Le Japon peine encore à sortir de la déflation, malgré les Abenomics

Par Romain Renier  |   |  606  mots
Shinzo Abe est toujours sur le fil du rasoir avec ses Abenomics, qui visent à mettre fin à la délfation et à relancer la croissance au Japon (Photo : Reuters)
Les prix ont augmenté de 0,9% en septembre en rythme annualisé au Japon. Mais c'est surtout le fait de la hausse des prix de l'énergie à cause du yen faible. S'il y a un léger mieux par ailleurs, le pays n'est pas encore sorti de la déflation.

Pour le quatrième mois consécutif, les prix ont augmenté au Japon. Hors produits périssables, ils ont en effet progressé de 0,7% en rythme annuel au mois de septembre, selon les chiffres officiels. Serait-ce la marque du succès pour les Abenomics, cette batterie de mesures destinées à sortir la troisième économie du monde de la déflation et à relancer également sa croissance ?

Sans crier victoire, le ministre de la Revitalisation économique Akira Amari s'est réjoui face à "un mouvement positif vers la sortie de la déflation". Même son de cloche du côté du ministre des Finances Taro Aso qui y voit "des progrès dans le bon sens".

La hausse des prix est surtout la conséquence du renchérissement des importations

Il faut toutefois être très prudent. Car cette hausse des prix masque un déséquilibre qui coûte cher au pays. De fait, si les prix montent en moyenne, c'est surtout à cause d'une augmentation du coût du carburant et de l'électricité qui se répercute sur l'ensemble de l'activité économique.

La hausse des tarifs de l'énergie est le résultat des effets conjugués de la politique du yen faible menée par la banque centrale du Japon (BoJ) et de l'arrêt des centrales nucléaires nippones suite à l'accident de Fukushima.

En effet, le pays est obligé d'importer des hydrocarbures qu'il paie de plus en plus cher pour soutenir sa production électrique, à cause du yen faible, dévalué de 25%. Si bien que le Japon, traditionnellement tourné vers les exportations, accentue un déficit commercial qui va de record en record depuis l'arrêt des centrales nucléaires.

Hors produits importés, certains prix continuent de baisser

Les prix de l'électricité ont notamment augmenté de 7,6% sur un an et ceux de l'essence de 9%. Et ce mouvement est valable pour tous les produits qui font appel aux importations. En revanche, les prix des appareils électroménagers et d'autres articles divers ont continué de refluer sur fond de forte concurrence et de demande encore insuffisante, montrant que le mouvement déflationniste n'est pas terminé.

Mais le gouvernement n'a pas tout à fait tort non plus en constatant quelques signes d'embellie. Car pour la première fois depuis près de cinq ans, les prix hors nourriture et énergie se sont stabilisés, mettant fin à leur chute continue depuis des lustres. Et la hausse globale des prix à la consommation durant quatre mois d'affilée est du jamais vu depuis 2008.

Pour confirmer un léger mieux, le gouverneur de la BoJ Haruhiko Kuroda avait pour sa part indiqué mercredi entrevoir "un rétrécissement du fossé entre l'offre et la demande et des signes d'amélioration sur de nombreux articles".

Dans l'attente de l'inflation vertueuse

In fine, même si les prix progressent en moyenne depuis plusieurs mois, on ne pourra dire que le Japon est sorti de la déflation que lorsque le pays verra les prix augmenter grâce à la progression de la demande intérieure. Ce qui confortera les entreprises dans leur volonté d'augmenter les prix sans crainte de perdre des clients, et leur permettra de dégager des marges pour investir et augmenter les salaires. Bref, dégager du pouvoir d'achat supplémentaire pour les Japonais et relancer une spirale inflationniste vertueuse.

C'est cette inflation saine et contenue que vise le gouvernement en tentant lui-même d'amorcer la pompe avec des commandes publiques couplées à des injections de liquidités dans les circuits bancaires via la banque centrale.

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