60% de la population en Europe sera obèse en 2050

Par Jérémie Pham-Lê  |   |  570  mots
L'obésité : une manne financière pour le commerce, un gouffre budgétaire pour les Etats. Copyright Reuters
L'obésité, qui touche 500 millions de personnes à travers le monde, redistribue les cartes de l'économie internationale. Dépenses colossales dans le domaine de la Santé et recettes florissantes des marchés émergents font de ce fléau un défi financier de taille pour les cinquante années à venir.

Faut-il grossir plus pour gagner plus? Selon un rapport publié jeudi par la Bank of America Merill Lynch, lutter contre l'obésité est devenu à la fois un investissement rentable pour les entreprises et un trou budgétaire pour la santé publique. Ce déséquilibre entre profit privé et déficit public devrait même s'accroître dans le futur, si l'on en croit les chiffres compilés par la banque américaine. Pays du fast-food, les Etats-Unis devraient atteindre un taux d'obésité de 51% d'ici 2030, si rien n'est fait. Pour l'Europe, l'avenir est loin d'être plus réjouissant : 60% de la population deviendrait obèse dès 2050. Même les pays émergents ne seraient pas épargnés par le phénomène. Ainsi, le Brésil, qui détient déjà un taux de 16% d'obésité, devrait atteindre le même niveau que les Américains aux alentours de 2020.

Facture salée pour les Etats

Avec de telles perspectives, BofA Merill Lynch a établi le coût moyen des dépenses en santé des Etats en matière de lutte contre l'obésité. En moyenne, un patient obèse nécessite pour son traitement 40% de frais en plus qu'un patient au poids normal. Aux frais médicaux classiques viennent s'ajouter tous les dépenses qui découlent indirectement de l'obésité : la dépression, la dépendance, le diabète ou plus grave, les cancers et les accidents cardio-vasculaires.

Aux Etats-Unis par exemple, les dépenses annuelles pour l'obésité sont estimées à 190,2 milliards de dollars (155 milliards d'euros), soit 21% du budget total de la Santé. D'ici 2027, elles pourraient augmenter de 59% selon les prévisions du Congressional Budget Office. En détail, cela représente environ 7.550 dollars (6.159 euros) par personne en frais de traitement.

Quant à l'Europe, elle atténue tant bien que mal ses pertes, avec une dépense pour l'obésité qui représente 7 à 8% du budget à la Santé. Mais l'inquiétude demeure : le nombre d'Européens obèses a triplé en l'espace de trente ans et ne ralentit toujours pas.

Une bonne oppportunité pour le secteur privé

Avec ce fléau, un nouveau marché florissant a émergé. Bon nombre d'entreprises commerciales se sont lancées dans des produits à destination spéciale des obèses. Du côté de la pharmaceutique, le bureau d'études estime que la vente de produits soignant l'obésité s'est élevée respectivement à 147 et 158 milliards de dollars (120 et 128 milliards d'euros) aux Etats-Unis et en Europe en 2010. Arena Pharmaceuticals, filiale américaine, est plébiscitée par le rapport pour son engagement contre l'obésité.

En ce qui concerne l'alimentaire, qui est à la fois la cause et la solution au problème de surpoids, les dépenses en produits «sains» sont estimées à 663 milliards de dollars (540 milliards d'euros) dans le monde entier pour l'année 2012. Les produits frais, eux, à 675 milliards de dollars (550 milliards d'euros). Cumulés, ces deux marchés s'accroissent plus vite que le PIB mondial ! Danone fait figure d'entreprise alimentaire exemplaire dans sa lutte contre l'obésité, selon l'évaluation de BofA Merill Lynch.

Attention toutefois à une trop grande montée du phénomène. Si la maladie peut être un marché porteur, ses conséquences indirectes peuvent également nuire à l'activité des entreprises. Le manque de mobilité et la montée de l'absentéisme, symptômes de l'obésité, entraînent une perte de productivité deux fois supérieure à celle liée au tabagisme...