Quand le Trésor américain rappelle les Européens à l'ordre

Par latribune.fr, avec Reuters  |   |  918  mots
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Le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, appelle les Européens à mettre un terme aux "propos inconsidérés" sur un possible démantèlement de l'euro. Selon l'agence Reuters, il a incité ses interlocuteurs du sommet de Wroclaw à démultiplier les capacités d'intervention du Fonds européen de stabilité financière (FESF). L'Allemagne s'est opposée à sa suggestion.

Invité de la réunion informelle des ministres européens des Finances à Wroclaw, en Pologne, Timothy Geithner, a tenu des propos fermes ce vendredi et fait une proposition concrète. Le secrétaire américain au Trésor a appelé les Européens à mettre un terme aux "propos inconsidérés" sur un possible démantèlement de l'euro. Il a engagé Américains et Européens à travailler plus étroitement pour surmonter la crise de la dette. D'autre part, il a pressé les Européens d'utiliser le principe d'un démultiplicateur pour maximiser la puissance de tir du Fonds "zone euro" et éteindre la crise de la dette, a indiqué à l'agence Reuters une "source de haut rang".

Soutenir l'action de la BCE

Le Fonds européen de stabilité financière (FESF) dispose actuellement d'une capacité de prêt de 440 milliards d'euros mais les analystes estiment que celle-ci devra être fortement relevée pour que le fonds puisse assumer ses futures missions de soutien aux banques et aux dettes souveraines de la zone euro. Renforcé, le FESF pourrait fournir des protections par exemple à la Banque centrale européenne (BCE) quand celle-ci rachète de la dette souveraine. L'Allemagne et d'autres pays se refusent pour le moment à une augmentation du fonds et les parlements nationaux doivent encore ratifier les nouveaux pouvoirs du FESF décidés par les dirigeants des Vingt-Sept le 21 juillet.

L'Allemagne opposée à la suggestion de Geithner

L'Allemagne refuse d'engager des fonds publics supplémentaires pour assurer la stabilité financière de la zone euro, comme l'y invite Timothy Geithner , a annoncé la ministre autrichienne des Finances Maria Fekter.  "Il a insisté sur le fait que plus de fonds étaient nécessaires afin d'éviter que le système (financier) se trouve en difficulté. (Wolfgang) Schaüble lui a répondu qu'il était très improbable qu'il soit possible de faire peser ce fardeau sur les contribuables, en particulier si ce fardeau est imposé principalement aux pays AAA", a-t-elle expliqué à quelques journalistes.

Désaccord sur la taxe financière

"Dans ces pays, il y a un désir de mettre en oeuvre une taxe sur les transactions financières (...) Il ( Geithner ) l'a exclu", a ajouté Maria Fekter.  "Je trouve bizarre qu'alors même que les Américains ont des fondamentaux bien plus mauvais que ceux de la zone euro, ils nous disent ce qu'on doit faire et que lorsque nous leur faisons une suggestion, ils disent non immédiatement (...) J'aurais espéré que lorsqu'ils nous disent comment ils voient le monde, ils écoutent ce que nous avons à leur dire", a encore dit la ministre.

L'action concertée des banques centrales rassure

Signe des inquiétudes croissantes que représente la crise de la dette pour la bonne santé de l'économie mondiale, Timothy Geithner a été invité de manière exceptionnelle à participer à la réunion de Wroclaw. Annoncée comme décisive en début de semaine, la rencontre se déroule dans un climat moins tendue qu'anticipé, grâce à l'intervention concertée des banques centrales européenne, britannique, suisse et japonaise visant à réintroduire des opérations de refinancement à trois mois en dollars. Les Bourses mondiales se sont inscrites en nette hausse après cette annonce jeudi et elles continuaient vendredi sur une note positive dans l'attente de décisions à Wroclaw. En milieu d'après-midi cependant, à Paris, l'indice Cac 40 s'est retourné à la baisse, tandis que l'Eurostoxx réduisait ses gains. Les Bourses de Francfort et Milan restaient cependant dans le vert.

Empêcher le gel du crédit

La réunion devait être en particulier l'occasion de faire un point d'étape des efforts grecs en vue d'obtenir la prochaine tranche d'aide internationale fin septembre et de se pencher sur la situation des banques européennes, qui doivent faire face à une intense pression des marchés depuis plusieurs semaines.

Selon des documents qui devaient servir de base aux discussions entre ministres, obtenus par Reuters, les fonds propres des banques doivent être renforcés et les établissements financiers doivent être protégés d'une "crise systémique" et d'une nouvelle crise du crédit. Il y est notamment fait mention d'un "risque de cercle vicieux entre la dette souveraine, le financement des banques et la croissance négative", qui pourra provoquer un gel du crédit.

S'assurer de l'exécution du plan grec

"Tandis que les tensions sur le marché de la dette souveraine se sont intensifiées et que les risques de financements bancaires ont augmenté pendant l'été, la contagion s'est propagée sur les marchés et les pays et la crise est devenue systémique", est-il indiqué dans l'un des documents. Au delà de la situation immédiate de la zone euro, les ministres devaient également se pencher sur son futur. "Nous allons vérifier si nous pouvons exécuter les décisions prises le 21 juillet (...) et si du côté grec on met véritablement en oeuvre le plan qui a été approuvé", a expliqué le ministre belge Didier Reynders.

La pomme de discorde des euro-obligations

"Mais après cela, il faudra parler du moyen terme. Le moyen terme c'est renforcer les moyens d'action budgétaire au sein de l'Union européenne et probablement aller vers de nouveaux instruments. Un jour ce seront des euro-obligations", a-t-il encore expliqué. Son homologue allemand, Wolfgang Schäuble, a toutefois rejeté cette idée en l'état et indiqué que les problèmes actuels devaient être résolus sur la base des traités en vigueur.