipe dirigeante d'anciens membres du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti de l'ancien président Ben Ali, contraint par la rue de quitter le pays après 23 ans de pouvoir sans partage. "Nous sommes sûrs que (les dirigeants arabes) seront tous avec le peuple tunisien, parce que ce qui s'est produit, c'est une véritable révolution qui nous a rendus fiers de notre pays", a dit Ghannouchi.

L'annonce de son départ après les prochaines élections n'a pas suffi à apaiser les manifestants. "Nous voulons rappeler à Mr Ghannouchi la définition du mot 'révolution' - cela signifie un changement radical et non le maintien du même Premier ministre", déclarait l'un d'entre eux. "Depuis 1990, Ghannouchi a été ministre des Finances puis Premier ministre", a renchéri un étudiant, Firass Hermassi. "Il sait tout, il est complice". Ghannouchi a assuré vendredi que la Tunisie indemniserait les familles des victimes de l'ancien régime et enverrait des émissaires pour poursuivre le président déchu, qui a fui le pays le 14 janvier.

Une prise de distance avec l'ancien régime beaucoup trop tardive, aux yeux d'Ahbid Dridi, un manifestant. "Nous avons besoin de gens avec une nouvelle mentalité. Des personnes avec des mains sales ne peuvent pas mettre en place un programme propre. Il doit s'excuser et partir."

"RÉCONCILIATION NATIONALE"

Dans les rangs du cortège, on notait la présence de membres de la police, de la garde nationale, et des pompiers qui ont pris leur distance avec l'ancien président. "Nous sommes dans les rues aujourd'hui parce que nous voulons la réconciliation nationale", indique un policier qui se présente sous le nom d'Hatem.

Ben Ali a utilisé pendant longtemps la police et les forces de sécurité intérieure comme un outil de répression de l'opposition. "Nous sommes innocents du sang des martyrs", ont scandé certains des policiers venus manifester samedi, deuxième des trois jours de deuil national en hommage aux dizaines de manifestants tombés pendant la "Révolution du jasmin".

Selon le gouvernement, il y a eu 78 morts en un mois, tandis que les Nations unies parlent d'une centaine de victimes. Depuis sa formation au début de la semaine, le gouvernement tunisien a notamment annoncé une amnistie générale pour les prisonniers politiques et la reconnaissance de tous les partis politiques, y compris l'opposition islamiste interdite sous Ben Ali. Mais des manifestants ont dénoncé le fait que, en dépit de l'amnistie promise, seules quelques centaines de personnes parmi toutes celles emprisonnées pour des raisons politiques ont été relâchées. Le nouveau gouvernement a par ailleurs annoncé que les écoles et les universités rouvriraient lundi et que les événements sportifs reprendraient prochainement.