Le bonheur se répand à travers le monde (paraît-il), selon l'Onu

Par Giulietta Gamberini  |   |  815  mots
Le bonheur rend les gents plus productifs, selon le World Happiness Report 2013 de l'Onu.
Le bonheur mondial augmente, sa répartition s'améliore, mais les Etats peuvent davantage intégrer ses facteurs clé dans leurs stratégies de développement économique et social. Telles sont les conclusions du Rapport 2013 sur le bonheur dans le monde, qui vient d'être publié par l'Onu.

Le Danemark est le pays le plus heureux du monde, suivi par la Norvège, la Suisse, les Pays-Bas et la Suède, qui décrochent une note moyenne de 7,5 sur 10. Le moins heureux (à la 156e place) est le Togo, précédé par le Bénin, puis par la République centrafricaine, le Burundi et le Rwanda, dont le score d'ensemble est inférieur à 3. Avec 6,8 points, la France occupe «seulement» la 25e place, dépassée (entre autres) par le Costa Rica, les Emirates arabes unis et le Mexique…

Ce sont quelques-uns des enseignements du World Happiness Report 2013 des Nations unies, qui vient d'être rendu public. Rédigé par une équipe d'économistes, psychologues et statisticiens, il assemble les données internationales disponibles exprimant comment les gens évaluent tant leurs émotions que l'ensemble de leurs vies. Avec l'objectif non pas tellement de classer les pays en fonction de leur niveau de bonheur, mais surtout de véhiculer une idée clé: la mesure du bien-être peut efficacement être utilisée afin d'apprécier le progrès national.

Le monde est de plus en plus heureux

Sur l'échelle de 1 à 10 utilisée par le rapport, la note moyenne (pondérée en fonction de la population) des 156 pays analysés est de 5,1. Généralement, malgré l'impact négatif prévisible de la crise de 2007-2008, le monde est devenu un peu plus heureux pendant les cinq dernières années et la distribution du bien-être a également progressé.

Le nivellement propre à la la mondialisation a néanmoins touché aussi le bonheur: sur les 130 Etats pour lesquels des données dans le temps sont disponibles, celui-ci a significativement augmenté dans 60 pays et empiré dans 41 entre 2010 et 2012 (par rapport à 2005-2007). Les améliorations ont surtout profité à l'Afrique sub-saharienne et à l'Amérique latine, les fléchissements ont touché les pays industrialisés, le Moyen-orient et l'Afrique du Nord. Le pays qui a gagné le plus en bonheur est l'Angola (+1,4), le plus grand perdant est l'Egypte (-1,1). La France a enregistré un - 0,05.

Six variables expliquent les trois quarts des différences, non seulement entre les pays mais aussi dans le temps: le produit intérieur brut (PIB) par habitant, l'espérance d'une vie saine, la possibilité de compter sur quelqu'un, la perception de sa propre liberté de choix, la liberté de la corruption, la générosité. L'analyse des quatre pays les plus affectés par la crise en Europe montre justement comment les effets de la conjoncture économique sur le bonheur peuvent bien dépasser ce qu'on pourrait déduire en considérant seulement les pertes en termes de revenus et l'augmentation du chômage. A contrario, en Asie du Sud, le bonheur a empiré malgré la croissance économique, contrebalancée par le déclin du soutien social et de la perception de la liberté de choisir sa vie. De même, bien que les cinq pays les plus heureux soient européens, l'ensemble de l'Europe occidentale est désormais dépassé non seulement par l'Amérique du Nord, mais aussi par l'Amérique latine, où pourtant le PIB par habitant (bien qu'en progression) est toujours inférieur.

Le bonheur devrait être mieux intégré dans les politiques publiques

Ces facteurs sont les éléments clé dont devraient tenir compte les décideurs publics, souligne le rapport. Si le bonheur a toujours été perçu comme une aspiration individuelle, il est en effet de plus en plus considéré comme un enjeu collectif, du moins depuis l'adoption, en juillet 2011, d'une résolution de l'Assemblée générale de l'Onu invitant les Etats à le mesurer et à en tenir compte afin de bâtir leurs politiques publiques. Le World Happiness Report, dont la première version a été publiée en 2012, est justement un résultat de ce processus.

Sa deuxième version insiste sur la variété des effets bénéfiques et communicatif du bonheur, les gens heureux vivant plus longtemps, étant plus productifs, gagnant mieux leurs vies et étant de meilleurs citoyens. Il montre d'ailleurs comment les politiques publiques en matière de santé, transports et éducation peuvent atteindre des conclusions différentes quand elles sont conçues en fonction du bonheur. Des développements sont aussi consacrés aux «guides» publiés en 2013 par l'OCDE.

Le meilleur exemple, étayé par le rapport, est celui de la santé psychique. Bien qu'elle constitue le facteur le plus important dans le sentiment du bonheur individuel, 10% de la population mondiale souffre encore de dépression ou d'anxiété (surtout en Afrique du Nord et au Moyen Orient) et moins d'un tiers est pris en charge, y compris dans les pays riches. Avec des coûts irrationnels en termes de gaspillage de ressources, si l'on considère l'existence de traitements qui se sont révélés non seulement efficaces, mais aussi très rentables.